Transmission-reprise : « on ne vend pas une entreprise comme on vend une résidence secondaire » - Premium

Ce n'est pas un secret de polichinelle. La conjoncture économique du territoire est plutôt défavorable en ces temps de crises et les Landes ne font pas exception à la règle. Il y a quelques semaines, François Lafitte, président de la CCI des Landes avait d'ailleurs présenté le baromètre établi par la collectivité. Lors de son bilan, il avait évoqué des résultats (presque) sans nuances avec une situation moins bonne que lors des précédents exercices, mais qui varie selon les secteurs. C'est dans ce contexte compliqué qu'évolue Jean-Philippe Burgeat, chargé d'affaires au sein du cabinet Cap Cession. Et s'il estime que plusieurs centaines de milliers de sociétés en France pourraient changer de main en 2024, son activité n'est pour autant pas à l'arrêt. Rencontre.Dans les Landes, la tendance est à la prudence côté investissements. C'est en tout cas ce qui était détaillé dans le baromètre économique de la CCI, fin 2023. Quelle est votre vision du marché actuel ? Je constate effectivement un léger ralentissement dans mon activité. Pour autant, beaucoup de transitions s'opèrent chaque année et beaucoup s'opéreront en 2024, j'en suis certain. Les Landes comme le Pays basque restent des territoires attractifs de par leur situation géographique et ils continuent d'attirer de nombreux touristes. Au niveau de la partie littorale de ces deux départements, beaucoup d'entrepreneurs cherchent une entreprise à reprendre, notamment dans le secteur du tourisme ou de l'hôtellerie, mais peu en vendent. D'ailleurs, je pense que si j'avais aujourd'hui dix hôtels à vendre à Biarritz ou Hossegor, je pourrais sans doute effectuer les transactions dans la semaine. Et ce, malgré le prix ; parce que les prix sont généralement très élevés sur ce marché. Et c'est un marché compliqué, d'autant qu'il évolue souvent en off. Les ventes se font par bouche-à-oreille et mon travail consiste donc à être très attentif, aussi bien en ce qui concerne les transactions landaises que les basques.Quelle est la différence entre le marché landais et le marché basque selon vous ?Je dirais que les différences ne sont pas entre ces deux départements mais plutôt entre la côte et l'intérieur des terres. Dans les Landes, il y a trois secteurs distincts. Le littoral jusqu'à 30 kilomètres, les 30 kilomètres suivants et puis, la partie limitrophe au Gers. Ce sont trois parties d'un même département mais qui sont très différentes d'un point de vue économique, notamment parce que les activités y sont très différentes. Le littoral landais, comme le littoral basque, possède beaucoup d'entreprises liées à l'hôtellerie et au tourisme, comme évoqué précédemment. Plus dans les terres, dans les Landes, la filière bois est très présente, c'est une filière historique, qui est d'ailleurs en souffrance à l'heure actuelle. Dans les terres également, des filières agricoles, à l'instar, là-aussi, du Pays basque. Enfin, autre similitude pour ces deux départements : ce sont souvent des petites structures qui sont rachetées par des plus grosses entreprises. Être à la tête d'une TPE peut parfois être un parcours du combattant et ce territoire en compte énormément.Comment effectuez-vous votre prospection ? J'accompagne exclusivement des entreprises qui font entre 1 et 10 millions d'euros de chiffre d'affaires. En règle générale, mon portefeuille est composé d'une dizaine d'affaires que je traite en parallèle. J'essaie également d'avoir deux ou trois secteurs d'activité différents, avec des entreprises de taille différente. Malgré cela, il m'arrive de ne pas avoir mon portefeuille, l'entreprise ou le secteur recherché par mon client. Dans ce cas, c'est à moi d'aller la chercher en direct. C'est pour cette raison que j'entretien au quotidien une collaboration étroite avec la chambre de commerce et d'industrie des Landes mais aussi du celle du Pays basque. Je travaille avec les acteurs locaux, comme des experts comptables, des avocats ou encore des notaires. C'est d'ailleurs l'un des facteurs essentiel de réussite dans ce métier qu'est le mien : la capacité à effectuer un bon maillage territorial. Mon but est d'avoir des connexions un peu partout. Et quand vous n'avez aucun contact qui vous permette d'assurer la vente, quelle est votre stratégie ? Dans ce cas, je fais de la prospection de terrain et c'est à ce moment-là que mon travail devient passionnant. Je vais me mettre en quête de personnes qui n'ont pas forcément entamé un processus de cession mais qui peuvent y penser à court ou moyen terme et je les accompagne dans ce cheminement. J'essaie de devenir un tiers de confiance, et pour moi chaque transmission est différente. Je rentre dans la vie de l'entreprise, je découvre son histoire et j'essaie d'être le plus à l'écoute possible, d'autant que beaucoup de choses rentrent en compte : les aspects financiers, fiscaux, mais aussi familiaux parfois. On ne vend pas une entreprise comme on vend une résidence secondaire. C'est un processus qui est long et parfois compliqué mais très gratifiant aussi. Il peut m'arriver d'être impliqué dans la sauvegarde d'un ou plusieurs emplois et c'est ma manière de participer au rayonnement de l'économie locale. Je suis un entrepreneur moi-même, j'ai créé, cédé, et racheté plusieurs entreprises et j'essaie de mettre mon expérience à profit.Quels sont vos projets pour 2024 ?Aujourd'hui le réseau Cap Cession couvre une quarantaine de départements partout en France. Dans l'équipe, nous sommes tous des indépendants, avec des franchises et des phases de recrutements. D'ailleurs, je pense recruter prochainement quelqu'un sur Mont-de-Marsan. J'ai besoin de quelqu'un qui connaisse bien cette partie du département et qui vive à proximité. C'est une question de présence et de visibilité. Je pense que c'est important dans mon métier. Il se peut aussi que j'essaie, à terme, de m'implanter sur le Béarn. Mais c'est un lieu où j'ai moins de réseau et où je maîtrise moins le tissu économique, qui est très différent de celui du Pays basque. Donc pour l'instant, rien n'est acté.Pour aller plus loin : Transmission-reprise (2/5) : « il faudrait accompagner 10 000 entreprises par an »

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