Tercis-les-Bains : « c'est une innovation de rupture que nous créons ici » - Premium

« C'est une innovation de rupture que nous créons ici », affirme Yahya El Mir, fondateur et président de ZiwigLab. Cet entrepreneur et chercheur lyonnais a fondé une startup spécialisée dans l'analyse de l'ARN salivaire et l'intelligence artificielle. Il y a quelques mois, il s'est associé avec Hikmat Chahine, médecin biologiste et maire de Tercis-les-Bains. Ensemble, ils ont décidé d'implanter leur laboratoire ici, un laboratoire qui a pour vocation de faire progresser la lutte contre l'endométriose en accélérant notamment son dépistage. Comment ? En permettant aux femmes d'avoir un diagnostic en quelques jours seulement, grâce à un test salivaire. « Chaque semaine, ce sont entre 4.500 et 9.000 tests qui pourraient être effectués. » Des tests qui arrivent en provenance de toute l'Europe, mais aussi au-delà, dans cette infrastructure dont l'investissement financier global dépasse les 12 millions d'euros. Mais concrètement comment cela fonctionne t-il ? Ce test est-il révolutionnaire ? Explications.Quelle est la particularité de ce laboratoire ? Ce laboratoire est spécialisé dans les ARN salivaires. Ce sont des molécules particulières qu'on peut trouver dans les fluides humains, comme le sang ou la salive. Ici, nous nous intéressons aux ARN salivaires parce qu'ils ont un côté très pratique. Il n'y a rien de plus simple que de faire un prélèvement salivaire. C'est rapide et non invasif. Le premier produit que nous concevons est celui du Ziwig Endotest, qui sert au dépistage de l'endométriose. Nous travaillons également sur d'autres tests et d'autres pathologies, comme le cancer de l'ovaire par exemple. Et c'est ce même procédé qui sera utilisé demain pour d'autres pathologies encore, et notamment la maladie de Charcot ou d'autres maladies liées à la santé de la femme. Les usages seront assez larges et c'est ce qui nous intéresse. Concrètement, comment cela fonctionne t-il ? Aujourd'hui, nous avons des machines qui nous permettent de faire le traitement de la salive. Première étape : extraction des ARN, les molécules que j'évoquais précédemment. Nous allons ensuite les mélanger avec un certain nombre de réactifs pour les amplifier et révéler. Puis la dernière étape, c'est celle du séquençage, qui transforme l'information biologique en une information numérique. C'est un procédé qui prend une dizaine de jours, entre le moment où la patiente effectue son prélèvement et celui où le médecin reçoit le résultat. Si on compare ça au délai actuel, qui est généralement entre 7 et 12 ans, nous sommes sur ce qu'on appelle une innovation de rupture. On utilise ce terme quand on peut faire dix fois mieux. Là, nous sommes dix fois mieux en temps mais aussi en performance. Ce que nous proposons est plus performant que tous les outils de diagnostic existants, y compris la chirurgie. De plus, c'est un prélèvement qui peut être fait avec un professionnel de santé ou pas. La patiente peut aussi l'effectuer chez elle. Comment expliquez-vous ce délai de 7 à 12 ans pour la diagnostic ?Il y a, face à cette maladie, ce qu'on appelle l'errance médicale. C'est une maladie qui peut se traduire par divers symptômes, pas toujours très francs et parfois les patientes vont d'un praticien à l'autre, sans que cette maladie soit forcément évoquée. Aujourd'hui, de plus en plus de professionnels de santé sont formés à la reconnaissance de cette maladie, mais ce n'était pas le cas il y a encore quelques années. Pensez-vous que ce procédé puisse permettre de mieux faire connaître et reconnaître la maladie qu'est l'endométriose ?Le fait qu'on puisse récupérer autant d'informations grâce à ces tests permet de répondre à la question du diagnostic ; mais aussi de répondre à des questions d'adéquation de traitement, du profil biologique de la pathologie de la patiente et donc d'avoir un parcours individualisé pour chaque femme. Aujourd'hui, quand on adresse un traitement, des fois il fonctionne et des fois non. Parfois les effets secondaires sont compliqués. De ce fait, je pense qu'en ayant un diagnostic plus fin, nous serons capables d'adapter plus facilement le traitement ; sachant que ce test est plus fiable que tous les outils diagnostics existants. Ce procédé peut sembler simple en l'apparence. Pourquoi n'a-t-il pas été utilisé avant ? Déjà parce qu'il a fallu du temps aux chercheurs pour comprendre l'importance de cette découverte fondamentale que sont les ARN. Il faut savoir que la première fois où il a été mis en œuvre, ça été à l'occasion du covid, parce qu'à ce moment-là, aucune des solutions existantes ne permettait de faire un vaccin sur un temps court. Un délai normal pour faire un vaccin avec les technologies officielles c'est trois ans et là, nos chercheurs devaient aller plus vite. Par ailleurs, les technologies pour le faire étant prêtes, ils ont pu faire un vaccin en trois mois au lieu de trois ans. Depuis cette période, il y a des applications dans différents domaines, en cardiologie ou en cancérologie, pour le diagnostic mais aussi pour le traitement, avec une explosion des usages basés sur les ARN. Pourquoi les Landes ? C'est avant tout une rencontre et une histoire d'hommes. Il y a ma rencontre et mon partenariat avec le docteur Hikmat Chahine. Et puis, dans cette commune qu'est Tercis, il y a des gens extrêmement talentueux et une équipe que nous avons réussi à mettre en place. Autre raison : notre choix a été motivé par la région elle-même. Nous avons besoin d'avoir des autorisations pour ce genre d'innovation, un support des autorités sanitaires compétentes. Des conditions que nous avons ici puisque l'ARS de la région Nouvelle-Aquitaine a beaucoup travaillé pour nous faciliter les choses, afin qu'on puisse avoir les autorisations nécessaires rapidement. C'est ce qui a permis de construire ce laboratoire en un temps record. Tous les acteurs se sont fédérés au niveau régional pour avoir cette technologie de pointe sur ce territoire. Il y a ici un besoin de compétitivité et notre projet va dans le sens de cette démarche. Un laboratoire dont l'investissement financier global dépasse les 12 millions d'euros et qui devrait monter en compétences dans les années à venir. L'objectif, d'ici 2025 est de développer de nouveaux tests liés aux maladies gynécologiques.

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