UPPA : « Nous avons l'ambition de créer six entreprises par an » - Premium

C’est entendu, le sweat-shirt s’accorde mal avec le costume deux-pièces. Mais comme c’est pour la bonne cause, ils feront une exception. Nous sommes le 19 avril, et Laurent Bordes, président de l’université de Pau et des Pays de l’Adour (UPPA) signe un contrat de licence avec Magomed-Amin Gaziev, 27 ans, ancien étudiant de l’université. L’entreprise qu’il vient de fonder, StudProd, est désormais autorisée à utiliser le nom et le logo de l’université sur ses sweat-shirts à l’américaine. « En 2020, je me suis demandé pourquoi il n’y avait pas, à l’UPPA, de vêtements siglés comme dans toutes les grandes universités du monde », raconte Magomed-Amin. À l’époque, il est étudiant en master d’administration des entreprises et suit parallèlement le DU « Outils pour entreprendre ». Il décide donc de passer directement à la pratique, et lance sa micro-entreprise. Soutenu par ses professeurs, il obtient le statut national d’étudiant-entrepreneur, qui lui permet d’être accompagné et incubé à l’université. « J’avais des rendez-vous toutes les deux trois-semaines avec des chargés d’accompagnement et des conseils individuels, détaille le jeune entrepreneur. Il y avait aussi les événements organisés par L’Entrepôt, l’incubateur de l’UPPA, des ateliers, des afterworks, et tout un réseau qui permet de construire des projets ». La première période de préventes a ouvert début mars 2024. Car StudProd fonctionne pour le moment sur un modèle de précommandes, avec une production lancée en fonction du nombre de pièces réservées. Depuis le lancement, l’entreprise a engrangé une cinquantaine de commandes. Les dimensions sont modestes, mais Magomed-Amin Gaziev a tenu à mettre en place des bonnes pratiques dès le départ, avec le choix d’une production faite en France et d’un matériau responsable, « en coton bio et polyester recyclé », précise-t-il. « On a été attentif au choix du matériau, souligne Christophe Derail, vice-président partenariat et innovation à l’UPPA, en charge de l’entrepreneuriat étudiant. On n’aurait sans doute pas accepté de promouvoir une société qui fabriquerait avec des matériaux non écologiques ». En guise de promotion, l’université « mettra en évidence » les produits de StudProd. « La question d’une boutique sur le territoire de l’université s’est posée, reprend Christophe Derail, mais cela pose des questions juridiques, accueillir une entreprise pour faire du commerce sur le campus n’est pas forcément aisé ».Soutien à l'entrepreneuriat étudiant« La politique de soutien à l’entrepreneuriat est assez développée au sein de l’UPPA, affirme Laurent Bordes. Nous travaillons dans le cadre du dispositif nationale étudiant-entrepreneur, mais il y a aussi un dispositif régional, Pépite Entrepreneuriat Campus Aquitaine, qui est copiloté par l’UPPA et les universités de Bordeaux et La Rochelle et propose de la sensibilisation et de la formation à l’entrepreneuriat pour les étudiants ». Engagée dans ce ce dispositif depuis dix ans, l’université paloise constate ces dernières années « une accélération forte », dit son président. « Notre objectif est de sensibiliser 25.000 étudiants au fait que l’entrepreneuriat est une voie d’insertion professionnelle possible à l’issue des études ».« Par l’intermédiaire des étudiants-entrepreneurs on a 10-15 créations d’activités par an, dénombre Christophe Derail. Cela peut être une entreprise individuelle, ou bien une association… Pour une université de notre taille, c’est assez remarquable ». « Les entreprises peuvent venir d’une idée d’un étudiant, comme c’est le cas de Magomed-Emin, reprend Laurent Bordes, ou bien de sujets issus de nos labos de recherche, en particulier pour les doctorants, et là on arrive sur des créations à haute valeur ajoutée, d’où le Deeptech Tour de la semaine dernière ».À lire également - Recherche : Comment l'UPPA veut séduire les PME régionales et lancer plus de startupsSur ces sujets aussi, l’UPPA veut être présente. Dès 2012, elle s’est dotée d’une SATT (société d'accélération du transfert de technologies), dont elle est actionnaire aux côtés d’établissements partenaires bordelais, pour accompagner les projets de deeptech et de technologies de rupture. En mai dernier, elle a également reçu la labellisation pôle universitaire d’innovation, un dispositif créé dans le cadre du plan France 2030. « Cela nous donne des outils, des marges de manœuvre, de la capacité à accompagner, explique Laurent Bordes. Nous avons notre incubateur, l’Entrepôt, nous allons avoir un espace d’accueil dédié dans l’université, et nous avons l’ambition de créer six entreprises par an, soit qu’elles viennent de nos laboratoires, soit de l’extérieur ».Lien avec les entreprises du territoireÀ l’avenir, l’Entrepôt sera d’ailleurs intégré au « startup studio » de l’UPPA, L'Étincelle, concentré sur les startups du domaine de l’énergie et de la transition verte. « Il sera dans le bâtiment Curie à Hélioparc, annonce Laurent Bordes. On a souhaité faire ce lien avec la technopole, leur amener des jeunes pousses ». Une approche en ligne avec l’ADN de l’UPPA, qui revendique de nombreux partenariats avec le tissu entrepreneurial du territoire. « C’est véritablement un atout qui nous distingue au niveau national, affirme Laurent Bordes. L’interface entre notre université et le monde de l’entreprise est quelque chose que nous travaillons et que nous cultivons, avec une douzaine de laboratoires communs, 25 chaires partenariales, un lien fort et durable avec les entreprises. Cela nous permet de rassembler beaucoup plus de chercheurs, en nous ouvrant à la R&D privée. C’est au cœur de la stratégie de l’université ». Le Béarn concentre ainsi 25% de la recherche de Nouvelle-Aquitaine, se félicite le président de l’UPPA.« Cela ne crée pas forcément d’entreprises, mais ça crée un terreau favorable. Des idées naissent, qui peuvent s’incuber dans notre structure, et notre labellisation PUI nous permet de les accompagner au mieux, de les aider à lever des fonds. On n’est pas seuls au sein de PUI, il y a aussi les technopoles, les collectivités, des entreprises, la French Tech, les pôles de compétitivité… énumère Laurent Bordes. Notre rôle est d’amener une coordination de tous ces acteurs. » « Le campus dont on rêve à l’UPPA, conclut son président, c’est un campus technopolitain, sans frontières entre les technopoles et les campus universitaires. » Et pour lui, la micro-entreprise de Magomed-Emin Gadziev, toute modeste qu’elle soit, l’incarne. « Les sweat-shirts portant le sigle de l’université, c’est un état d’esprit que l’on voit à l’étranger. Et à l’international, il n’y a pas de frontière entre entreprises et campus, tout coexiste, ça crée des environnements favorables pour tout le monde, affirme Laurent Bordes. Les étudiants peuvent faire des stages dans les entreprises, les entreprises bénéficient des compétences des chercheurs, peuvent avoir de la formation continue, à des démonstrateurs sur lesquels travaillent étudiants et chercheurs… C’est des choses qu’on veut arriver à faire à l’UPPA. Ce n’est pas toujours facile en France, conclut-il, car ce n’est pas forcément l’état d’esprit général… mais c’est celui de l’UPPA. »

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