Stéphane Delpeyrat (Bordeaux Métropole) : « nous avons encore un gros potentiel » - Premium

Au moment de la présentation de la feuille de route, il était question d’étoffer de façon substantielle les équipes autour de Stéphane Peyrichou, directeur général en charge du développement économique au sein de Bordeaux Métropole. Pourquoi ?L’idée était de passer de 20 à 40 personnes. Sur l’intelligence économique, sur le foncier, pour la foncière solidaire… il fallait plus de monde pour suivre tout ce qu’on voulait mettre en place, nous le verrons. Il ne reste que 2 ou 3 recrutements à mener. Le foncier économiqueLes services ont lancé un travail de requalification de la zone d’activités Bordeaux Nord. Comment va-t-elle être menée ?Bordeaux Nord constitue le premier test pour Bordeaux Métropole et ça s’articule autour de deux axes : repenser les aménagements publics, pour apporter de la qualité à cette zone vieillissante, et travailler de nouvelles offres immobilières publiques ou privées. Les études sont lancées. L’idée, dans l’offre foncière qui va être développée, c’est d’utiliser de nouveaux leviers de travail avec les entreprises, en utilisant des espaces déjà imperméabilisés, comme les parkings, les zones de stockage. Deux secteurs prioritaires ont été retenus par la Métropole : le parking du centre routier et le secteur sud de la zone d’activité. Ce sont des zones vieillissantes qui consomment trop de foncier et ne sont pas forcément très accueillantes : maintenant, aucune entreprise ne s’y installerait. Il y a la zone de Bordeaux Nord, Berlincan à Saint-Médard en Jalles… Au fur et à mesure, elles seront toutes requalifiées.Imaginez-vous de nouveaux leviers de valorisation de l’immobilier économique public ?Sur l’OIM Aéroparc, on a travaillé avec les entreprises et le foncier disponible a diminué de deux tiers, on s’est reconcentrés sur des projets moins consommateurs en foncier, c’est un premier levier. On a pu diviser par trois le foncier qui était envisagé, sans changer l’économie des projets : on n’est pas dans une réduction du nombre d’emplois créés, on est simplement dans une meilleure utilisation de l’espace. Sur le tiers restant à la construction, il y en a plus de 70% qui sont sur des zones déjà imperméabilisées. Autre possibilité, plutôt que de céder du foncier, on fait du bail à construction, une sorte de BRS pour les entreprises, ça permet de baisser le prix du foncier pour elles et pour nous de rester propriétaires, on va l’expérimenter à Saint-Médard en Jalles, sur Feydit, c’est quelque chose qui a de l’avenir : les entreprises n’ont pas forcément vocation à garder un foncier, pour plein de raisons comme un déménagement ou bien une cessation… on le voit avec Ford. C’est intéressant que la collectivité garde le foncier, dans la mesure où il est rare et très cher.Peut-on imaginer de manquer de foncier à vocation économique sur Bordeaux Métropole ?Il y a les friches, comme justement l’ex-Ford à Blanquefort. Début 2025, c’est la fin de la dépollution, les travaux d’aménagement ne pourront pas s’engager avant. On travaille avec Axtom et Ford pour éviter les zones commerciales ou ce genre d’offres. On veut accueillir des industriels. Sur le terrains des circuits, autour d’HDF qui a posé sa première pierre le 24 février dernier, le reliquat est en cours de commercialisation et il y a plusieurs candidatures. On peut espérer programmer les opérations d’aménagement en 2024. Au Haillan, il y a deux grandes zones qui sortent - Les Cinq Chemins et l’ex-site Thales - c’est quand même 140.000 m² de locaux. Et demain les 50 hectares de Ford. Entre ce qui est requalifié et les friches, nous avons encore un gros potentiel.Comment gère-t-on le foncier à destination de la logistique ? Il consomme beaucoup d’espace et génère en proportion moins d’emplois qu’un site industriel. Les plates-formes logistiques sont-elles les bienvenues ou doivent-elles aller ailleurs ?Les plates-formes logistiques n’étaient pas les bienvenues mais c’est une vraie réflexion : on se retrouve avec quantité de camions. On travaille sur la logistique urbaine avec l’idée d’avoir des points relais autour de la métropole pour éviter les camions qui rentrent en distribution porte-à-porte : on va disposer de hubs un peu partout pour limiter le trafic, sur la rocade et dans les villes elles-mêmes. Une feuille de route logistique va être présentée, pour rationaliser la distribution et les livraisons. C’est dans l’intérêt des acteurs économiques car avec l’organisation actuelle, les transporteurs qui sont obligés de faire du 24 ou 48 heures doivent rouler avec des camions très loin d’être pleins, avec des coûts astronomiques. Sur le dernier kilomètre, il y a l’offre de vélos cargos. Et il faut mieux utiliser le fleuve…Sans faire de jeux de mots, la logistique fluviale, ça n’est pas un serpent de mer ?Non, ça a pu l’être par le passé, mais il n’y avait pas une volonté aussi forte qu’actuellement, les problématiques n’étaient pas aussi prégnantes pour que ça mobilise tout le monde.Un mot peut-être sur le projet de foncière publique autour de l’ESS…C’est une volonté de Bordeaux Métropole de rendre plus facile le parcours immobilier des acteurs et entreprises de l'ESS, en créant un intermédiaire, gouverné avec et pour les acteurs de l’ESS. L'association ATIS a réalisé la mise sur pied des bases de la foncière solidaire, avec sa création juridique en 2021, la mise en place d'un bureau composé d'ATIS, France Active et l'ADEFIP, et le recrutement d'une chargée de préfiguration de la foncière solidaire. La spécificité de la foncière reposera sur plusieurs fonctions : un rôle d'observatoire des parcours immobiliers des acteurs ESS, un