Import/export de céréales : « d’autres destinations pour vider nos silos »
La filière céréalière enregistre un retrait d’environ 15% sur la campagne 2022-2023 par rapport à la précédente. Crédit : Pixabay
Les 22 et 23 juin 2023, les acteurs de la filière céréales se réunissaient pour la 8e édition de la Bourse maritime agricole de La Rochelle. L’occasion de faire un point, au niveau du port de La Pallice, sur l’état de la filière confrontée à un contexte international difficile et un marché financier perturbé en raison notamment de la guerre en Ukraine.
1. Un bilan en retrait
La filière céréalière enregistre un retrait d’environ 15% sur la campagne 2022-2023 par rapport à la précédente. Fin mai, le bilan s’élevait à 3,35 millions de tonnes traitées sur les terminaux de Port Atlantique La Rochelle. « Nous avons constaté un déséquilibre entre les deux semestres de 2022, ce qui est plutôt rare. Cela s’explique en partie avec le début de la guerre en Ukraine. Sur le premier semestre, nous avons pris le relais de l’Ukraine et avons fourni les industriels du nord de l’Europe, sur le deuxième semestre ça n’était plus le cas », détaille Vincent Poudevigne, directeur général du groupe Sica Atlantique, opérateur en logistique portuaire notamment des productions agricoles.
2. La France sortie du marché international du blé
« Cette année, on s’attend à une belle récolte pour le blé, prévoit Frédéric Guillemin, directeur du pôle blé chez Soufflet négoce, entité en charge du négoce international de grains pour le groupe InVivo. Le problème n’est donc pas le manque de céréales mais le manque de demandes. » La raison ? « Depuis la guerre en Ukraine, le prix du blé en Russie est décidé au Kremlin. Ça change tout et ça pose problème. Aujourd’hui, la tonne de blé russe est à 235 $ contre 270 $ chez nous. Face à ça, il y a les Américains qui concurrencent les Russes et, de ce fait, la France est sortie du marché international. »
Quai Lombard à La Rochelle La Pallice. Crédit : Thierry Rambaud / PALR
3. Problème de stockage à venir ?
Les professionnels craignent des mois d’été difficiles avec des silos qui se remplissent de céréales mais qui ne se vident pas faute de clients. Ils encouragent donc les producteurs à stocker au maximum. « Nous avons encore en stock la récolte de l’ancienne campagne alors que l’on est littéralement à la veille d’une nouvelle récolte. C’est la distorsion du marché financier qui en est la cause. Poutine tisse des accords privilégiés avec des pays du continent asiatique, africain et au Moyen-Orient. Après l’arme énergétique, il utilise l’arme alimentaire. Aujourd'hui, il nous faut donc trouver d’autres destinations pour vider nos silos », poursuit Frédéric Guillemin.
4. Année record pour les fertilisants
Du côté des fertilisants, Atena, importateur rochelais de fertilisants agricoles, souligne une année 2022 exceptionnelle et historique. « Un nouveau record d’importation a été battu avec 570.000 tonnes de fertilisants vracs solides (non classés). Soit une progression de 100.000 tonnes par rapport à 2021, constate Sébastien Hamon, directeur des pôles solides du groupe Sica Atlantique. Le conflit entre l’Ukraine et la Russie a fait progresser le prix de l’énergie rendant les urées granulées plus compétitives au détriment des ammonitrates. La part des fertilisants azotés importés à donc progressé de 65 à 80%. »
5. L’alimentation animale en baisse
En 2021, l’importation de produits destinés à l’alimentation animale pesait 180.642 tonnes au niveau de La Pallice à La Rochelle. En 2022, les chiffres ont baissé à 84.059 tonnes. « L’alimentation animale est triplement impactée, explique Sébastien Hamon. Il y a évidemment le conflit ukrainien mais aussi la grippe aviaire et le fait que la consommation de viande a diminué. En 2023, nous estimons un marché à 100 000 tonnes, cela reste assez bas. »