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Vins : après l’épisode de gel, les professionnels s’organisent

Écosystème
lundi 12 avril 2021

Des vignes après les nuits de gel, début avril - Photo YB

Après l’épisode de gel tardif survenu la semaine dernière, l’un des plus importants de ces dernières années, la filière viticole tente de s’organiser pour soutenir les exploitations touchées. Un point sur la situation avec Stéphane Gabard, président du Syndicat des vins de Bordeaux et Bordeaux Supérieur.

Peut-on déjà dresser un bilan de cet épisode de gel, ou est-ce trop tôt ?
C’est assez difficile car pour l’instant nous n’avons que des témoignages. Même au sein des exploitations, certains dégâts sont difficilement quantifiables notamment sur les cépages les plus tardifs. Comme pour le Cabernet-Sauvignon où les yeux, les bourgeons étaient à peine sortis, il est encore compliqué de savoir ce qui est touché. Pour d’autres comme le Merlot, précoce, il est plus facile de voir ce qui a gelé. Nous avons tout de même déterminé les secteurs les plus touchés. Il y a le sud de la Gironde, avec la zone de l’appellation Graves, Sauterne et Bordeaux. Dans ces zones les dégâts sont bien supérieurs à l’épisode de gel de 2017 et équivalent sûrement à celui de 1991. Les températures sont parfois descendues au-delà de -6°C. Au nord du département quelques secteurs ont été très touchés comme le Blayais. Pour le reste de la Gironde, c’est assez aléatoire. Les zones près de la Garonne ont été protégées par la chaleur du fleuve.

Quelles vont être les conséquences pour les viticulteurs touchés ? Pourront-ils être indemnisés grâce à leur assurance ?
Les situations sont diverses et différentes de 2017, mais nous serons vraisemblablement sur une diminution globale de la récolte de 30%. Certaines exploitations perdront peut-être jusqu’à 50% ou 60% de la récolte... Cela va entrainer des difficultés financières et surtout aggraver une conjoncture déjà très difficile pour la filière.

Ensuite, il faut savoir que l’assurance multirisques climatique n’est pas obligatoire. Nous avons un taux d’assurance relativement bas, aux alentours de 30%. Cela s’explique car c’est un produit relativement mal fait et onéreux : on prend la moyenne des récoltes des cinq dernières années en enlevant la plus haute et la plus faible. Cela crée une moyenne à l’exploitation, et l’assurance rembourse la différence entre cette moyenne et la récolte l’année du sinistre, en enlevant 20% de franchise. L’inconvénient, c’est que depuis 2017 il y a eu plusieurs incidents climatiques à la suite. Certains viticulteurs étaient auparavant assurés, mais ont arrêté car le système proposé n’est pas intéressant économiquement.

Une aide de l'Etat et une refonte de l'assurance ? 

Qu’attendez-vous des pouvoirs publics, pour aider les professionnels concernés ?
Déjà, le gouvernement s’apprête à déclarer l’état de catastrophe naturelle. Mais comme c’est un risque assurable, logiquement il n’y aura ni subvention, prime ou aide pour les viticulteurs n’ayant pas d’assurance. Et puis elle peut pallier le manque de trésorerie, mais pas le manque d’approvisionnement sur les marchés voire la perte de marchés. Nous voudrions retravailler ce système avec l’Etat, pour le rendre plus attractif, créer de l’appétence et faire en sorte qu’il y ait plus d’assurés. 

Aujourd’hui la profession se réunit. Nous allons demander des exonérations des cotisations sociales, salariales et d’exploitants pour les domaines touchés. Des allègements sur les prélèvements, et des reports concernant les prêts bancaires, avec la prise en charge par l’Etat des intérêts. Mais aussi un allongement de la durée de remboursement des prêts garantis par l’Etat (PGE) : nous l’avions demandé avant le gel mais je pense que ce sera de plus en plus prégnant. Et puis nous allons peut-être demander ce qui avait été mis en place en 2017, c’est-à-dire une exonération de la taxe foncière sur le bâti. Nous avons presque du mal à faire ces propositions car la situation actuelle est inédite. Il y a une crise de production, une crise climatique, une crise économique, une crise sanitaire… Nous avons très peur qu’il y ait un grand désarroi chez les professionnels.

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