ZAN : « On ne peut plus attendre », pour la maire de Saint-Loubès - Premium

Emmanuelle Favre est maire de Saint-Loubès depuis 2020. Elle n’a pas attendu son élection pour soutenir la loi ZAN (zéro artificialisation nette). Celle-ci s’intègre dans la politique de cette ville à la campagne dont la population a presque triplé depuis les années 70, pour atteindre aujourd’hui 10.000 habitants.Que pensez-vous de la loi ZAN ?Notre groupe politique est convaincu qu'on a trop artificialisé une ville comme Saint-Loubès. Quand on regarde plus largement, au niveau de la France qui perd un département tous les 10 ans en matière d'artificialisation, on est convaincu que cette loi est arrivée au bon moment. On ne peut plus attendre pour dire aux communes d'arrêter d'artificialiser et de densifier un peu.Quelles sont les ambitions de votre nouveau PLU ?Il est notre responsabilité sur le long terme de dire stop à l’urbanisation. On sait que l'eau va monter, donc sur la partie la plus inondable, il n'en faut pas davantage. Autant les élus d'il y a 30 ans peuvent dire, on ne savait pas. Nous, on sait et on ne peut pas faire sans savoir. Par exemple, une petite résidence existe tout près de la voie ferrée parce que c'était une dent creuse. On ne se questionne pas juste pour la livraison de 2024. On se questionne pour 2044 et pour 2054, comment ces gens-là vont vivre là. Cette loi nous facilite aussi la tâche parce que finalement, elle a coupé toute ambition sur cette zone. Ça nous a même arrangé d’une certaine manière.« On ne se fait pas que des amis »Ce PLU révisé a-t-il impacté des projets en cours ?Des zones étaient à urbaniser et ont rebasculé en zones agricoles ou naturelles. Effectivement, on ne se fait pas que des amis en faisant ça. Pour nous, il s’agit de l’intérêt général. Nous avons travaillé de manière très collaborative. Nous avons contacté plus de 120 propriétaires dont les terrains sont impactés par une orientation d'aménagement prioritaire. On n'a globalement pas eu de frein majeur. On a préservé une grande coulée verte en centre-ville. Elle était déjà partiellement préservée par le PLU initial, mais toute la partie sud devait être artificialisée. En début de mandat, tout le monde voulait que sa terre agricole devienne constructible. Maintenant, les gens disent : "ça serait bien qu'il y ait un agriculteur dessus". On veut manger ce qui pousse à Saint-Loubès, travailler l'autonomie alimentaire et la résilience de la ville avec une production locale. Ça change forcément les projets, mais ça modifie aussi la vision de la ville.« Pas sûre que sans la loi, on serait allé plus vite »Appliquer la loi ZA augmente-t-il les délais ?Pas forcément, parce loi ou pas, on prend le temps de faire de la concertation. On n'a eu aucun recours sur les dernières résidences parce qu'à chaque projet, on réunit les riverains, on en discute et on fait des aménagements avant qu'ils déposent le permis de construire. Cette loi permet de prendre le temps, je ne suis pas sûre que s’il n’y avait pas eu la loi, on serait allé plus vite.Est-ce que le ZAN coûte cher ?Je ne dirais pas qu'il coûte cher, mais il rapporte moins. Et c'est là, la fronde des élus de manière générale. C'est uniquement là-dessus. Je pense que s’il n'y avait pas cet impact défavorable de la fiscalité, aucun maire ne se serait dit "ça serait super que ma commune n'ait plus du tout de terre agricole et naturelle". Dans ce contexte, comment je crée une école, comment je rénove, comment je construis un gymnase, un skatepark ? C’est un effet ciseau. Les revenus globalement sont plutôt en baisse notamment le Fonds vert. Et à côté de ça, l'énergie, les points d'indice des fonctionnaires, les fournisseurs, les denrées pour la cuisine, l’essence des véhicules… Tout a augmenté.Un AMI pour un projet photovoltaïque Est-ce qu'il faudrait un soutien de l’Etat plus important ?Il faudrait quelque chose qui se passe à ce niveau-là. Le Fonds vert était le moyen de rénover nos bâtiments pour qu'ils soient plus économes. Je ne peux plus faire venir l'entreprise qui m'aurait financé via la taxe d’aménagement, ma rénovation, et on ne me donne même plus d'aide. Il faut soutenir la rénovation des bâtiments jusqu'à ce qu'ils soient tous rénovés. Si on a une aide pour rénover pendant même pas un demi-mandat, c’est complètement aberrant. Les communes ne pourront pas rénover. Il y a un manque de cohérence globale sur les ambitions et les moyens qu'on se donne. Comme nous sommes des gens optimistes et inventifs, nous allons lancer un appel à manifestation d'intérêt auprès d'investisseurs pour équiper en photovoltaïque nos toits et nos parkings en échange d’un loyer. Le dossier est en train d'être finalisé par les services et la consultation sera lancée à la fin de l’année.Vous vous êtes exprimée contre l’assouplissement de la loi souhaité par le Premier ministre. Qu’est-ce que cette mesure va engendrer ? Quelles seraient d’après vous les solutions à apporter ?Je pense qu'il faut absolument travailler les ressources des communes et on lèvera le quasi seul frein contre cette loi. Les nouvelles de Bercy font un peu peur. Tout le monde se demande comment ça va se passer sur le budget 2025. Je pense vraiment que la seule porte de sortie, c'est de travailler avec les communes sur leurs ressources. Mais à tous les échelons, il va falloir faire des économies.

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