Placéco Gironde, le média qui fait rayonner l’écosystème

Votre édition locale

Découvrez toute l’actualité autour de chez vous

Anne-Catherine Péchinot : « On n’imagine pas qu’une femme puisse être directrice générale »

Inspiration
jeudi 21 mars 2024

Anne-Catherine Péchinot a répondu aux questions de la rédaction, mais aussi à celles des adhérents de Placéco, présents pour l'occasion. Crédits : MS

Ce mercredi 20 mars à l’occasion de son événement réseau du mois, Placéco invitait Anne-Catherine Péchinot. L’occasion, pour la directrice générale d’Easy Cash, de revenir sur la stratégie de développement de l’enseigne, mais aussi d’aborder son parcours de femme dirigeante, et son engagement pour l’entrepreneuriat féminin.

Avant d’être à la tête d’Easy Cash, vous avez notamment été directrice générale de Rent a Car, mais aussi de Gîtes de France. Avec-vous l’impression que votre parcours fait encore figure d’exception, en tant que femme et dirigeante d’une grande entreprise ?
La première fois que j’ai été nommée directrice générale, j’avais un peu plus de 30 ans, et j’étais enceinte jusqu’au cou de mon quatrième enfant. C’était quand même un peu une exception, j’ai eu un président courageux… ou complètement fou. À ce moment-là, je faisais un peu figure d’ovni, il y avait très peu de femmes directrices générales. Aujourd’hui, je pense que c’est de moins en moins le cas. Il y a quelques années, on m’aurait demandé de citer des femmes cheffes d’entreprise, j’en aurais été incapable. Ces derniers temps, on voit beaucoup de nominations de femmes, notamment dans le secteur du retail. C’est important d’avoir cette mixité, cela fait partie des causes que je soutiens.

Avez-vous parfois eu l’impression que l’on vous a mis des bâtons dans les roues ?
Pas à proprement parler, mais c’est plutôt un manque de considération. Je le vois, je viens de passer trois jours sur le Salon de la franchise [ndlr, à Paris] avec mes équipes. Je portais un sweatshirt Easy Cash, et je ne vous donnerai pas le nombre de messieurs qui m’ont serré la main sans me regarder dans les yeux. Ça, c’est assez fréquent encore. On n’imagine pas qu’une femme puisse être directrice générale. Je le laissais passer avant, maintenant, j’ai zéro tolérance sur le sujet. Je reprends systématiquement la personne, et de toute façon je ne fais pas affaire avec des gens qui ne me saluent pas correctement.

Est-ce que ces hommes sont surpris, quand vous les reprenez ?
Je pense que les gens ne s’en rendent pas compte, quand ils ne le vivent pas. Ce sont les petites tracasseries du quotidien, les gouttes d’eau qui tombent sur nos têtes. Je le vis en tant que femme, mais probablement que d’autres collaborateurs vivent autre chose… Et tant qu’on ne le vit pas, encore une fois, on ne s’en rend pas compte.

Avoir des modèles féminins 

Initiez-vous des démarches, personnellement, pour aider les femmes à entreprendre ?
Oui, j’ai longtemps fait partie d’IWF France [ndlr, International women’s forum] qui organise les Assises de la parité, et je fais partie d’une association qui s’appelle L-Impact. Elle œuvre pour deux sujets, et en premier lieu, aider les femmes à lever de l’argent. Elles en lèvent encore très peu, je crois qu’il y a zéro femme qui dirige une licorne française… Souvent, elles ne pitchent pas bien, ont du mal à se mettre en avant. Donc on les accompagne pour qu’elles soient plus à l’aise. Seconde cause, la représentation des jeunes filles dans les carrières scientifiques. La réforme Blanquer [ndlr, réforme du baccalauréat général et technologique, et du lycée, en 2018] a eu un effet absolument dévastateur sur les jeunes filles, qui ne choisissent plus les maths. Donc on organise beaucoup de conférences en mettant en avant des « role models », si possible un peu plus jeunes que moi pour que les jeunes filles se projettent. J’étais aujourd’hui [ndlr, le 20 mars] à un forum des métiers en zone prioritaire, pour leur expliquer que si on a envie d’être esthéticienne, on peut, mais que si on aime les maths et qu’on est bonne dedans, il faut choisir cela.

Quelles actions mettez-vous en place au sein d’Easy Cash, pour plus de mixité et d’égalité ?
Notre combat, c’est déjà de respecter la loi en ayant des rémunérations équivalentes. Notre index de l’égalité femmes-hommes [ndlr, obligatoire pour les entreprises de plus de 50 salariés, qui regarde notamment l’écart de rémunération] est de 97/10 - ce qui est plutôt un bon score, même si on essayera de s’améliorer encore l’année prochaine. L’idée est qu’à compétences égales, il y ait une rémunération égale. Et puis, j’ai un important sujet du côté des franchisés, c’est avoir des femmes entrepreneures. J’ai beaucoup de couples, et c’est toujours monsieur qui porte le contrat, même si madame travaille. Donc quand il y a des couples, j’essaye de m’assurer que les deux soient au contrat de franchise. Ensuite, et c’est une chose que je porte individuellement et pour laquelle j’essaye d’embarquer les équipes - quand on fait un sujet sur le « role model » des femmes dans la tech, j’ai des développeuses, des web designeuses, et ce sont elles que je mets en avant.

Vous êtes à la tête d’Easy Cash depuis un an et trois mois. Qu’est-ce qui vous a le plus surpris à votre arrivée ?
La première chose, quand on m’a appelée, quand on m’a chassée pour prendre la direction générale, j’ai dû dire « c’est un peu vieillissant, je n’ai pas très envie de le diriger ». Après je me suis renseignée, je suis allée en magasin et je me suis aperçu que c’était bien mieux que l’image que je m’en faisais - où l’on vend des chiens en plâtre qui changent de couleur en fonction de la météo, on va dire. Ensuite, je me suis aperçu que c’était une boîte de tech. Pour réussir dans les métiers de la seconde main, il faut beaucoup de data, pour acheter au bon prix et vendre au bon prix. Je me suis aperçue que dans l’entreprise il y a vraiment un asset incroyable, un outil de cotation et de « pricing » de la seconde main particulièrement puissant, et qui avait une vraie valeur.

Pour aller plus loin :
Easy Cash maintient sa croissance et vise les cœurs de villes

Easy Cash
Fondé en 2001
Siège social à Mérignac
141 magasins
1.200 salariés
CA 2023 : 263M€

Sur le même sujet