Solar Transparencies : bientôt une nouvelle filière solaire en Nouvelle-Aquitaine ? - Premium

18 mois pour faire émerger une première unité de production préindustrielle, doublée d’un centre de R&D doté de capacités de formation : telle est l’ambition affichée par les porteurs du projet Solar Transparencies. « Dire quand et où le centre ouvrira serait prématuré, mais ce qui est sûr, c’est que l’on produira en Nouvelle-Aquitaine. Le projet industriel et le business plan sont bouclés, on a des investisseurs qui se sont avancés, et la demande est déjà importante, notamment à l’international. On démarre aujourd’hui ! », s’exclame Pierre Vitel. Inventeur d’une technologie de refroidissement rapide et économe en énergie, dédiée notamment au monde de l’agroalimentaire, l’ingénieur s’attaque avec Solar Transparencies à une aventure d’envergure : assurer le transfert de deux technologies solaires nées dans les laboratoires de l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL), pour les associer à sa propre invention.Des panneaux inspirés de la photosynthèse La première de ces technologies, connue de longue date par les experts du solaire, prend la forme d’une cellule photovoltaïque à pigments colorés (dye-sensitized solar cell, souvent abrégé en DSC), dont le fonctionnement s’inspire de celui de la photosynthèse des plantes. « Là où la chlorophylle absorbe la lumière pour assurer le développement de la plante, des pigments colorés produisent des charges électriques », résume le chimiste suisse Michael Grätzel, inventeur du procédé. Contrairement à un panneau solaire opaque, la « cellule Grätzel » ne capte qu’une partie de la lumière, ce qui lui permet d’être intégrée à des vitrages et ouvre donc de nombreux débouchés potentiels dans le bâtiment et la fourniture d’énergie. « Avec le silicium, c’est tout ou rien, si vous n’avez pas assez de lumière, vous ne produisez pas de courant. La DSC est capable de produire en continu, même si bien sûr la puissance dépend des conditions », vante Pierre Vitel. Mis au jour en 1991, le procédé a depuis fait l’objet de nombreuses améliorations, qui se traduisent déjà par des applications industrielles, mais à petite échelle, à l’image des cellules flexibles développées par la société suédoise Exeger pour alimenter de petits appareils high-tech. Dans le bâtiment, la cellule Grätzel n’a toutefois pas dépassé le stade de quelques projets expérimentaux (voir photo de une) mais des progrès récents ouvrent la voie à un passage à des panneaux de plus grande taille, notamment grâce aux travaux de Michael Grätzel sur les cellules solaires en pérovskite, dont le rendement et la durée de vie, inférieurs au départ, se rapprochent désormais de ce que proposent les cellules à base de silicium, matériau abondant mais soumis à d’importantes pressions d’approvisionnement et associé à des terres rares dans la construction de panneaux photovoltaïques. « On a maintenant le rendement, la stabilité et le recyclage, avec une empreinte carbone plus faible que celle des cellules à base de silicium, mais il faut encore passer par cette phase d’agrandissement d’échelle et de production industrielle », résume Michael Grätzel.Du démonstrateur à la création d'une filière industrielle Et c’est toute l’ambition portée par Solar Transparencies, qui table sur la création de sa structure en Nouvelle-Aquitaine pour lancer une production, et trouver de premiers débouchés commerciaux susceptibles d’amorcer le passage à une véritable phase de développement industriel. Parmi ces débouchés, la société, encore en cours de création, cible notamment l’agrivoltaïsme. Elle prévoit par exemple de concevoir très rapidement une serre de 100 m² construire en panneaux photovoltaïques, qui serait associée à la technologie de refroidissement de Pierre Vitel, pour proposer une structure climatisée autonome, destinée par exemple au maraîchage dans les pays chauds. « On travaille aussi sur la culture végétale en mer, la spiruline ou les algues marines, mais aussi les élevages de poisson », complète l’intéressé. Passée début juin devant le comité de sélection d’Unitec, Solar Transparencies se prépare à intégrer le parcours d’accompagnement de la technopole basée à Pessac. « Unitec va nous permettre d’échanger avec les gens qui connaissent bien le tissu régional, pour trouver les meilleurs échanges possibles », indique Pierre Vitel, selon qui la technopole aidera également à « structurer juridiquement et financièrement » le projet. Avec Michael Grätzel, la société planche également sur la conception d’un démonstrateur de bioréacteur dédié à la production de microalgues, dans lequel la lumière pourrait à la fois alimenter la croissance des organismes et produire de l’électricité.A lire aussi, Des algues pour valoriser le CO2 : CarbonWorks sur la voie de l’industrialisation Des applications à forte valeur ajoutée, qui doivent permettre à Solar Transparencies de valider et déployer son procédé industriel, pour parvenir à produire rapidement et en volume des panneaux solaires compétitifs, destinés à des usages plus classiques de couverture, ou d’équipement du bâtiment. Solar Transparencies envisage ainsi son développement en trois phases. D’abord, les démonstrateurs et l’installation du centre de R&D d’ici 18 mois, avec 14 millions d’euros d’investissement. Puis le passage à l’échelle, avec une capacité de production de l’ordre de 250.000 m² de panneaux par an, pour une enveloppe estimée à 46 millions d’euros et 18 mois supplémentaires. Et enfin, la montée en cadence, un an plus tard, avec 55 millions d’investissements, pour 1 million de m² produits par an, avec à la clé la création de plus de 500 emplois directs. Et, peut-être, l’émergence d’une filière régionale du photovoltaïque libérée des contraintes d’approvisionnement en silicium ou en terres rares…

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