« Les recettes induites du Tour de France à Pau dépassent le million d'euros » - Premium

Seule ville de Nouvelle-Aquitaine à héberger plusieurs clubs professionnels, Pau possède également plusieurs formations spécialisées dans le sport et son économie au sein du groupe de formation éklore. Dans le cadre d'une table ronde organisée par l'école paloise de management, Jean-Philippe Serbera, Doyen associé, décrypte pour Placéco l'impact du sport sur l'économie d'un territoire, et ses applications en Béarn.Les événements sportifs de type Coupe du Monde de football, ou Jeux olympiques, sont de plus en plus critiqués pour leur coût. Pour un territoire, accueillir un grand événement sportif a-t-il une rationalité économique ? Cela dépend des coûts initiaux. Si on a déjà les infrastructures, c’est déjà beaucoup plus facile. Sinon… Pour la Coupe du monde de football, le Qatar a dépensé 230 milliards de dollars. Les retombées économiques ne seront jamais à la hauteur. Il y a très peu d'événements planétaires qui, même avec les effets décalés sur le tourisme, l’image, l’héritage… peuvent justifier l’investissement. Le seul exemple est peut-être Barcelone, avec les JO de 1992, qui ont eu un héritage touristique très fort. Mais sinon, la réponse est « non ». Sur un événement planétaire, à part si l’on a déjà les infrastructures, on perd de l’argent. Et à plus petite échelle ? Il n’est pas rentable d’accueillir la Coupe du Monde de football, mais est-il rentable d'organiser un tournoi de tennis dans une ville moyenne ? Oui, cela devient rentable, parce que l’agglomération, la municipalité, va prêter les locaux, les louer à un tarif réduit. Quand on fait venir 50.000 personnes pour le 5 étoiles de Pau sur 4 jours sur un domaine déjà existant, là c’est rentable. Le Tour de France est l’exemple le plus frappant : à part la réfection de routes de temps en temps, être ville étape ne coûte quasiment rien, et vous avez 300.000 personnes qui viennent dans l’agglomération paloise. Le ticket d’entrée pour la ville est d’à peu près 200.000 euros, mais les recettes induites pour les commerçants, les hôtels, les stations d’essence, les supermarchés… sont au-dessus du million d’euros.« Un événement sportif, c'est un investissement » Certains sports sont-ils plus « rentables » que d’autres ? Il y a des pratiques plus ou moins bonnes. Dès que l’on fait venir beaucoup de monde, il y a un impact économique positif, mais aussi un impact négatif en matière de pollution. Il n’y a pas nécessairement de sports plus ou moins attractifs pour un territoire, mais il faut mettre en balance les coûts et les dépenses, d’un point de vue économique et environnemental, mais aussi sociétal et en termes d’image. Dans le modèle des événements sportifs, les coûts sont supportés par la collectivité, les bénéfices vont directement aux acteurs économiques… Est-ce que l'on peut considérer ces événements comme une forme d'investissement de la collectivité dans le développement économique ?C’est totalement un investissement. Dans l’infrastructure, déjà: on construit des routes, des stades, des aéroports, des lignes de chemin de fer… ce qui est censé porter des fruits avec un effet multiplicateur. Mais il ne faut pas oublier que cela se fait aux dépens d’autres investissements, dans la santé ou l’éducation par exemple, qui ont eux aussi des effets bénéfiques pour l’économie à terme. C’est donc un tableau très compliqué à cerner en termes de retombées.À lire également - Club d'affaires Henry XV : « Aujourd'hui, les clubs du Top 14 sont de grosses PME » On désigne souvent les clubs professionnels comme des « locomotives » d’un territoire, mais ils restent des PME moyennes avec quelques centaines de salariés. La présence d’un club professionnel a-t-elle réellement un effet sur un territoire ? Un entreprise sportive emploie plutôt beaucoup de salariés relativement à son chiffre d’affaires, plus qu’une entreprise technologique par exemple, qui aura tendance à faire plus de marge. Pour un tissu économique local, il vaut mieux une entreprise de ce type, dont les profits restent en plus sur le territoire.Est-ce que le sport crée plus d’emplois induits que d'autres types d’activité ?Il crée, en plus du reste, des emplois indirects à travers des associations reliées. Il y a quand même un tissu qui se développe autour de cela, une implication sociale, souvent bénévole, ce sont des choses à ne pas négliger. Barcelone a énormément développé son tourisme après les JO de 1992, qui ont mis la ville sur la carte du monde et en ont fait la capitale touristique qu’elle est aujourd’hui. L’effet que les Jeux olympiques ont eu sur cette ville est incommensurable, l'activité induite a été exceptionnelle. Mais ce n’est pas nécessairement le cas de tous les événements sportifs.« Un club connu à l'international est une vitrine exceptionnelle » Pau est la seule ville de Nouvelle-Aquitaine à posséder plus d’un club professionnel. Sait-on ce que représente l’économie du sport à Pau et en Béarn ?Pour vous donner quelques exemples, le budget du 5 étoiles était de 1.362.000 euros en 2024, le Grand Prix de Pau a attiré 160.000 spectateurs en 2022. Le Tour de France a coûté 260.000 euros en 2024 à la ville, le 5 étoiles 310.000 euros. Le Lons Section Paloise Rugby Féminin a été subventionné à hauteur de 54.300, le Pau Billère Handball, de 255.400 ; la section Paloise de 555.000 euros, le Pau FC de 400.000 euros et l’Elan Béarnais de 865.000 euros. La Section Paloise représente trente millions d’euros de chiffre d’affaires, c’est plus que tous les autres clubs professionnels réunis. Au niveau de la ville, c’est donc important sans être démesuré. Dans le sport professionnel, l’aléa sportif peut avoir des implications économiques. Que représente, économiquement, la promotion ou la relégation d’un club dans une autre division ? Tout d’abord, cela peut se mesurer en termes d’audience, de droits TV, de billetterie. Baisser d’une division représente un énorme manque à gagner. À l’inverse, monter d’une division a un impact énorme sur les revenus d’un club. Et il y a aussi des effets positifs plus profonds. Quand un club de football atteint la Ligue des Champions, tout à coup, il devient connu en Chine, en Inde… Un club connu à l’international est une vitrine exceptionnelle, qui se reporte de façon sensible sur, par exemple, les inscriptions d’étudiants étrangers dans la ville.

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