Coliving : Colonies surfe sur le boom de l’habitat partagé à Bordeaux - Premium
Le salon de la résidence Rosa, ouverte fin avril à Bordeaux - photo Colonies
Un mois après son ouverture, la première résidence de coliving opérée par Colonies à Bordeaux affiche déjà complet. Un succès rapide, qui illustre l’engouement des jeunes actifs pour les nouvelles mécaniques d’habitat partagé associant colocation et services dédiés. Il suscite dans le même temps l’appétit des investisseurs, qui voient désormais dans le coliving une nouvelle classe d’actifs à haut rendement.
Installée rue de Turenne, à deux pas du Jardin Public, la résidence Rosa a des accents d’auberge espagnole. De bon matin, on y croise une résidente en pyjama qui prépare son petit déjeuner pendant que dans le salon voisin, deux trentenaires attaquent leur journée de télétravail, casque vissé sur les oreilles, en anglais et en portugais. Sur la terrasse extérieure, les bouteilles vides en attente d’évacuation témoignent d’un apéro qui a certainement duré au-delà du couvre-feu encore en vigueur. « La résidence accueille principalement des jeunes actifs de toute nationalité, avec des métiers très divers. On a par exemple un chef cuisinier, un architecte, une infirmière, et quelqu’un qui travaille dans le vin. Chaque nouveau locataire passe un entretien qui permet de vérifier qu’il va s’intégrer avec les occupants déjà installés », résument Isabel et Pierre, les residence managers qui supervisent les maisons déjà ouvertes par Colonies en région parisienne, à Marseille, Lille et maintenant Bordeaux.
Venu des Etats-Unis et en plein boom en France depuis quelques années, le coliving ambitionne de répondre à la problématique d’étudiants ou de jeunes actifs qui peinent à se loger seuls dans les grandes métropoles et souhaitent profiter des joies de la colocation sans avoir à en supporter les défauts. La résidence Colonies de Bordeaux prend la forme d’une belle maison de ville d’environ 300 m², dont l’intérieur a été aménagé de façon à installer douze logements indépendants (six chambres et six studios dotés d’une kitchenette), à côté d’espaces de vie communs, à commencer par un salon cuisine d’environ 50 m², une terrasse extérieure, ainsi qu’une buanderie. La location donne accès au logement privatif et aux espaces communs. Elle couvre également des services tels que l’accès à Internet, l’assurance, les charges courantes, l’entretien des parties communes une fois par semaine. Le montant du loyer intègre enfin l’abondement d’une cagnotte grâce à laquelle les locataires peuvent acheter eux-mêmes les fournitures courantes de type huile d’olive ou produits d’entretien.
L’ensemble est supervisé à distance par les residence managers, qui se chargent d’aider les locataires sur les aspects administratifs (obtention des APL) ou déclenchent une intervention en cas d’incident dans la maison. « Nous sommes là pour aider dès qu’il y a un point de friction, mais on rappelle aussi aux locataires qu’ils sont responsables de leur logement. C’est une colocation, pas un hôtel », sourient Isabel et Pierre. Côté prix, il faut compter 660 euros par mois pour une chambre de 9 m² avec salle de bains partagée, 700 euros pour une chambre avec salle de bain privative, et 760 euros pour un studio de 11 m² intégrant une kitchenette. Colonies promet un accès rapide, avec la possibilité de boucler une demande de location en deux jours, avec un dossier limité à une pièce d’identité, une preuve de revenus et un garant si nécessaire. « Nous n’avons pas d’impayés, et la proximité avec nos locataires fait que le recouvrement en cas de retard est très efficace. Quand les gens se sentent bien, ils paient naturellement leur loyer », explique Amaury Courbon, qui a cofondé Colonies en 2015 avec deux associés, après un début de carrière dans le fonds Jaina Capital de Marc Simoncini, et compte bien ouvrir d’autres résidences à Bordeaux.
Un modèle d'opérateur, décliné à grande échelle
« Nous avons d’autres résidences à l’étude à Bordeaux, on étudie des projets de toute taille, avec également des projets de développement dans des zones en construction », indique-t-il. A la différence de certaines foncières ou grands groupes du BTP, qui créent leur marque pour valoriser leurs propres actifs - à l’image de Vinci avec Bikube, Colonies se positionne comme un opérateur. « Notre métier, c’est de créer des expériences, en partant du besoin exprimé par les jeunes actifs, qui veulent plus de flexibilité dans leur accès au logement et n’ont pas forcément envie de vivre seuls », détaille Amaury Courbon.
Colonies n’est de ce fait jamais propriétaire des murs : la startup s’adosse à un investisseur, pour le compte duquel elle assure l’aménagement intérieur des lieux, puis la mise en service et la gestion des locataires. LBO France a par exemple engagé début 2020 150 millions d’euros via son fonds immobilier pour acquérir des surfaces qui seront opérées par Colonies. « Nous travaillons également avec des gestionnaires d’actifs comme Primonial, ainsi qu’avec des investisseurs privés, qui cherchent à restructurer un bien », ajoute le cofondateur, convaincu que le coliving est déjà devenu une classe d’actifs à part entière, avec une rentabilité meilleure que celle de la location traditionnelle. « D’un côté, on a une demande structurelle, encore renforcée par le Covid. De l’autre, on a des investisseurs qui peuvent miser sur un produit innovant, géré par un preneur dont la qualité de signature est bonne », résume Amaury Courbon. Colonies, qui compte aujourd’hui 70 collaborateurs, a levé 42 millions d’euros en trois tours depuis sa création pour financer son développement et assurer cette qualité de signature. La société se rémunère à la fois sur la prestation de restructuration et via une marge prélevée sur les loyers.
Si son offre vise aujourd’hui en priorité les étudiants et les jeunes actifs, Coliving ambitionne d’élargir son modèle vers de nouvelles typologies de bâtiments, sans forcément cibler en priorité le marché des résidences senior avec services, déjà bien balisé. « Notre approche basée sur l’étude du besoin client peut être répliquée sur tous les segments de marché. Ça a du sens d’intégrer des services et des espaces communs dans la conception d’un ensemble dédié aux familles », illustre l’entrepreneur.
Bordeaux compte déjà une bonne dizaine de résidences de coliving, montée soit par des acteurs nationaux comme Myroom, soit par des sociétés implantées localement, à l’image de Moncoliving, qui dispose de trois maisons à Bordeaux (Saint-Augustin), Talence et Pessac, ou des résidences Donna montées par le groupe Harvey. La formule est également testée par Poste Immo avec Startway à Arcachon.
