Deux ans après son lancement, promesses tenues pour le méthaniseur de Pardies-Pietat - Premium

Nous sommes en 2017. Théo Cassou est étudiant en école d’ingénieur, mais voudrait revenir travailler sur l’exploitation agricole familiale de Pardies-Piétat, que dirigent son oncle et deux associés. « On s’est demandé comment faire pour renforcer le modèle économique de l’exploitation », raconte le jeune homme. Objectif : faire en sorte que celle-ci dégage assez de chiffre d’affaires pour faire vivre quatre personnes au lieu de trois. « À l’époque, la méthanisation commençait à bien se développer et on a commencé à se renseigner sur le process et la faisabilité ».L’idée s’avère vite bonne : elle permet aux agriculteurs de valoriser leurs effluents d’élevage et leurs cultures intermédiaires hivernales, obligatoires sur le territoire ; « et aussi de produire une énergie renouvelable, ce qui commençait aussi à être un sujet ». La technologie est encore peu implantée dans le Béarn, les porteurs du projet vont donc se renseigner dans d’autres territoires. « On a été visiter des installations dans le Tarn, en Bretagne… raconte Théo Cassou. Et comme c’était quelque chose de nouveau et d’assez complexe, on a pris un bureau d’études. Vertigo ENR venait de se créer et nous a accompagnés tout au long du projet, en particulier sur son dimensionnement par rapport aux matières premières disponibles ». L’investissement est de 4,2 millions d’euros, financé à 30% en fonds propres (dont 21% de subventions de la région Nouvelle-Aquitaine et de l’ADEME), et à 70% par un emprunt bancaire. « C’est le Crédit Agricole qui l’a entièrement pris en charge, ils sont experts sur le sujet avec leur service propre aux ENR », précise Théo Cassou.Objectifs atteints De recours contre le permis de construire au gel du projet pendant le covid, les travaux commencent finalement en juillet 2020, et l’entrée en service se fait le 14 octobre 2021. Aujourd’hui, l’objectif initial est accompli : « Grâce à la méthanisation, on arrive à sortir les quatre revenus », se félicite l’agriculteur. Avec l’équivalent d’un temps plein pour assurer son fonctionnement - « aujourd’hui pris sur nous, mais on envisage un salarié », précise Théo Cassou - le méthaniseur produit 11,4 GWh/an, soit l’équivalent de 2.800 foyers, pour un chiffre d’affaires d’environ 120.000 euros par mois. « Le retour sur investissement devrait se faire en douze ans », prévoit Théo Cassou. « On a réussi à produire ce que l’on avait prévu, à gérer nos stocks, le process fonctionne très bien, et tous les avantages de la méthanisation se confirment », se félicite l’agriculteur. Au-delà de la production d’énergie et des revenus qui en découlent, la méthanisation permet en effet aux exploitants de récupérer un digestat « qui a une très bonne valeur agronomique », détaille-t-il. « On a diminué énormément nos besoins en engrais organiques et chimiques, tous nos apports se font maintenant avec ce digestat, précise Théo Cassou. C’est un produit qui a l’avantage d’être inodore, et qui nous permet aussi d’éviter de dépendre des fluctuations de prix des fertilisants de synthèse, qui ont varié du simple au quadruple ces dernières années. »Accélérer le déploiement de la méthanisation « Il y a aujourd’hui huit sites de méthanisation sur les Pyrénées-Atlantiques, et cinq vont sortir de terre dans les deux-trois prochaines années », annonce Frédéric Soulier, directeur territorial Pyrénées-Landes de GRDF. Le distributeur de gaz mise beaucoup sur cette technologie, dont il accompagne les projets à différents niveaux. « Selon le moment où le porteur du projet vient nous solliciter, détaille Frédéric Soulier, ça peut être pour de la mise en relation avec d’autres projets du même type pour nourrir la réflexion ; mais notre rôle essentiel est d’estimer si le réseau peut absorber le gaz produit, d’assurer le raccordement du méthaniseur à ce réseau [le coût du raccordement est couvert à 40% par les porteurs du projet et à 60% par GRDF, ndlr], puis d’accompagner jusqu’à la mise en service et au-delà. » « À l’horizon 2050, l’objectif national est que 100% du gaz consommé en France soit produit en France et de façon renouvelable, précise Frédéric Soulier. En région Nouvelle-Aquitaine, il y a un point de passage à 30% en 2030 », explique l'entrepreneur. « Il va falloir accélérer le déploiement de la méthanisation » pour atteindre l’objectif, considère-t-il. « Après, il faut se dire qu’encore en 2018, il n’y avait aucun méthaniseur sur le territoire. Aujourd’hui, les huit existants représentent un peu moins de 10% de la consommation du département. Il nous reste donc six ans pour faire plus que doubler ce nombre. »À lire également - « Il y a un vrai manque d'information » : GRDF organise une rencontre sur les solutions énergétiques hybrides « C’est devenu plus simple aujourd’hui que ça ne l’était quand on s’est lancés, considère Théo Cassou. À l’époque, il n’y avait pas de recul sur la filière. Aujourd’hui, on voit que ça marche bien, et l’acceptabilité évolue aussi. Les riverains se rendent compte que ça ne fait pas de bruit, pas d’odeur, que c’est propre. »Pour Frédéric Soulier, l’enjeu à l’avenir sera de faire émerger « un mix de projets de méthaniseurs portés par des agriculteurs », et de projets de plus grande ampleur, comme BioBéarn de TotalEnergies. « Il y a aussi la méthanisation des stations d’épuration, considère-t-il. Et maintenant, on va voir apparaitre la méthanisation des biodéchets, avec l’obligation du tri à la source pour les particuliers. C’est une meilleure valorisation que le compostage. On fait en ce moment un gros travail pour y sensibiliser les collectivités. »

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