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Gérard Gomez (CMA) : « On commence à avoir des signaux faibles qui nous alertent »

Écosystème
mercredi 24 janvier 2024

Gérard Gomez, président de la CMA Nouvelle-Aquitaine. Crédits : Alban Petit pour la CMA NA

Durant ses traditionnels vœux de début d’année, le président de la Chambre de Métiers et de l’Artisanat de Nouvelle-Aquitaine a présenté un bilan de l’année 2023 pour la région, mais aussi une enquête de conjoncture. Des données qui révèlent des difficultés et des inquiétudes pour les artisans, concernés notamment par la baisse du pouvoir d’achat. Décryptage.

Ce sont des vœux « d’optimisme et d’énergie », qu’a présenté ce 24 janvier Gérard Gomez, président de la Chambre de Métiers et de l’Artisanat de Nouvelle-Aquitaine. « On en aura besoin, pour accompagner les artisans dans la période que l’on s’apprête à traverser », a-t-il poursuivi. Car si l’élu, lui-même taxi de profession, n’a pas de boule de cristal, il s’appuie sur un bilan détaillé de l’année achevée. Premier constat : en 2023, le nombre de défaillances d’entreprises artisanales a « légèrement dépassé » les chiffres de 2019. « On a eu une période de perfusion, notamment avec le "quoi qu’il en coûte". Puis un rebond en 2021 et en 2022, avec beaucoup de créations d’entreprises. Aujourd’hui, on commence à voir des signaux faibles qui nous alertent, nous sommes toujours vigilants pour pouvoir accompagner les entreprises. »

Dans les faits, près de 15.000 entreprises artisanales ont vu le jour en 2023 en Nouvelle-Aquitaine. Dont la majorité (45%) dans le domaine des services… Et sous la forme de micro-entreprises (70%). Au global, la région compte plus de 17.000 entreprises artisanales, et près de 8 structures sur 10 n’emploient aucun salarié - une tendance « relativement stable ». 38% des entreprises sont positionnées sur les services, et 37% sont dans le bâtiment, « qui a été durant longtemps le premier secteur », a commenté Gérard Gomez.

Un guichet unique problématique

Au-delà de ce bilan conjoncturel, le président de la CMA a pointé du doigt un épineux dossier : celui de l’immatriculation d’entreprises. Depuis le 1er janvier 2023, un guichet unique des formalités des entreprises est déployé, géré par l’INPI, et remplace l’ancien répertoire des métiers qui était tenu par la CMA. Un système « pour simplifier la vie des entreprises, mais qui n’a fait qu’apporter de la complexité au parcours du combattant de la création d’entreprise », a fustigé l’élu. Qui précise qu’un audit de la Cour des comptes a eu lieu sur le sujet, et que le rapport, remis en décembre dernier, est sans appel : « Les conséquences d’une réforme insuffisamment préparée, mal conduite, pourraient se faire encore sentir pendant plusieurs années, sans avoir apporté aux entreprises la simplification attendue », peut-on ainsi lire.

Au-delà du système, qui ne permettrait pas aux CMA d’identifier clairement l’ensemble de leurs artisans, Gérard Gomez a insisté sur le principal point de blocage : la phase d’inscription. « Les artisans qui s’inscrivent sur la plateforme ne s'identifient pas toujours comme entreprises artisanales car dans la conception de l’outil, il n’y a pas de case spécifique à cocher, ce qui fait qu’il y a une déperdition dans nos chiffres. » Il a ainsi pointé du doigt le faible nombre d’entreprises artisanales en phase de création (moins d’un an), qui serait d’à peine 1% en 2023. « Cela ne nous semble pas correspondre à la réalité. »

L'alimentaire, secteur sous pression

Ce qu’était venue présenter la chambre consulaire, c’est aussi et surtout une enquête, réalisée auprès d’un panel d’artisans néoaquitains, pour prendre le pouls de leur activité. Et parmi les enseignements tirés, 54% des répondants ont déclaré avoir « confiance dans l’avenir », un niveau comparable à l’an passé. Mais là où le bât blesse, c’est sur la fragilité financière de ces sociétés : 63% seraient fragilisées, dont 34% « en situation critique ». Une réalité particulièrement ancrée pour les entreprises artisanales de l’alimentaire : la moitié d’entre elles se déclarant en situation critique. « C’est le secteur le plus fragilisé, a commenté Gérard Gomez. Ils ont été très impactés par la hausse des coûts en 2022, hausse qui perdure aujourd’hui. Ils subissent également une baisse de la consommation, due à l’inflation et au pouvoir d’achat. » Cette baisse du pouvoir d’achat apparaît d’ailleurs, quel que soit le secteur d’activité des répondants, comme la plus grande difficulté pour les interrogés. Quant aux possibles investissements dans la transition écologique et énergétique, n’en parlons pas : 73% des répondants déclarent n’avoir aucun projet. « Soit car ils ont déjà intégré cela dans leur activité, soit, et je pense que c’est plutôt la vérité, ils règlent un problème après l’autre, a noté Gérard Gomez. Cela viendra certainement, mais à ce stade, ce n’est pas une priorité pour eux. »

Gérard Gomez et les différentes Chambres de Métiers et de l’Artisanat de Nouvelle-Aquitaine restent ainsi prudents pour l’année 2024. L’élu met en avant le sujet de l’énergie, « toujours sensible » notamment pour les métiers de l’alimentaire, mais aussi la problématique de l’eau. « Elle sera à appréhender rapidement, on s’y prépare déjà avec des conseillers sur le sujet des risques hydriques. »

Les CFA font le plein > Au 31 décembre dernier, les 15 CFA de Nouvelle-Aquitaine accueillaient un peu moins de 13.000 apprenants. Un chiffre stable, car les établissements affichent complet. « C’est une observation que l’on fait aussi au niveau national. Cela signifie que malgré tout, les artisans continuent de croire en leur métier, car quand ils s’engagent pour former un apprenti ce n’est pas du “one shot”, c’est un investissement sur le long terme », s’est réjoui le président de la CMA régionale. Qui précise ne pas souhaiter accueillir davantage d’apprenants en « poussant les murs » des CFA, pour privilégier la qualité à la quantité.

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