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« Un ralentissement d’activité confirmé mais d’ampleur modéré » en Nouvelle-Aquitaine selon la Banque de France

Écosystème
mardi 19 septembre 2023

Les mises en chantier de logement sont au plus bas, les stocks se vident mais la situation n'est pas tenable à long terme, estime JF Clédel. Photo d'illustration : Pexels

La Banque de France Nouvelle-Aquitaine ainsi que la Chambre régionale de commerce et d’industrie livraient ce matin les résultats de leurs enquêtes respectives sur les perspectives de l’économie en Nouvelle-Aquitaine. D’où il ressort que cette dernière résiste plutôt bien aux difficultés induites par l’augmentation des taux d’intérêt, la baisse de la consommation des ménages et les problématiques de recrutement.

Président de la Chambre de commerce et d’industrie de Nouvelle-Aquitaine, Jean-François Clédel souligne d’emblée un point de méthodologie. L’enquête dont il s’apprête à livrer les résultats a été menée entre le 3 et le 19 juillet derniers auprès de 4.000 entreprises, dont une très grande majorité ont moins de 10 salariés. Et d’avertir : l’opinion de chefs d’entreprise est comptabilisée sans être pondéré par la taille de leur entreprise, livrant ainsi un indice brut sur le moral des décideurs régionaux. Globalement, le solde d’opinion sur le niveau des carnets de commandes stagne et la tendance reste négative quant à la trésorerie et aux carnets de commandes, en raison du durcissement des conditions de financement. « Le contexte est peu porteur et les prévisions à mi-juillet sont très prudentes. On risque d’assister à un attentisme des chefs d’entreprise », résume-t-il. Illustration : si 30% des entreprises ont investi au cours du premier semestre 2023, elles ne sont plus que 20% à prévoir de le faire au cours du second semestre.

Neuf entreprises sur dix indiquent avoir rencontré des difficultés et, parmi les causes, l’inflation est citée dans 49% des cas, suivie de la baisse de la demande (32%) et du poids des charges (28%). La hausse du coût de l’énergie (26%) n’arrive qu’au quatrième rang statistique. Les difficultés RH, qui étaient évoquées dans 30% des cas au premier semestre, n’apparaissent que dans 15% des réponses lors de cette enquête. « Les difficultés RH sont toujours là, mais les chefs d’entreprise se sont adaptés », estime le président Clédel. Un tiers des entreprises expriment des besoins de recrutement et, au-delà de ce ratio global, la part monte à 80% pour les entreprises de moins de dix salariés. Des difficultés pour embaucher sont évoquées dans 78% des cas. Les principales raisons ? Le manque de candidats ou l’inadéquation de ceux-ci. Corollaire : « cela affecte le niveau d’activité », éclaire Jean-François Clédel.

Par ailleurs, 61% des entreprises indiquent s’être engagées (ou souhaiter le faire) dans un process de transition (huit sur dix concernant les entreprises de plus de dix salariés). Première priorité évoquée : la réduction de la consommation d’énergie de l’entreprise (61%), plaçant cet enjeu à un niveau bien supérieur du ressenti engendré par la hausse du coût de l’énergie (4e difficulté évoquée par les entreprises). Autres actions prioritairement évoquées : la prévention et la valorisation de la production de déchets (37%) ainsi que la décarbonation de l’entreprise / le développement des énergies renouvelables (32%), à égalité avec la réduction de la consommation d’eau et/ou d’autres ressources naturelles. « Malgré les difficultés, les chefs d’entreprise néo-aquitains restent optimistes quant à l’évolution de leur activité ». Cette confiance en l’avenir est évoquée par près des trois quarts d’entre eux (73%), « un chiffre en hausse pour la première fois depuis début 2021 », est-il noté.

