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Du Pays basque aux grandes écoles : un "effet boomerang" au profit de l'emploi local

Engagement
vendredi 23 juin 2023

Chaque année, l'association réunit les lauréats de sa bourse, les familles et les entreprises mécènes - crédit Du Pays basque aux grandes écoles

Depuis dix ans, l’association « Du Pays basque aux grandes écoles » travaille à faire connaître classes préparatoires et grandes écoles aux lycéens du territoire, mais aussi à favoriser le retour au pays des impétrants pour soutenir le tissu économique local. Les attentes ont-elles changé et comment les entreprises peuvent-elles participer à cette dynamique ? Les explications de Margaux Le Cœur, co-présidente de cette association qui, depuis 2013, a essaimé sur de nombreux territoires ruraux français.

Votre association aide les lycéens basques à accéder aux classes préparatoires ou aux grandes écoles, mais aussi à s'implanter au pays après l'obtention de leur diplôme. En dix ans, le besoin a-t-il évolué ?
Dans sa globalité, le besoin est toujours le même, on le voit avec le lancement progressif des associations sur tout le territoire. Chaque zone rurale rencontre ces problématiques d’auto-censure ou de manque d’information sur les études supérieures, mais notre action a un impact, on est désormais plus dans l’accompagnement que dans la simple découverte des cursus. Les professeurs de lycée connaissent maintenant nos interventions. Ils deviennent un relais, qui aide à surmonter les appréhensions.

Connaître les études supérieures est une chose, partir étudier à Paris ou dans une grande métropole en est une autre, comment l’association peut-elle contribuer à faciliter l’accès à ces études ?
Notre propre expérience est un premier levier. Nous expliquons aux lycéens comment nous avons fait pour nous installer, trouver un logement, et comment nous sommes ensuite revenus pour participer à la vie locale. Une fois qu’ils ont intégré une classe prépa ou une grande école, nous promouvons l’intégration au réseau. J’ai par exemple fait deux ans de prépa en droit et en économie à Paris, et j’ai ensuite rejoint l’association qui m’avait aidée en terminale, ça m’a apporté une vraie bouffée d’air frais, avec des valeurs et une culture partagées, et mon expérience à Paris n’aurait pas été la même sans ce lien. On essaie donc de promouvoir cette idée que l’on peut partir sans pour autant être seul, c’est vraiment un facteur de réassurance.

Une fois les études accomplies, comment favoriser le retour des talents au Pays basque ?
Les biais sont un peu les mêmes que pour la question de l’égalité des chances. Il y a souvent un manque d’information sur les opportunités qu’offrent les territoires. Les jeunes qui sortent de grandes écoles ne savent souvent pas vraiment ce qui existe en dehors des grandes métropoles. Et il y a aussi une forme d’auto-censure, comme si je ne pouvais pas rentrer parce que je ne corresponds plus à mon territoire d’origine. Nous luttons contre ça de façon informelle, en favorisant par exemple les rencontres entre entrepreneurs, lycéens et étudiants, avec cette idée de créer du lien et faire circuler un flux d’informations entre les entreprises et les étudiants issus du territoire. Depuis six ans, nous organisons par exemple des visites d’entreprise à l’occasion des vacances de Noël, ça fonctionne bien. Dans le Lot-et-Garonne, où l’association s’est lancée l’an dernier, ils viennent de faire une visite du même type en partenariat avec la CCI, et ils y ont aussi convié des lycéens mentorés. L’idée est de faire naître une graine, qui pourra germer au fil des études et conduire à un retour, soit en sortie de cursus, soit après quelques années à faire ses premières armes dans une entreprise située ailleurs.

Au Pays basque, nous organisons également une université d’été, qui se tiendra cette année plutôt à l’automne puisqu’on a fait un événement au printemps. On y accueille une dizaine d’entrepreneurs sur des thèmes variés, les sociétés qui exportent, le logement l’économie solidaire… L’an dernier, nous y avons fait intervenir cinq membres de l’association, qui sont partis faire leurs études ailleurs et sont revenus, soit comme salariés, soit comme entrepreneurs. Leur retour d’expérience était super.

D’autres idées pour aller plus loin ?
Oui, nous avons encore plein d’idées, inspirées de ce qu’on a développé au Pays basque, mais aussi de ce que font d’autres territoires. En Creuse, le président a par exemple proposé la mise en place d’une sorte de carte interactive permettant d’afficher les emplois qualifiés proposés par nos partenaires. Nous allons essayer de développer ça au niveau national, pour que ça profite à toutes les associations. Mais le plus important restera toujours l’information et les liens qu’on peut créer.

Le sujet concerne au premier chef les entreprises, particulièrement celles qui recrutent sur des métiers en tension. Que vous font-elles remonter ?
Notre action suscite des retours très favorables, notamment dans des secteurs comme l’industrie, où l’on apprécie que la promotion ne se limite pas aux métiers du tourisme. Après, on entend effectivement qu’il est difficile de recruter sur certains profils, ou de trouver des gens prêts à abandonner la vie et le salaire d’une grande métropole. Le logement ressorti sans surprise comme une problématique majeure, même si on voit que de plus en plus d’entreprises commencent à chercher des solutions, comme Agour qui créé des logements pour ses salariés, ou d’autres qui choisissent de se développer en direction du Pays basque intérieur pour faciliter l’accès au logement. Il y a tout un mouvement qui cherche à rendre les emplois plus attractifs sur le territoire, et nous jouons un peu le rôle de point de liaison entre les entrepreneurs et les jeunes, c’est vraiment ce que nous voulons développer.

Au-delà du soutien financier, comment les entreprises peuvent-elles participer à votre action ?
Participer à nos événements nous aide à matérialiser le fait qu’il y a des opportunités sur le territoire. Surtout quand des chefs d’entreprise racontent leur ancrage local ou leurs enjeux de développement durable, ce sont des sujets qui parlent aux jeunes. Notre dispositif de bourse est également un levier : elles aident les jeunes à partir se former, et renforcent leur attachement au territoire. Les entreprises peuvent également aider en facilitant la recherche de stages ou d’alternances. C’est un échange de bons procédés, lancer le boomerang pour qu’il revienne de manière concrète sur le territoire !

Du Pays basque aux grandes écoles
Fondée en 2013
300 adhérents
354.000 euros de bourses distribués en 2022 à 59 lauréats