Placéco Gironde, le média qui fait rayonner l’écosystème

Votre édition locale

Découvrez toute l’actualité autour de chez vous

Bordeaux Métropole et la Cali ressortent le projet de grand contournement autoroutier

Écosystème
mardi 21 mars 2023

Alain Anziani (Bordeaux Métropole) et Philippe Buisson (Communauté d'agglomération de Libourne). Crédit : DM

Ce mardi matin, par la voix de leurs présidents respectifs, Bordeaux Métropole et la Communauté d’agglomération de Libourne ont rouvert l’épineux dossier du contournement routier de Bordeaux. Ils relancent le débat et appellent l’Etat à réaliser des études mais aussi expliquent pourquoi ils estiment que le statu quo est intenable.

D’emblée, le président de Bordeaux Métropole, Alain Anziani, pose le cadre : « ce combat pour la mobilité, c’est trouver comment résoudre un des plus gros et des plus anciens problèmes du territoire. Des territoires », se reprend-il immédiatement, soulignant ainsi à quel point il estime que la « saturation des trafics sur les accès et la rocade bordelaise » ne concerne pas uniquement le seul territoire de Bordeaux Métropole et impacte directement et lourdement celui de ses voisins. Un constat que son homologue de la Communauté d’agglomération de Libourne, Philippe Buisson, fait également sien : « cette thrombose a pour conséquence d’assécher le territoire », soulignant que « ceux qui sont dans les bouchons, ça n’est pas parce qu’ils sont de mauvais citoyens ou des égoïstes. Ils y sont parce qu’ils n’ont pas le choix ». Et de dénoncer un problème systémique, presque un piège : « prenez toutes les cartes que vous voulez, quand vous arrivez du sud de l’Europe, forcément vous retrouvez sur la rocade qui, outre le trafic local, doit aussi absorber des volumes d’échanges et internationaux ».

Certes le problème n’est pas neuf. Du tout. Déjà au milieu des années 90, le président du Département de la Gironde, Philippe Madrelle, avait lancé l’idée d’un contournement autoroutier de Bordeaux, l’élu socialiste emmenant dans son sillage Alain Juppé, maire de Bordeaux et président de la Communauté urbaine, mais aussi Alain Rousset, président du Conseil régional qui, par pragmatisme, faisait une entorse à son tropisme pour le ferroviaire. Se profilait alors une possible réalisation à l’horizon 2014-2015, jusqu’à que le projet soit plombé par la présentation de 3 hypothèses différentes de tracé - à l’ouest ou à l’est -, fouillis résumé à un « plat de spaghettis » - l’expression fera florès - ouvrant un vaste front d’opposition à un dossier auquel le Grenelle de l’Environnement donna le coup de grâce. Fluctuant quant à ses convictions sur la nécessité d’une telle infrastructure, le maire de Bordeaux Alain Juppé relança l’idée en 2018, à l’époque où la ministre des Transports du gouvernement Edouard Philippe était une certaine Elisabeth Borne. Tentative qui resta lettre morte.

Depuis, « les collectivités ne sont pas restées les deux pieds dans le même sabot » veut rappeler Alain Anziani, évoquant la mise à 2x3 voies de la rocade qui a progressé et se trouve en passe d’être bouclée ou encore l’adoption d’un schéma des mobilités visant à réduire la part modale de la voiture. Le projet de RER métropolitain, « le premier de France », souligne Philippe Buisson, a été lancé et reliera bientôt Libourne, Bordeaux, Pessac et Arcachon, avant d’être déclinés sur d’autres lignes. Mais le contexte parle de lui-même : « Bordeaux est la deuxième ville la plus embouteillée de France, c’est factuel » rappelle l’élu libournais, soutenu par son homologue qui rappelle quelques chiffres : un trafic journalier en hausse de 15%, compris entre 120 et 240.000 véhicules, dont 19.000 poids lourds. Et de souligner que ce constat intervient « dans un momentum de crise sociale et de crise des territoires qui ne sont pas apaisées ».

Sortir de l’impasse

« Il est chimérique de croire que les voitures vont s’évaporer, de miser sur la démobilité. Si on choisit le statu quo, ça ne fera qu’empirer » scande Alain Anziani qui résume : « il faut que les véhicules qui n’ont rien à faire sur la rocade n’y soient pas. Mais aujourd’hui, il n’y a pas d’alternative ». Et le duo d’élus de relancer une nouvelle fois le débat du grand contournement autoroutier « qui n’est ni de confort, ni d’arrière-garde » et d’en appeler à l’Etat compétent en la matière, pour qu’il « mette en place le dialogue, engage et finance les études nécessaires dans le cadre du CPER (ndr : Contrat de Plan Etat-Région) ou via un autre outil peu importe, estime Alain Anziani, pour que les véhicules qui viennent du sud puissent avoir une liaison vers le nord-est ».

« Je représente un collectif de villes moyennes qui sont dans l’hinterland de Bordeaux Métropole, ajoute Philippe Buisson. Nous nous sommes réunis il y a une dizaine de jours et nous aurons dans quelques jours une réunion avec Alain Anziani pour formaliser cette expression ». Et de souligner « qu’il n’y a pas de demande précise, juste la perspective de barreaux qui peuvent se dessiner de manière assez naturelle et viendraient irriguer les territoires par l’Est. Il faut une déviation - comme par superstition, le mot contournement n’est pas spontanément prononcé par les deux élus - qui soit très lâche autour de Bordeaux. L’A65 et l’A89 ne sont pas surbookées, ça serait un moyen de rendre ces investissements plus efficients » plaide-t-il.

Qui dit CPER dit Conseil régional. L’élu libournais veut croire qu’Alain Rousset, malgré son inclinaison naturelle pour la chose ferroviaire et son peu d’appétence au financement d’infrastructures routières, ne fera pas obstacle à la démarche. Pas plus que le contrat de gouvernance qui lie les différentes tendances de la majorité aux manettes de Bordeaux Métropole. « Il y a déjà eu des sujets de divergences sur les questions de mobilités, que nous avons su régler » rappelle en incantation Alain Anziani.

Que penser d’un projet potentiellement très gourmand en foncier à l’heure du ZAN (zéro artificialisation nette) et que d’aucuns qualifient d’aspirateur à véhicules polluants, alors que le GIEC (groupe intergouvernemental d'experts sur le climat) vient de publier son sixième rapport ? « Il faudra négocier le ZAN, qui ne peut pas être le gel, la vitrification des territoires » plaide Philippe Buisson. Lequel ose même une prédiction audacieuse en ultime argument : « on parle d’une réalisation à horizon de 15 ou 20 ans. Je fais le pari que le jour où ces barreaux verront le jour, le transport routier sera un des plus propres ». Reste à savoir par quel bout lire cette prévision.

Sur le même sujet