Laser : quels défis pour le groupe girondin Amplitude, spécialiste mondial du femtoseconde ? - Premium

« Une transition entre le pionnier technologique et l’acteur industriel incontournable ». Pierre Rigail, vice-président, directeur des opérations (et historique de l’entreprise, avec plus de 20 ans d’ancienneté) résume ainsi la transformation à l’œuvre au sein du groupe girondin Amplitude, fabricant de lasers haute puissance. « On a vraiment été pionnier en termes d’innovation dans le laser femtoseconde*, insiste-t-il, cet ADN technologique, on le conserve. Notre ligne, c’est désormais de répondre à des enjeux industriels. Un développement de produit, ce n’est pas que des spécifications optiques. C’est de la robustesse, de la fiabilité, un certain coût. Notre nouveau CEO (ndlr, Damien Buet, nommé en avril 2023) arrive avec ce background très fort, pour comprendre le vrai besoin industriel. »Cette capacité d’innovation d’Amplitude, portée par la R&D menée au siège social à Pessac et qui « engloutit » plus de 15% du chiffre d’affaires annuel, était au cœur des PLI Conférences, rendez-vous dédié aux procédés laser industriels et à leurs avancées, qui se sont récemment tenues à Bordeaux. « Le push techno vient rencontrer des besoins de nouvelles applications », résume-t-il. L’occasion aussi de dévoiler les caractéristiques du Satsuma X, appelé à être « un produit phare d’Amplitude. » Son prédécesseur, le Satsuma, s’écoulait à plusieurs centaines d’unités ; il devrait en être de même pour lui. « Le nouveau va cannibaliser l’ancien. Sa proposition de valeur, c’est d’intégrer dans un produit toute la recherche, tout le développement que l’on a pu faire ces dernières années. Il propose plus d’énergie, on n’en avait pas assez pour certaines applications de micro-usinage. Et il permet ces pulsations très courtes, avec un management très fin pour que, finalement, la machine devienne maître du laser », égrène le dirigeant en langage profane, soulignant que jusqu’à présent, certaines limitations rendaient la machine malgré tout quelque peu « esclave » du laser qu’elle intégrait. « On va pouvoir améliorer l’efficacité des process et ceci avec une architecture robuste, compatible avec des besoins de fonctionnement 24/7. »La nécessité absolue de croîtreAmplitude est articulé autour de deux business units. L’une, baptisée Advanced Laser Solutions et dont les produits sont assemblés sur le site parisien, propose de très gros systèmes, très puissants, « la puissance d’une centrale nucléaire mais pendant quelques femtosecondes », de la taille d’une salle, voire d’un rez-de-chaussée de bâtiment. « Avec ceux-là, on est sur une activité de projet, on adresse la recherche fondamentale, par exemple sur de la proton-thérapie, de l’imagerie ou du traitement de cancers. Et peut-être, pas demain mais après-demain, arriver à la fusion nucléaire », décrit Pierre Rigail. Lequel dirige la seconde business unit - Laser Product & Solutions - dont les appareils sont bien plus compacts et tiennent sur une table, à l’instar du Satsuma X. Ils sont majoritairement fabriqués sur le site girondin et apportent à Amplitude environ deux tiers de son chiffre d’affaires.Le design du Satsuma X insiste sur la robustesse du produit, explique Pierre Rigail. Crédit : AmplitudeSi le groupe reste discret sur ce dernier - « on oscille entre 70 et 90 millions d’euros » - les ambitions sont affirmées. « On a connu des croissances à deux chiffres jusqu’au Covid, une baisse significative en 2020 et un rebond plus haut l’année d’après. Depuis, on est plutôt stable et, pour l’année en cours, je n’attends pas de croissance significative, ça sera plutôt le lancement de nouveaux produits », commente à ce sujet le vice-président. Qui ajoute qu’Amplitude adresse trois marchés principaux : la science, les applications médicales et l’industrie. Reste que sur cette spécialité « femto » d’Amplitude, les acteurs invités à la table des gros marchés se comptent sur les doigts d’une main. Les concurrents, hier d’une taille similaire au groupe girondin, sont aujourd’hui plus gros, « parce qu’il y a une consolidation du marché », explique Pierre Rigail. Qui prolonge : « ces gros acteurs sont venus sur le femto parce que, dans la photonique laser, c’est le marché qui a le plus de croissance. C’est là où il y a le plus de potentiel de nouvelles applications et de développement du business ». La taille de ces concurrents impose ainsi à Amplitude « un enjeu de masse critique, on est contraint d’avoir une forte croissance pour, au moins, maintenir nos parts de marchés », analyse-t-il.Agilité, passer au macro, extrême fiabilité…Un terrain de jeu est prometteur et aux profils potentiellement juteux. Ainsi d’activités industrielles telles que la texturation de surface. Dont la précision permet désormais de rendre une surface hydrophobe, ou résistante au gel. Des caractéristiques qui peuvent intéresser les fabricants de pare-brises, de coques de bateaux ou de pales d’éoliennes, à condition que les lasers soient en capacité d’usiner à ce niveau microscopique mais sur de très vastes surfaces, dans un temps réduit. « C’est aujourd’hui le levier de croissance le plus important pour Amplitude, être capable de passer de micro-usinage au macro-usinage », résume le dirigeant. Répéter à cadence industrielle le miracle de l’infiniment petit, sur des éléments de grandes tailles, produits des milliers voire millions de fois. « On touche des industries matures, qui fonctionnent 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. Ce qui suppose une extrême fiabilité des lasers, c’est un des principaux leviers », confirme-t-il.« On achète du femtoseconde quand on n’a pas de solutions avec des technologies moins chères. Mais en général, c’est à chaque fois un marché de niche, qu’on va pouvoir combler avec quelques centaines d’unités. Des applications apparaissent tous les jours, qui demandent d’être très agile pour adapter ses produits, mais in fine avec de faibles volumes ». Exception notable : le médical. « C’est une industrie de volume. On peut fabriquer des millions d’écrans par exemple dans une seule usine, mais on ne peut pas traiter des millions d’humaines dans le même hôpital », illustre le vice-président.Doubler (encore) à Pessac« À moyen terme, on est sur des croissances qui doivent être à deux chiffres. On a déjà beaucoup développé les effectifs ces dernières années, donc les équipes ne doivent pas évoluer mécaniquement au même rythme que la croissance », se projette le dirigeant, qui parle tout de même de « dizaines de postes créés par an ». Le site de Pessac (280 personnes sur un effectif global de 450 salariés), certifié ISO 9001 et ISO 13485, dispose à ce jour de 1.500m² de salles blanches, pour la R&D mais aussi la production. « Il va devoir continuer à grandir. À ce jour il n’y a pas de projet signé mais on a déjà des réflexions. On a doublé les sites à peu près tous les cinq à sept ans. On pense qu’on devra encore doubler la surface à Pessac dans un proche futur. » Un futur prometteur. « Demain, il y a aura des traitements de maladies aujourd’hui incurables avec nos lasers », prophétise le dirigeant.* impulsion qui dure un millionième de milliardième de seconde.AmplitudeSAS fondée en février 2001Basée à Pessac480 personnesCA : quelque 80 M€

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