RSE : « Le télétravail est insuffisamment pratiqué dans l'expertise-comptable » - Premium

Qu’est-ce que la RSE pour le secteur de l’expertise comptable ? Un expert-comptable, c’est d’abord un entrepreneur. Et un entrepreneur doit intégrer la dimension RSE dans chaque petit acte de sa vie professionnelle et de celle de ses salariés. Cela va de l’aménagement des locaux d’une façon respectueuse de l’environnement, à faire travailler des personnes en local par exemple, et ensuite avoir toute la dimension respect humain : on peut avoir des aménagements pour les personnes souffrant de TMS [troubles musculo-squelettiques, ndlr], des espaces dans les locaux pour que les personnes puissent se retrouver et discuter. C’est aussi toute la dimension du lien social, de la prévention des RPS [risques psychosociaux].Ce sont des engagements assez génériques pour une entreprise du secteur des services. Quelle est la spécificité de l’expertise comptable ? C’est un métier complexe intellectuellement et relationnellement. On travaille sur des activités multiples, des personnes et des profils multiples. On a donc un risque psychosocial un peu plus dense que dans un cadre plus classique. Ca fait partie des activités délicates psychologiquement, il faut particulièrement protéger les salariés. Comment les protéger ? Il faut les former, les laisser s’exprimer librement, qu’ils aient la liberté de choisir leurs domaines de prédilection, qu’ils puissent en parler entre eux. Le télétravail est un mode organisationnel insuffisamment pratiqué à mon sens dans les cabinets, je pense pourtant qu’il permettrait de répondre aux besoins de certains salariés et que la productivité peut s’avérer réelle. Le travail est un enjeu majeur en termes de RSE tant sur un plan écologique car les déplacements sont moindres que sur un plan humain car le salarié ressent la confiance que nous lui attribuons et il peut gérer plus aisément son temps. Notre cabinet CAULIBRI Conseil a intégré au moins deux à trois jours par semaine de télétravail.Pourquoi cette réticence ?Peut-être par besoin d’accueillir les clients qui apportent encore des papiers, par souhait de maitriser ou encore par manque de confiance justifiée ou pas. On est dans des métiers très sécurisés, avec un accès à des données sensibles pour les clients. On veut garantir que l’employé travaille comme il faut et suive les process. On est aussi dans des métiers où il faut une cohésion entre les personnes, que les employés parlent entre eux et que les clients puissent venir. Finalement, les cabinets qui peuvent faire du télétravail sont ceux qui sont très digitalisés, où l’on peut faire des collectes d’information à distance. Les employés peuvent ne venir au bureau que pour rencontrer leurs clients ou leurs collègues et échanger avec la direction sur les enjeux stratégiques. Numériser son cabinet implique d’avoir une approche responsable de l’informatique… Oui. Il faut mesurer les quantités de data que l’on utilise, voir si l’on a pas des choses en double. On voit dans les entreprises énormément de fichiers Excel, Word, qui sont faits par de multiples services, et qui sont souvent des doublons, des triplons… souvent parce que les salariés ne savent pas suffisamment utiliser leurs logiciels métier. On voit aussi la démultiplication des fichiers pdf. Et on retrouve souvent ces fichiers à la fois en local et dans le cloud, ce qui démultiplie encore leur nombre. Il faut réfléchir à sa centralisation de la data, décider où elle va être et ne pas la multiplier inutilement. C’est aussi favoriser les dossiers partagés avec les collègues et les clients plutôt que les emails. On ne peut pas être parfait, mais il faut savoir faire des compromis et choisir le moindre mal. Et chaque employé doit être formé à ces enjeux.« L'expertise comptable est en train de muter »De par leur position, les cabinets d’expertise comptable sont aussi idéalement placés pour accompagner les démarches RSE de leurs clients…Oui, ils peuvent faire des bilans carbone. Mais il faut quand même que ça soit fait conjointement avec des ingénieurs, en tout cas dès qu’il est question d’industries, des processus de production complexes. On peut faire des audits sur les process des entreprises afin de réduire les émissions de CO2. Pour convertir les volumétries telles que les nombres de kilomètres parcourus, les litrages de carburant ou autre, en émission de C02, la collecte de la volumétrie en quantité et typologie s’opère dès la saisie comptable.Et pour les autres enjeux RSE, au-delà du bilan carbone ? Si on fait des bilans sociaux, on peut aussi faire des restitutions formelles sur l’égalité hommes-femmes, les systèmes d’inclusion… en tout cas, l’expert-comptable se doit d’informer les entreprises d’une certaine taille qu'elles ont des obligation de suivi de leurs bilans sociaux ou bilans des données économiques et sociales. Depuis peu, l’établissement d’un bilan prévisionnel nécessite l’intégration de la dimension extra-financière : l’égalité, le bilan carbone, la notion de formation. Certains cabinets sont certifiés pour pouvoir valider ces indicateurs extra-financiers, en particulier dans les sociétés à mission. Il y a beaucoup de missions possibles. L’expertise comptable est un métier en train de muter considérablement. Elle va être appréhendée en partie par l’IA, et développe des besoins en gestion et conseils. On va plus rechercher des profil contrôle de gestion sera plus adapté, ainsi que gestionnaire de projet, et pourquoi pas même des profils ingénieur que l’on formera à la finance. Et pour les employés au profil purement comptable, les former au contrôle de gestion parce que c’est un autre métier.

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