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Moutet à Orthez : 100 ans de fabriqué en France

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mardi 27 juin 2023
Moutet à Orthez : 100 ans de fabriqué en France

Benjamin Moutet. Crédits : SAS Moutet

Comme le béret basque, né contrairement à une idée reçue dans les vallées d'Aspe et d'Ossau, le linge basque est fabriqué en Béarn, à Orthez. Cinq générations se sont succédées dans une entreprise plus que centenaire : le tissage Moutet. Après la tradition, l’heure est aujourd’hui au respect des normes sociales et environnementales et de l’IGP.

Ce week-end, du 1er et 2 juillet, il devrait être à l'Elysée, pour la grande exposition du fabriqué en France où il représente le département des Pyrénées Atlantiques. Et finalement, Benjamin Moutet, le patron de tissage Moutet à Orthez, sera au Brésil où il défendra les valeurs des IGP, Indications Géographiques Protégées, à la demande de la Commission européenne qui en promeut le modèle. Une question qu'il connaît bien puisque huit années auront été nécessaires pour faire reconnaître l'IGP « Linge basque ».

Moutet. Un nom bien connu en Béarn, et pour cause. 1874 : Jean-Baptiste est le premier de la famille à créer son atelier de tissage. C’est en 1919 qu’il produit la « mante à bœuf » une toile épaisse qui protège les bovins du soleil et des insectes et qui comporte des rayures, sept, comme autant de provinces basques. De père en fils, l’entreprise se transmet et devient leader sur le marché du linge basque. L’arrivée de Georges Moutet, ingénieur textile, fera changer d’échelle l’entreprise en 1973 avec 100 métiers à tisser et 250 employés derrière, avant que dans les années 90, dans un contexte de mondialisation, l’entreprise ne dépose le bilan. C’est Catherine Darrigrand, sa fille qui reprendra en 1999 le flambeau. Elle décide de changer le format et de s'entourer de designers. Avec l'arrivée de la crise financière en 2008, l'entreprise aura trop de contraintes financières et se verra lâchée par ses soutiens bancaires. Elle dépose le bilan pour 500.000 euros de dettes. C'est à cette même période que Benjamin, alors engagé dans un groupe de recrutement parisien, perd son emploi.

Ce sont les traditionnelles fêtes d'Orthez, pour lesquelles il revient dans sa ville, qui provoquent le déclic. Il a des valeurs et des idées. Il analyse le potentiel de la maison ancestrale, écarte un investisseur et se lance. A la barre du tribunal, il présente un plan de continuation. A l'époque, il ne reste que 12 salariés. Il est viscéralement attaché à l'entreprise familiale et au territoire. « Il y a un socle qui est propre au cinq générations : maintenir le savoir-faire à Orthez. Ma seule stratégie a été de renforcer cette connaissance. Le savoir faire, c'est la main de l'homme donc il a fallu recruter, former, et bien sûr investir dans le matériel (entre 100 et 150.000 euros par machine). Pour le commercial, on s'est tourné vers de petites séries, d'excellence. Un peu comme un restaurant étoilé, je préfère faire du sur-mesure, en petites quantités et en circuit court. Sur les grands volumes, on ne peut pas lutter. J'ai repris et développé le concept de ma mère, fait appel à des designers de renom, puisque nous avions investi dans des machines permettant de produire du Jacquard. On a gardé les bandes verticales du linge basque mais on y a associé des créations en Jacquard, beaucoup plus fines. »

Cette stratégie paye, non seulement en France mais aussi à l'étranger où les productions Moutet s'exportent aujourd'hui pour 35% du chiffre d'affaires. « Ce sont des pays où le savoir-faire français a une haute valeur ajoutée. Ce n'était pas forcément évident de se retrouver aux Etats-Unis, au Japon, en Autriche ou en Allemagne mais c'est aujourd'hui une grande satisfaction d'en faire la promotion hors de nos frontières. »

Usine ouverte aux designers

Concilier tradition et modernité. Benjamin Moutet a choisi, depuis 2016, d'accueillir en résidence des designers souhaitant faire fabriquer des créations qui ne sont pas forcément à destination de son cœur de métier, le linge de table et de cuisine. Ce peuvent être des créateurs de mode, des architectes, de la décoration, tous types de projets textiles qui ne correspondent pas forcément au catalogue de base de tissage Moutet. L'idée est d'aller sur de toutes petites séries, à partir d'un lé d'un mètre, qui permettra de faire de l'échantillonnage et du commercial. « Sur le programme usine ouverte, on n'est pas sur de la fabrication mais véritablement sur de la co-construction. Le designer arrive ici et on le met en relation avec notre équipe de création pour que son projet soit le plus pertinent possible en tissu Jacquard. On est désormais loin des rayures de la mante à bœuf. C'est ce qui nous permet d'affirmer qu'ici, à Orthez, nous sommes les seuls au monde à faire du linge basque et du Jacquard. » Matali Crasset, Blandine Lamy, Sokina Guillemot, des artistes locaux ou nationaux, pour créer des collections uniques. Nappes, para-tapas, torchons, les productions s'enchaînent. C'est d'ailleurs la nappe de Matali Crasset qui représentera les couleurs de tissage Moutet à l'Elysée.

Tissage Moutet
Création en 1874 à Orthez
Effectif de 35 salariés
Plus d'1 million d'euros de chiffre d'affaires