Marilyne Minault : de Hellodoc à la Grande Poste, une vie de famille - Premium

Durant toute sa vie, ou plutôt ses vies, Marilyne Minault est restée attachée à un mot : la simplicité. « Je n’ai pas fait beaucoup d’études », explique celle qui aujourd’hui est la patronne de la Grande Poste bordelaise. Electromécanicienne de formation, elle s’est très rapidement orientée vers le dessin industriel. « J’adorais ça, j’ai toujours préféré le dessin au terrain. » Médocaine pure souche elle monte à la capitale pour travailler, enchaîne les emplois, notamment pour Renault ou l’aérospatial. « J’ai fait pas mal de petites choses », se remémore-t-elle. Et puis, dans les années 1980, elle rencontre celui qui deviendra son mari, Philippe. Un premier enfant naît de cette union, avant que Marilyne Minault n’entame comme son époux une formation d’analyste programmeur. Nous sommes en 1985, et la Médocaine quitte Paris pour s’installer à Bordeaux. Le succès Hellodoc « J’ai travaillé pour des stations thermales, pour des entreprises classiques… En 1987 nous avons eu un médecin de famille qui nous a demandé un logiciel pour l’aider, et nous lui avons fait. » Démarre ainsi l’aventure Hellodoc, logiciel leader quelques années plus tard dans la gestion des cabinets médicaux. « En 1991 nous l’avons commercialisé, puis en 1995 nous avons créé la société Imagine Editions, égrène Marilyne Minault. Nous avions 800 clients, cinq garçons, et nous étions deux Philippe et moi, pour tout gérer. Mais je n’ai pas écrit une seule ligne du programme, tient-elle à préciser. J’ai fait toute la gestion, et j’ai appris sur le tas. » Les premiers employés arrivent au fur et à mesure dans les locaux de l’entreprise basée à Soulac-sur-Mer, et l’ascension continue. En 2000, Imagine Editions compte une petite quinzaine de salariés pour 3.000 clients. « En 2009 mon mari est décédé et cinq ans plus tard j’ai vendu au groupe allemand ComputGroup, résume sobrement l’ancienne dirigeante. Nous étions alors leader de la feuille de soin électronique sur le marché français, avec 27.000 médecins comme clients. » 130 employés travaillaient pour l'entreprise, pour un chiffre d’affaires de 12 millions d’euros par an. « J’étais fatiguée, épuisée, se remémore Marilyne Minault. Je n’avais plus que mon dernier fils au lycée, j’ai hésité car cela faisait un moment que je préparais un dossier pour entrer en bourse… Mais j’ai dit "hop, je vends et je fais autre chose." » Un amour pour la culture et l’histoire Curieuse par nature, c’est sans aucun doute ce trait de caractère qui a poussé la future propriétaire de la Grande Poste à explorer un tout autre secteur d’activité : la culture. « Depuis longtemps je rêvais de tenir un théâtre, je peins beaucoup, l’un de mes enfants est comédien… J’ai un côté artiste. » La mère de famille et entrepreneuse cherche alors à acheter un lieu qui sort de l’ordinaire, d’abord sur la région parisienne, avant de se repositionner sur le port de la Lune. C’est là que Marilyne Minault tombe, par hasard, sur la Grande Poste. « Une personne est venue me voir en me disant qu’un lieu pourrait m’intéresser, mais qu’il n’est pas à vendre. A l’époque c’était une société de communication qui occupait les locaux. » Après des négociations, les deux partis arrivent à une entente. Nous sommes en 2015, et l’ancienne électromécanicienne acquiert ce qui est aujourd’hui un espace connu et reconnu à Bordeaux. « Cette rue du Palais-Gallien était importante pour moi car c’est là que mes grands-parents habitaient. En plus, le bâtiment était un ancien monastère, donc chargé d’histoire. C’est quelque chose de très important pour moi. »Décembre 2016 : une inauguration réussie Après un an et presque 3 millions d’euros de travaux investis, la Grande Poste prend enfin vie. Le lieu se veut ouvert à tous, à toutes les cultures et surtout éphémère, mouvant. Le hall, spacieux, sert tour à tour de salle de spectacle, de restaurant ou d’espace privatisé pour des sociétés et événements. A l’étage, les échoppes, sortes d’alcôves accueillantes, ont vocation à héberger expositions et boutiques, de manière ponctuelle. « J’aurais aimé que le lieu soit plus éphémère que ça, confie la propriétaire. Mais je pense que les gens ne sont pas encore habitués à cette idée, c’est trop avant-gardiste. » En décembre 2016, l’inauguration a lieu. « Ça a plu, on sentait que le concept attirait les gens. Quand vous lancez quelque chose à Bordeaux on dit que si ça réussit, c’est que vous pouvez le répliquer partout. Je ne sais pas si c’est vrai mais notre pari a été gagné. » Avant la crise sanitaire et le premier confinement, la Grande Poste enregistrait ainsi une très belle activité. « Nous sommes en standby » Aujourd’hui 16 salariés travaillent dans la structure. La Grande Poste garde portes closes, car à défaut d’entrer dans une catégorie précise d’établissement, elle coche toutes les cases des lieux fermés administrativement. Marilyne Minault ne se projette pas, et vit la situation au jour le jour. « Dès que les musées rouvriront, la Grande Poste en fera de même. » Si le lieu n’est pas menacé, il s’agit de tenir, comme tout le monde. « On ouvre la partie restauration le midi, en proposant de la vente à emporter ou en livraison. Une seule échoppe est occupée, alors qu’avant elles l’étaient toutes. » La patronne des lieux, elle, poursuit sa vie « comme n’importe quelle vie », simplement. « Je le suis toujours restée, simple. Les gens ont toujours l’impression qu’ils ont réussi parce qu’ils ont un conjoint, quelque chose… Finalement ils ont quoi, un peu d’argent ? Et alors, ont-ils une meilleure vie, sont-ils plus heureux ? Je n’ai pas besoin de montrer, je suis très bien comme je suis. »

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