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Aerospace Valley esquisse sa carte des compétences à horizon 2035

Écosystème
mardi 16 janvier 2024

Yoann Ducuing, Bruno Darboux (président) et Eric Giraud (directeur général), du pôle Aerospace Valley. Crédit : DM

Le pôle Aerospace Valley a réalisé des diagnostics relatifs aux compétences dans les filières aéronautiques et spatiales sur son territoire. Objectif, à horizon de 10 ans : comprendre et mesurer les besoins en compétences et ressources humaines du tissu industriel, cartographier les différentes formations et identifier les besoins qui ne seraient éventuellement pas adressés aujourd’hui.

Dans le cadre du plan France 2030, le pôle de compétitivité Aerospace Valley avait été sélectionné début 2023 par l’Etat pour mener, en Nouvelle-Aquitaine et en Occitanie, des diagnostics sur les compétences au sein des filières aéronautique et espace. Réalisés sur six mois, ils sont en lien avec deux priorités du plan concernant l’écosystème et le territoire du pôle : « produire le premier avion bas-carbone » et « prendre toute notre part à la nouvelle aventure spatiale ». Pour rappel les deux régions concernées par le pôle concentrent quelque 130.000 emplois (108.000 sur l’aéronautique, 22.000 sur le spatial), soit 40% des effectifs nationaux du secteur, un niveau équivalent à ce qu’il était avant le Covid.

Concernant l’aéronautique, deux scénarios ont été envisagés pour étudier la croissance des effectifs d’ici 2035 : « voler moins », qu’on pourrait qualifier d’hypothèse « pessimiste » et « voler plus vert », laissant respectivement entrevoir des progressions de 24% et 47% à cet horizon. « La vérité sera certainement entre les deux », modère Yoann Ducuing, directeur délégué aux Solutions et Services de Formation au sein d’Aerospace Valley, soulignant néanmoins « les besoins importants qu’il faudra être en capacité de fournir, avec tout ce que ça implique en matière de formation ». L’étude évalue à 30.000 les emplois dédiés à l’avion bas carbone à partir de 2030, principalement sur la R&D et l’ingénierie (+10.000 emplois) pour des phases de conception, le passage en production de masse n’étant attendu qu’après 2035. Jusqu’à cette date, ce sont principalement les hausses de production sur l’aviation classique qui tireront la croissance des effectifs : « il faudra assurer le ramp-up actuel », confirme-t-il, avec 11.500 emplois industriels supplémentaires attendus. Sur la filière spatiale, les prévisions font le grand écart, avec des perspectives comprises entre +21% et +80%, selon qu’on se projette sur une évolution « au fil de l’eau » ou directement en lien avec « la dynamique des marchés ».


Evolution des effectifs aéronautiques d'ici 2035. Crédit : Aerospace Valley

L’arrivée de compétences inédites

Au-delà de l’aspect quantitatif et des compétences traditionnelles « à fortement renforcer » (mécanique, usinage, aérodynamique…), la filière aéronautique est aussi appelée à s’enrichir de compétences « qui existent ailleurs, mais inédites dans son périmètre » : chimie (des batteries, des carburants, de l’hydrogène), climatologie/météorologie ou encore cryogénie. Mais aussi de compétences liées à l’analyse du cycle de vie, à l’éco-conception, à la compréhension d’un bilan carbone ou aux enjeux environnementaux du secteur aérien. Dernier aspect : « il y aura des soft skills à acquérir pour intégrer les enjeux socio-économique et l’impact des choix technologiques sur l’environnement », poursuit Yoann Ducuing, évoquant notamment tous les aspects liés à « la connaissance, l’évaluation et l’arbitrage entre les différents types d’impact sur le carbone, le climat, les ressources, la biodiversité… ».

Concernant les compétences attendues d’ici 2035 par la filière régionale du spatial, les besoins devraient doubler en moyenne d’ici cinq ans sur des blocs de savoir-faire plébiscités : concernant les systèmes (gestionnaire projet, architecte de systèmes de propulsion / des systèmes spatiaux : des systèmes embarqués), la data (développeur logiciel, architecte logiciel, expert en cybersécurité, data analyst), la production (monteur, câbleur, technicien assembleur, fraiseur, usineur, ajusteur) et les applications (opérateur de système, développeur d’applications spatiales, spécialiste en météorologie / océanographie / agronomie, maintenancier des systèmes). De nouveaux métiers feront également leur apparition sur le marché du spatial, le directeur délégué évoquant notamment ceux d’écologue (impact des actions sur l’environnement) ou de pentesteur (expert en intrusion des systèmes informatiques).


Nouveaux métiers attendus dans le secteur du spatial. Crédit : Aerospace Valley

En conclusion sur les enjeux RH de l’aéronautique régionale, deux sujets centraux s’imposent - recruter en nombre et maintenir l’attractivité - aux cotés de deux enjeux liés : conserver les talents et former les collaborateurs. Concernant les enjeux RH sur le spatial, le diagnostic fait émerger le recrutement et le management des compétences comme enjeux clés. Avec notamment la question de l’attractivité à adresser, face aux concurrences (locales, nationales, européennes, mondiales), ainsi que la problématique de la pyramide des âges, avec 25% des effectifs des grands groupes du secteur qui sont des seniors (+ de 56 ans), alors que seuls 12% des sociétés interrogées ont une GPEC (gestion prévisionnelle des emplois et des compétences) à trois ans.

Un potentiel de formation adapté ?

Face à ces besoins, la formation régionale n’a « pas à rougir », estime Yoann Ducuing, évoquant quelque 360 formations recensées (110 en Nouvelle-Aquitaine, 250 en Occitanie) directement liées à l’aéronautique et au spatial, ainsi que plus de 830 formations généralistes pouvant être utiles au secteur. En résumé, le diagnostic constate « une offre en formation initiale orientée aéronautique/spatial riche et très diversifiée, une offre en formation continue importante et adaptée/adaptable rapidement aux nouveaux besoins de compétences », mais souligne deux points de vigilance en forme d’interrogations : « les formations sont-elles attractives en elles-mêmes ? » (avant les métiers liés) et « y a-t-il la capacité à former des volumes plus conséquents ? ». Le directeur délégué estime sur ce plan que « les organisme de formation se mettent en ordre de marche ». Et de rappeler que sur l’appel à manifestation d’intérêt « compétences et métiers d’avenir », la seconde étape porte sur la création de nouveaux dispositifs de formation. « Ils auront les moyens de leurs ambitions, avec un ticket d’entrée d’un million d’euros minimum pour les financements. »


Potentiel quantitatif des formations sur le périmètre du pôle. Crédit : Aerospace Valley

Selon les estimations, sur la zone du pôle Aerospace Valley, les effectifs liés à l’aéronautique et au spatial devraient globalement progresser de 5.000 emplois par an lors des 10 prochaines années, induisant quelque 10.000 recrutements par an. Dernier sujet, une féminisation du secteur clairement à la peine : « Il y a encore largement désertion, c’est intégré le travail à faire est énorme, dans les collèges et lycées, même dès l’école primaire ».

Pour aller plus loin :
Grand Sud-Ouest : l’aéronautique redécolle en 2022, le spatial marque le pas

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