Un nouvel « R » en 2023

Après la récession en 2020, la reprise en 2021, puis la résilience en 2022, c’est un « ralentissement » que l’on observe globalement en 2023 : une activité qui reste globalement en croissance, mais à un rythme moins soutenu, explique Jacky Philipps, chef du département des Entreprises et des Activités économiques régionales à la Banque de France Nouvelle-Aquitaine. Dont l’étude évoquée a été quant à elle réalisée auprès d’un millier de chefs d’entreprises représentant quelque 150.000 emplois de l’industrie, des services et enfin de la construction. Et pondérée par les niveaux d'effectifs et de chiffre d'affaires. « On sort de deux années de croissance à deux chiffres. En 2023, le rebond se poursuit mais de moindre ampleur », met-il en perspective. L’industrie régionale maintient à mi-année ses prévisions de chiffre d’affaires, qui intègrent cependant un effet prix indéniable, qui prend le relais de l’effet volume observé jusque-là en séquence post-Covid. Si 31% des industriels néo-aquitains ont investi au premier semestre, ce niveau devrait croître en deuxième partie d’année. « Il ne s’agira pas majoritairement d’investissements productifs mais plutôt écologiques, pour acquérir une autonomie voire une indépendance vis-à-vis de certaines énergies », module Jacky Philipps. Et d’indiquer que « l’alerte sur la rentabilité évoquée en début d’année s’atténue », dans le sillage de difficultés d’approvisionnement qui se résorbent : 50% des entreprises industriels régionales l’évoquaient en 2022 ; elles ne sont plus que 15 à 20% à le faire cette année. Concernant l’évolution du chiffre d’affaires, le solde entre opinions négatives et positives est « proche de l’équilibre », rapporte Carole Lucante, cheffe de projets études économiques à la CCI Nouvelle-Aquitaine. Et d’évoquer de fortes disparités selon les secteurs : le ressenti sur l’évolution du CA, globalement négatif dans l’agroalimentaire, est a contrario majoritairement positif chez les fabricants d’équipements.

Logements : les mises en chantier au plus bas depuis 20 ans

Le rebond des services marchands enclenché après la pandémie « s’estompe plus précocement qu’anticipé », indiquent les services de la Banque de France Nouvelle-Aquitaine. Après avoir enregistré une hausse de chiffre d’affaires de 15,7% en 2022, le secteur prévoyait en début d’année une progression de 3,7%. A mi-année, les projections ramènent cette évolution à +1,7%. La croissance anticipée des effectifs redescend à 1,3% (+3,5% prévus début 2023), le solde d’opinion sur les investissements est neutre et s’avère même négatif concernant les prévisions de rentabilité. Cette dernière devrait globalement baisser dans ce secteur en 2023, impactée par les hausses du coût de l’énergie et des salaires.

Dans la construction, la baisse d’activité « se révèlerait moins immédiate que ne le prévoyaient les chefs d’entreprise en début d’année », résument les services de la Banque de France. « Le rebond puissant post-Covid s’est propagé en 2022 et le chiffre d’affaires devrait croître », commente Jacky Philipps. En début d’année, les projections tablaient sur un recul de 0,3% du chiffre d’affaires. Celui-ci pourrait finalement progresser de 2,5% en 2023 (vs + 7,3% en 2022) selon les estimations effectuées à mi-année. Sur les effectifs, on attend une légère hausse (+0,4%, stable par rapport aux prévisions de début d’année), le solde d’opinion reste négatif quant à la rentabilité et « l’alerte sur la rentabilité est bien présente ». La construction de logements subit un véritable coup d’arrêt : « le nombre de mises en chantier sur 12 mois est le plus faible depuis 20 ans », constate Carole Lucante et les travaux publics ne permettent pas de sauver la mise : « les appels d’offres sur les ouvrages publics tardent à se concrétiser ». A contrario, « l’amélioration et la rénovation énergétique restent porteuses ». Au fil des mois, face au coût élevé des matériaux et de l’énergie, « des réajustements de prix seulement partiels se réalisent et la rentabilité en pâtit ».

Denis Lauretou, directeur régional de la Banque de France en Nouvelle-Aquitaine pour encore quelques jours - il s’apprête à rejoindre Marseille après avoir été annoncé en début d’année en partance vers Toulouse - avait averti en préambule : l’enquête a été réalisée sur la première quinzaine de juillet et, depuis, « l’été a été porteur de bonnes et de moins bonnes nouvelles, le ralentissement semble se confirmer ».