Comment U’rself a déployé la semaine de quatre jours pour ses salariés
Alexandre de Roumefort, fondateur et CEO de l'entreprise. Crédits : U'rself
La PME girondine U’rself teste, depuis un mois et demi, la semaine de quatre jours. Une évolution votée par la majorité des salariés, et qui sous-entend de faire évoluer l’organisation du travail, et la répartition des tâches. Pour Placéco, le fondateur et CEO de U’rself, Alexandre de Roumefort, revient sur ce changement.
Quelles sont les problématiques qui poussent une PME à modifier son organisation pour passer à la semaine de quatre jours, quand celle de cinq fonctionne ? Pour U’rself spécialiste de la PLV (publicité sur le lieu de vente), 44 salariés et plus de 10 millions d’euros de chiffre d’affaires, il s’agit avant tout de redonner de la motivation à ses équipes. « On a bien compris, depuis longtemps, qu’il faut allier vie de famille et vie professionnelle. Quand on travaille en étant heureux, on arrive à mieux produire », introduit Alexandre de Roumefort, fondateur et CEO de U’rself. Derrière ce constat généraliste, le dirigeant a également été confronté à une réalité : après plusieurs naissances, les salariés concernés revenaient généralement au bureau avec un rythme de quatre jours par semaine, sans que leur charge de travail ou leur nombre de clients ne diminuent. « On s’est dit qu’il y avait un sujet, et on a expérimenté la semaine de quatre jours avec deux salariés volontaires durant plus d’un an. »
Mais appliquer ce rythme à deux personnes, ce n’est pas la même chose que l’appliquer à une entreprise entière. Alexandre de Roumefort a donc regardé autour de lui pour voir ce qui se faisait, et c’est notamment auprès du groupe LDLC et de son dirigeant, Laurent de la Clergerie, qu’il a trouvé des réponses. « Nous avons des similitudes dans notre activité. On travaille avec 150 clients qui ont des réseaux de magasins ouverts six jours sur sept, et on couvre des ouvertures cinq jours sur sept. On ne pouvait pas passer à quatre jours en fermant, ou en restreignant nos plages horaires. Et puis, si l’on peut adapter son rythme de travail dans les bureaux, on ne savait pas trop si c’était possible pour la partie production et logistique », rembobine Alexandre de Roumefort. LDLC ayant constaté qu’un changement de rythme ne pénalisait la logistique, U’rself a donc sauté le pas.
« C'est important de poser des garde-fous »
La semaine de quatre jours à 32 heures, au lieu de cinq jours et 35 heures (sans changement de salaire) est donc en vigueur depuis le 4 septembre, après un vote des salariés. Sur les trois sites de U’rself, ceux de Bordeaux et de Rennes ont voté pour, et ceux de Toulouse, contre. « On a voulu quelque chose de très démocratique pour être certains que l’ensemble des équipes y adhèrent, poursuit le dirigeant. Notre site de Toulouse est une plus petite structure de cinq personnes. On respecte leur choix, et on espère que l’exemple des autres sites les incitera à sauter le pas. » Parmi les inquiétudes de certains salariés, Alexandre de Roumefort a constaté des peurs quant au changement de rythme de travail, au jugement de l’entourage, ou encore des personnes qui ne savaient pas quoi faire d’un troisième jour de repos.
En pratique, aucun jour n’est imposé au salarié, et chaque service s’organise pour assurer une continuité du travail. Ce qui demande une meilleure coopération, pour que chacun puisse assurer le dossier de l’autre lorsqu’il est en repos. Et sur le plan administratif ? « C’est un accord d’entreprise qui est renouvelé tous les ans par tacite reconduction, et qui peut être dénoncé soit par le CSE, soit par la direction, détaille notre interlocuteur. On a prévu une durée d’un an pour tester ce dispositif, pour se laisser le temps de le mettre en place, car au début il peut y avoir des ratés et c’est normal. » Rien ne change non plus pour les salariés en matière de cotisation et de vacances, car le contrat de travail reste à 35 heures. Seule nuance : lorsqu’un salarié pose un jour de congé dans la semaine, il ne peut bénéficier du dispositif. « Ce doit être une semaine complète pour que l’on ne travaille que quatre jours, précise Alexandre de Roumefort. Nous sommes une entreprise et nous avons besoin d’un certain nombre de jours de travail. Nous estimons pouvoir le faire en quatre, mais pas en trois. C’est important de poser des garde-fous. » En pratique également, les personnes bénéficiant de RTT comme les cadres doivent utiliser ces jours supplémentaires pour la semaine de quatre jours. « Ils utilisent la vingtaine de RTT pour ce dispositif et lorsque ces jours sont épuisés, U’rself prend le relais et offre le jour non travaillé », schématise notre interlocuteur.
Doubler le chiffre d'affaires
Ce changement d’organisation ne fait pour autant pas oublier à U’rself ses objectifs de croissance. Et ambitionne de doubler d’ici cinq ans son chiffre d’affaires, pour atteindre les 20 millions d’euros - à la fois par de la croissance externe et par des leviers organiques. Les recrutements suivront ensuite au fil de l’eau, selon la hausse du chiffre d’affaires et l’arrivée de nouveaux clients. Une perspective qui n’inquiète pas Alexandre de Roumefort, car selon lui, les sollicitations de candidats se sont accentuées une semaine après avoir annoncé le passage à la semaine de quatre jours. « On voit une certaine attractivité, tous services confondus, y compris en informatique où l’on n’a jamais eu de demandes entrantes. » De quoi conforter le dirigeant dans son choix. Et d'insister : « C’est important que cette évolution soit prise collégialement. »
U'rself
Fondée en 2016
Basée à Bordeaux
44 salariés
CA 2022 : 10M€