HackSchooling : des tiers-lieux connectés pour lutter contre l'isolement scolaire - Premium

Ancien sportif de haut niveau, vous êtes devenu directeur d'un institut de formation. Un chemin pas tout à fait conventionnel. Comment en êtes-vous arrivé là ?J'ai eu une carrière dans le surf effectivement, mais aussi, en parallèle, un parcours très académique. Après un cursus au lycée à Bordeaux et des classes préparatoires, j'ai intégré une école d'ingénieur à Bidart, avant de faire une thèse aux Arts et métiers, à Talence. Là-bas, j'ai travaillé pendant trois ans avec une équipe sur un projet de recherche : la conception d'un simulateur de surf. Un projet financé par la Région Nouvelle-Aquitaine et qui m'a permis de me construire un solide bagage scientifique et technique. J'ai pu mettre un pied dans l'industrie de la glisse et me rendre compte que finalement, il y avait pas mal de besoins, notamment en termes de recherche et développement, mais aussi en termes de formation, notamment au niveau de l'accompagnement des sportifs. Ce sont souvent des jeunes qui ont besoin d'avoir de la flexibilité dans leurs emplois du temps et d'avoir un accompagnement quand ils sont en déplacement à l'étranger. Il y avait déjà des choses qui fonctionnaient très bien à ce moment-là et qui étaient mises en place, notamment au niveau des pôles France et des pôles Espoirs. Mais ça ne fonctionnait bien tant que l'athlète était sur site. Dès lors qu'il était amené à se déplacer à l'étranger, ça devenait compliqué. Et c'est là que nous avons commencé à intervenir : permettre à ces jeunes de continuer leur apprentissage en gardant un lien avec leurs professeurs.Si ce genre d'accompagnement existait déjà, qu'est-ce qui a permis à HackSchooling de faire la différence ? Aujourd'hui ça paraît évident de faire des visios. L'évolution des différentes plateformes de réunions en ligne et surtout, l'arrivée du covid, ont profondément modifié les pratiques. Mais quand nous avons commencé à travailler sur notre concept, nous étions en 2013. A l'époque, Zoom n'existait pas et nous en étions aux prémices de Skype. Nous avons ainsi dû construire nos propres outils et c'est en travaillant avec des athlètes et des surfeurs, que nous avons réalisé qu'il y avait un vrai besoin, pas uniquement pour les professionnels de la glisse, mais pour les sportifs de manière générale. Et puis plus largement, les expatriés, les enfants dont les parents sont saisonniers, qui voyagent six mois de l'année. C'est comme ça qu'en 2015, nous avons décidé de créer et de structurer notre accompagnement et de créer HackSchooling. Nous étions trois à l'époque sur le projet : Jean-Luc Barrou, ingénieur de recherche et Philippe Viot, directeur du campus des Arts et Métiers de Talence. Nous avons vraiment voulu construire ce projet dans l'idée qu'il ait une forte complémentarité avec le système déjà existant. Comment avez-vous fait grandir HackSchooling par la suite ?Très vite, le projet a pris de l'ampleur. En six à douze mois d'activité, nous avions plus d'une centaine de jeunes qui étaient suivis chez nous avec, parmi eux, trois grosses catégories d'élèves : des sportifs mais aussi des saisonniers et un tiers d'élèves en décrochage. Ce qui n'était pas forcément notre public cible au départ. Il s'agissait d'élèves qui avaient des phobies scolaires, des phobies sociales, des troubles de l'apprentissage ou encore qui étaient porteurs de handicaps et ils sont venus d'eux-mêmes vers nous. Il faut bien comprendre qu'à l'époque, avant le lancement d'HackSchooling, le soutien scolaire consistait à avoir un professeur qui se déplaçait à domicile. Sauf que dans ce cadre-là, un élève qui est déscolarisé reste tout seul et n'a pas de possibilité d'échanger avec d'autres camarades, d'avoir quand même un effet de groupe. Alors qu'avec l'enseignement à distance que nous proposons, l'idée c'est que même si on a trois élèves qui sont déscolarisés, un qui habite à Paris, un qui habite à Bordeaux, un qui habite dans les Landes, les trois peuvent être quand même réunis dans la même salle virtuelle et peuvent avoir le sentiment d'appartenir à un même groupe, sans bouger de chez eux. Et donc ça, c'est intéressant pour pouvoir redonner confiance à ces élèves.D'un projet de soutien scolaire, vous êtes passés à votre propre institut de formation : comment en êtes-vous arrivés là ? Au bout de quelques années, nous avons réalisé qu'il y avait des familles qui prenaient jusqu'à 20 heures de cours de soutien par semaine. Et donc pour qui le coût était relativement élevé. Nous avons donc commencé à développer un accompagnement à l'année, à partir de 2020. Nous l'avons ouvert dans un premier temps aux élèves inscrits au CNED. C'est à cette époque que nous avons eu besoin de nous staffer en professeurs puisqu'il nous en fallait dans toutes les matières, et sur des élèves en cursus de la seconde à la terminale. Puis, peu à peu, nous avons réalisé que la demande était telle que nous avons ouvert notre propre établissement, en 2021. Il est sous tutelle du ministère de l'Education Nationale et il nous a fallu nous structurer plus encore.Quels sont vos projets pour HackSchooling ?Aujourd'hui, nous sommes deux actionnaires principaux, avec ma femme et 16 salariés à temps plein, ainsi que des contractuels. Fin 2023, le groupe scolaire avoisinait les 800.000 euros de chiffres d'affaires - 600.000 euros en moyenne sur une année classique. Je suis fier du chemin parcouru même si je suis conscient d'une des grosses faiblesses de notre modèle : le lien social. Nous avons travaillé avec des partenaires sur la création de tiers-lieux connectés pour permettre aux élèves de se retrouver ensemble et d'échanger. Nous avons également développé un tiers-lieu physique à Avoriaz, qui permet aux sportifs de se retrouver. En local, nous avions pas mal de demandes pour avoir des cours en présentiel et c'est comme ça que nous avons racheté un collège en janvier 2022, pour un montant de 90.000 euros. Il accompagne des élèves en situation de décrochage essentiellement, ici à Vieux-Boucau. Aujourd'hui, nous avons implanté nos locaux également à Vieux-Boucau, avec l'appui de l'EuroSIMA et de la MACS. En parallèle, je travaille également sur un projet de recherche en science de l'éducation, sur cette question de l'isolement. Enfin, autre projet : demain, nous serons sans doute amenés à travailler sur le projet des 4 Vents avec Emile Mahler. Nous avons des synergies et je pense qu'il pourrait être intéressant pour nous de collaborer et de proposer des formations en interne. HackSchoolingAnnée de création : 2015Implantation : Vieux-BoucauEffectif : 16 salariés CA en 2023 : 800.000 euros

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