Deeptech : comment Denergium veut limiter l’impact énergétique des data centers - Premium

L’informatique en général et le monde du calcul intensif en particulier commencent à se convertir à la sobriété énergétique. Une nécessité, selon Jean-Paul Harnisch, l’un des trois cofondateurs et directeur général de Denergium (Digital Energy Optimum), jeune pousse girondine fondée en février 2023 et qui propose une approche originale sur l’optimisation énergétique des centres de calcul. « Le TCO [ndlr, total costs of ownership, c’est-à-dire les coûts totaux correspondant à la fourniture et l’exploitation] d’un data center a beaucoup évolué. Avant, c’était principalement le prix des matériels. Maintenant, une grosse partie est liée à la consommation électrique. Et avec l’augmentation du coût de l’énergie, ça devient un sujet assez crucial », cadre-t-il. Et le développement des solutions d’intelligence artificielle va encore « tirer le monde du calcul intensif ». Quand on parle de consommation des data centers, « les gens ont travaillé sur les bâtiments, l’isolation, la climatisation, la récupération de la chaleur fatale. Mais il n’y a rien, aujourd’hui, pour améliorer l’efficacité énergétique des applications qui tournent sur ces serveurs », constate-t-il.« On agit vraiment à la racine du problème. C’est au sein du microprocesseur que tout commence. Avant, on parlait de “time to solution”, avec l’idée d’arriver au résultat escompté quel que soit le coût énergétique. Nous voulons basculer sur le paradigme “energy to solution”, c’est-à-dire effectuer le calcul en consommant le moins d’énergie possible. » L’approche de Dernergium repose donc sur le « profil énergétique des applications, la courbe représentant la consommation d’une application pendant son exécution ». La solution logicielle en cours de développement par la startup devrait ainsi permettre de « connaître le profil énergétique, des applications comme des matériels informatiques utilisés, afin de distribuer l’exécution des applications finement sur les différents serveurs du data center », schématise le dirigeant.Un marché à plus de 36 milliards de dollarsParmi les avantages attendus, augmenter les capacités de calcul, baisser les coûts financiers d’exploitation et faire diminuer les coûts matériels en donnant la possibilité aux data centers de rester à niveau ou d’augmenter leurs capacités sans faire l’acquisition de serveurs ou ressources supplémentaires sur le cloud. C’est en tout cas la vision cible : 20% de gains de capacité de calcul à fin 2026. Le tout, « sans imposer de modifier le code source des applications », précise Jean-Paul Harnisch. Et de souligner que la solution maison utilisera elle-même l’IA pour progresser au fur et à mesure de son utilisation et ainsi maximiser l’optimisation. Le spectre des clients potentiels est extrêmement large. « On parle de recherche, de monde académique, d’agences gouvernementales comme Météo France. Mais aussi le monde industriel, l’aéronautique, la pharmacie, ou encore la finance… Ils font tourner des modèles très complexes. On peut aussi travailler sur l’amont, avec les éditeurs de logiciels de simulation, justement pour leur permettre d’optimiser la consommation énergétique liée à l’exécution de leur code informatique. » Pour l’heure, Denergium a dépassé le stade de la preuve de concept et commence à commercialiser un embryon de solution. « Parmi nos clients, on a un gros éditeur de logiciels de simulation, qui fait des milliards de chiffre d’affaires. On a travaillé avec eux et les développeurs ont réussi à diviser pratiquement par deux la consommation. »Sur un marché des centres de calculs intensifs estimé à plus de 36 milliards de dollars, le modèle économique de Denergium sera simple : une licence annuelle, avec un coût proportionnel à la puissance de calcul du client. Dans un premier temps, l’entreprise veut d’abord sortir du bois. « Le monde du calcul intensif, c’est un vrai microcosme où tout le monde se connaît. On va fonctionner par réseautage et capillarité. Il y a aura aussi les salons dédiés, comme le forum Teratec à Paris, ISC à Hambourg, Supercomputing aux USA, c’est là qu’on va se tester et être à l’épreuve du feu. On veut briser un plafond de verre avec notre approche. Là où les concurrents font de l’optimisation serveur par serveur, nous avons une approche globale, agnostique par rapport aux fabricants de serveurs. On peut envisager une optimisation pratiquement quatre fois supérieure à ce qui se fait aujourd’hui », estime-t-il. L’entrée au sein de l’incubateur « Transitions » d’Unitec, annoncée il y a quelques semaines, permettra des contacts privilégiés avec certains des partenaires, comme EDF, Suez, Enedis… « Il va y avoir du mentoring et des possibilités de travail en commun avec leurs équipes de recherche dans le domaine du calcul intensif », se réjouit le dirigeant.Deux levées de fonds et une vingtaine d’embauchesSoutenue par la Région Nouvelle-Aquitaine pour la partie prototype et R&D, par une bourse French Tech Emergence pour le développement, Denergium est également candidate au concours national iLab. L’entreprise travaille actuellement à réaliser une première levée de fonds d’1,5 million d’euros, à boucler d’ici fin 2024-début 2025. L’équipe, les trois fondateurs et un premier ingénieur développeur, pourra ainsi s’enrichir. « On cherche un deuxième ingénieur avec un vrai profil R&D, orienté calcul intensif et IA. En 2025 on va monter en puissance, avec deux ingénieurs R&D supplémentaires et sept ingénieurs développement. » Un effectif pour atteindre la vision cible évoquée, en ajoutant des fonctionnalités supplémentaires au fur et à mesure. « L’accélération commerciale est clairement prévue à partir de fin 2026-début 2027, avec l’équipe dédiée qui va grandir. En 2027, on devrait être 27 personnes, une douzaine sur le développement et une quinzaine pour le marketing et le commercial », déroule-t-il. Fin 2027-début 2028, il serait alors temps de « viser une deuxième levée de fonds, pour permettre à Denergium de décoller commercialement et internationalement aussi ». Avec une ambition clairement affichée : « devenir un acteur clé mondial dans l’optimisation du calcul intensif ».DenergiumSAS fondée en février 2023Siège social : CestasEffectif : 4 personnesCA : n.c.

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