A Martillac, Merck surfe sur le boom des anticancéreux - Premium

Depuis quelques jours, les pelleteuses sont à l’ouvrage sur un vaste espace défriché en lisière de la technopole Montesquieu, entre Léognan et Martillac. Un nouveau bâtiment de 3.000 m² y sortira de terre d’ici le troisième trimestre 2022. Ce sera le treizième du site girondin de Merck Biodevelopment, l’une des filiales du géant allemand de la pharmacie Merck KGaA (17,5 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2020, plus de 58.000 employés dans le monde). « La capacité de production de ce nouveau bâtiment devrait, à terme, tourner aux alentours de 32 lots à grande échelle par an. En considérant que nos clients ont généralement besoin d’un à trois lots par an, il devrait nous permettre de produire une dizaine de molécules commerciales », se réjouit Sébastien Ribault, responsable du site. Les développements envisagés à Martillac vont également se traduire par une politique de recrutement intensive, avec 30 à 40 créations de postes prévues par an sur les trois prochaines années. En 2023, le site devrait ainsi réunir quelque 500 collaborateurs, contre 380 aujourd’hui. « En 2011, nous n’étions que 65 ! », rappelle Sébastien Ribault.Développement et production de nouvelles moléculesÀ Martillac, les équipes de Merck Biodevelopment se concentrent sur le développement et la production de molécules à destination de l’industrie pharmaceutique. Le site consacre 20% de son activité à la production de médicaments commercialisés directement par la branche Healthcare du groupe Merck, mais la part la plus importante de ses travaux relève de la sous-traitance, via la branche Life Sciences du groupe. Si le site dispose de cette double casquette, c’est qu’il a développé des savoir-faire spécifiques aux deux activités. « Dans tous les cas, on parle de protéines recombinantes, mais nos collègues de Healthcare travaillent sur des technologies microbiennes, alors que du côté Life Sciences, on utilise des cellules de mammifère », explique Sébastien Ribault. Le procédé, courant dans l’industrie pharmaceutique, permet notamment de produire les anticorps recombinants utilisés dans les traitements en oncologie, qui représentent aujourd’hui 80% de la sous-traitance assurée par le site de Martillac, le reste partant en direction du secteur cardiovasculaire. « Notre activité est calquée sur ce que nos clients viennent nous demander. La grande majorité des molécules développées aujourd’hui en biotechnologies sont à destination de traitements contre le cancer, ce qui explique qu’on soit en croissance depuis des années », résume Sébastien Ribault. Martillac intervient à la fois sur le développement et la production des molécules. « Nos clients vont de la biotech émergente avec les fonds, l’idée, et la séquence de la molécule à exploiter, jusqu’à des sociétés de 50 à 100 personnes qui n’ont pas ni la taille, ni le savoir-faire nécessaire pour faire tout le développement et la production clinique d’une molécule », indique le responsable. Merck Biodevelopment leur met donc à disposition ses infrastructures et son offre de services, avec une compétence industrielle et la garantie du respect des « bonnes pratiques de fabrication », viatique indispensable à l’obtention des agréments sanitaires dans les pays de future commercialisation. Le groupe a par exemple annoncé début mars la signature d’un contrat avec une biotech coréenne, Alteogen, dont le procédé médicamenteux sera bientôt transféré à Martillac de façon à accompagner de nouvelles possibilités d’administration. « Ils souhaitent changer la formulation du produit et accroître la concentration de la molécule, ce qui demande un savoir-faire spécifique », explique Sébastien Ribault.Des équipements à usage uniquePour passer plus facilement d’un procédé à un autre et optimiser l’utilisation des bioréacteurs dans lesquels est assurée la production des molécules, Merck a développé depuis dix ans des procédés dits « à usage unique ». Ses bioréacteurs, sortes de grandes cuves en inox pouvant aller jusqu’à 2.000 litres, sont équipées de poches en plastique jetables grâce auxquelles l’industriel s’affranchit des fastidieuses étapes de nettoyage, de stérilisation et de contrôle. « Ce sachet plastique contient tous les éléments nécessaires à la culture, on le gonfle pour le déployer, et on le branche aux différents équipements. Il nous faut aujourd’hui une journée pour changer de procédé, là où la cuve en inox traditionnelle nous demandait jusqu’à sept jours », illustre le dirigeant. Si la crise sanitaire a ralenti le rythme des demandes de développement de nouveaux procédés, faute de disponibilité dans les hôpitaux pour les études cliniques, l’activité générale s’est maintenue en 2020, portée notamment par des projets liés à la lutte contre la pandémie. « On nous a par exemple demandé de produire une des protéines de surface du Covid comme témoin positif pour mettre au point des tests antigéniques, décrit Sébastien Ribault. « Une société américaine est également venue nous voir avec un candidat d’anticorps anti-Covid, en nous demandant ce qu’il était possible de faire pour arriver très rapidement à l’échelle de production. Nous avons redessiné entièrement notre façon de concevoir des molécules, ce qui nous a permis de boucler le projet en 9 mois, contre 15 à 18 mois pour un développement classique ».

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