Aéroport de La Rochelle : « la Cour des comptes ne prend pas en considération l’objectif recherché »
L'aéroport de La Rochelle a enregistré 232.000 passagers, en 2019, et prévoit dépasser ce niveau fin 2023. Crédit : Clémentine Mercier
La Cour des comptes a publié, la semaine dernière, les résultats de son enquête nationale sur les aéroports « intermédiaires » de moins de 3 millions de passagers. La Nouvelle-Aquitaine en compte huit, dont l’aéroport de La Rochelle. Le rapport souligne notamment une fragilité économique et une dépendance envers les compagnies aériennes low cost. Thomas Juin, directeur général du Syndicat mixte des aéroports de La Rochelle - île de Ré et Rochefort chargé du développement, de l’entretien et de l’exploitation de l’établissement rochelais, réagit.
Le rapport de la Cour des comptes note une fragilité économique pour ces aéroports « intermédiaires », enregistrant moins de 700.000 passagers annuel. C’est le cas de l’aéroport de La Rochelle. Qu’en dites-vous ?
La Cour des comptes rapporte ça au fait que ces aéroports ne sont pas rentables, mais ça n’est pas une surprise. En effet, en dessous de 700.000 passagers, un aéroport n’a pas la rentabilité recherchée car il y a des coûts fixes incompressibles (investissements, entretien des pistes, des parkings et autres). Mais quel rôle assigne-t-on à un aéroport ? C’est tout le débat et la Cour des comptes reste campée sur ses positions. D’ailleurs, on est un peu surpris que l’on soit le seul mode de transport à avoir cette obligation de rentabilité. Je ne pense pas que l’on assigne cela aux TER, aux transports ferrés en général. C’est toujours assez navrant de voir que la Cour des comptes ne prend pas en considération l’objectif recherché derrière, qui est de désenclaver les territoires.
Combien de passagers l’aéroport de La Rochelle enregistre-t-il annuellement ?
En 2019, on a eu 232.000 passagers et on devrait dépasser ce niveau fin 2023, selon nos prévisions. Nous devrions donc être en avance par rapport à la moyenne française et européenne où l’on estime que l’on retrouvera le trafic d’avant crise en 2024-2025. On est donc dans une dynamique qui est, au contraire, plutôt bonne.
« Ça n’est pas un simple raisonnement comptable »
L’aéroport de La Rochelle a donc toute sa place selon vous…
C’est certain ! Un exemple, la dernière liaison ouverte il y a quelques mois entre Marseille et La Rochelle enregistre quasiment le plus fort taux d’occupation, on est à 91%. Cela répond à une insuffisance d’alternatives quand on souhaite se déplacer au départ de La Rochelle par le train ou par la route. Dès lors que l’on ouvre des services, il y a un engouement. Il ne faut pas oublier aussi que l’aéroport de La Rochelle représente un peu plus de 150 emplois avec des entreprises innovantes qui se développent. Une infrastructure aéroportuaire, c’est des multiples usages, ça n’est pas un simple raisonnement comptable.
Le rapport souligne également qu’en raison d’une économie fragile, ces aéroports ont une certaine dépendance vis-à-vis des compagnies aériennes à bas coût. Quel est votre avis ?
C’est encore un prisme de la Cour des comptes qui est un raisonnement du passé. Sur la période 2010-2019, 70% de la croissance des aéroports français est venue des compagnies low cost. Donc penser qu’il ne faut pas trop dépendre des compagnies low cost, c’est être complètement déphasé par rapport à la réalité des aéroports en France ou en Europe. Au contraire, avoir des compagnies low cost est une chance et un atout. À La Rochelle, nous avons Ryanair et Easyjet, les plus puissants en Europe, c’est ce qui fait notre croissance. Les compagnies low cost sont nos clients et ce sont les compagnies qui sont les plus à même de nous proposer des destinations avec des prix attractifs.
La Cour des comptes estime que le rôle des Régions devrait être renforcé dans la gestion de ces aéroports…
En Nouvelle-Aquitaine, c’est déjà le cas. La Région a défini une politique aéroportuaire où elle a pris la décision d’entrer dans la gouvernance des aéroports. Effectivement, je pense que cette cohérence des aéroports doit se faire à l’échelle régionale. Finalement, la vraie question n’est pas « est-ce qu’il y a trop d’aéroports ? » mais plutôt « qu’est-ce que l’on fait de ces aéroports ? » Il n’y est pas forcément nécessaire de développer des lignes aériennes sur tous les aéroports. Une coordination régionale pour bien orienter la stratégie de chaque aéroport selon son implantation sur le territoire, c’est indispensable.