rôle d'animation et d'accompagnement des acteurs sur de la recherche de foncier en collectif, un rôle central et vital de constitution de mètres carrés en acquisition pour des projets et une activité de conseil sur la stratégie patrimoniale. Aujourd'hui, la structure travaille sur son futur règlement d'intervention foncier et immobilier, sur son modèle d'exploitation, se positionne en accompagnement-conseil sur des programmations urbaines ESS, sur l'artisanat, l'alimentation durable, la mobilité responsable… pour que fin 2023 la foncière solidaire dispose d'un nouveau statut permettant sa capitalisation par le public et le privé : le statut de SCIC (société coopérative d'intérêt collectif). Il est prévu que la Métropole y abonde d'ici la fin 2023 en parts sociales, en compagnie de co-investisseurs à l'amorçage.L’animation économique métropolitaineDans son nouveau schéma de développement économique, Bordeaux Métropole a souhaité renforcer son rôle en matière de gouvernance et d’animation. Pourquoi et comment ?Pour partager et faire vivre notre stratégie économique. En instituant deux nouvelles instances de dialogue. D’abord un comité de suivi partenarial, qui a travaillé, à la demande des acteurs économiques, sur deux sujets phares : les enjeux de la transition écologique et ceux de la liquidation judiciaire. Ensuite une instance stratégique semestrielle, pilotée par le président de Bordeaux Métropole, avec des membres de la commission de développement économique, les maires des communes et les principaux partenaires économiques, consulaires, technopôles, agences de développement économique, Région, Etat… Pour piloter l’avancement et d’éventuels réajustements de la stratégie économique de la Métropole.Comment s’articule la relation avec les collectivités locales voisines, concernant le développement économique ?On fonctionne beaucoup par des conventions définissant des objectifs, sur l’accueil des entreprises, l’aménagement, les questions de mobilités. On liste toutes les problématiques en fonction des besoins spécifiques de chaque territoire, pour travailler l’aménagement de l’espace, l’accompagnement des acteurs locaux en ingénierie, la mise en réseau avec notre tissu d’entreprises… Ensuite on fait de la dentelle selon chaque situation. De plus en plus de villes demandent à être accompagnées par Invest in Bordeaux, par Technowest…Le Conseil régional, Bordeaux Technowest, Unitec, l’agence ADI NA, Invest in Bordeaux… Il y a sur le territoire métropolitain beaucoup d’acteurs qui travaillent sur le développement économique. Quelle est la spécificité de l’action de Bordeaux Métropole ?C’est d’abord notre proximité avec les entreprises. Et aussi l’aménagement : avoir une offre foncière de qualité et travailler les mobilités. Et puis on a relancé le réseau des développeurs économiques : 24 communes sur 28 y participent. La porte d’entrée des entreprises, ce sont souvent les villes. Ensuite, c’est une coordination en fonction de chacun. Avec Invest in Bordeaux, on travaille sur l’équilibre. Pour la première fois, il y a à peu près le même nombre de créations d’emplois autour de la métropole que dans celle-ci. C’est donc beaucoup plus qu’avant, on a un effet de basculement. Technowest se développe de plus en plus, sort de la métropole et rééquilibre les projets : son action se voit jusqu’à Libourne mais aussi Agen.Les réalisations de demainJuste à côté de l’Aéroparc est prévu Tarmaq, la Cité des savoirs aéronautiques et spatiaux. Le projet va bouger, n’est-ce pas ?Le projet est né d’une volonté de la Région Nouvelle-Aquitaine, de Bordeaux Métropole et de la Ville de Mérignac. Oui, ça ne sera pas à l’endroit initialement envisagé mais on a trouvé un foncier près de l’aéroport et qui ne pose pas de problèmes. On va pouvoir démarrer. C’est un peu moins grand, on réorganise la façon dont les espaces verront le jour mais ça ne change ni l’esprit ni l’ampleur du dossier. Et ça restera à proximité d’Aéroparc, où il y a un vrai développement autour du “new space”. Jusqu’à présent, ça allait plutôt sur Toulouse et Paris. On le voit avec l'arrivée d'Exploration Company à Mérignac, qui est en train de donner des idées à beaucoup de gens. Ils n’avaient pas forcément l’image “Bordeaux spatial” mais ils sont en train d’arriver. Il y a l’explosion des drones. Sur l’aspect incendie, ils peuvent avoir un rôle très important de surveillance, idem sur le contrôle des réseaux d’eau, le repérage des fuites… Tout un business très important de surveillance-sécurité.Autre sujet majeur de la mandature en cours : l’OIM Arc Rive Droite. C’est un très vaste espace. Quelle est la cohérence ? Quelle sera la coloration de cette zone ?C’est d’abord du pragmatisme, pour amener plus d’activité économique sur ce secteur. On veut lier ça à la nouvelle économie de la transition énergétique et écologique, les nouveaux matériaux… c’était un souhait des élus. Ensuite, on essaye d’être cohérent en fonction des projets, qu’on oriente vers telle ou telle zone. Mais certaines entreprises visent un endroit en particulier, pour des raisons qui leur appartiennent. On ne va pas bloquer un projet sous prétexte que ce n’est pas la thématique de la zone. Des sujets émergent. Bordeaux Métropole est propriétaire depuis novembre dernier du site Lafon à Bassens, dont les activités ont été déplacées à Saint-André de Cubzac. On a confié la mission de reconversion à Technowest. En lien avec eux, un centre de ressources permettra d’accueillir des entreprises. A Artigues, à côté de l’aire de grand passage, nous voulons installer sur 6 ou 7 hectares le projet Woodrise ainsi qu’une école d’ingénieurs. Le projet ZIRI de Bordeaux Technowest et le GIP GPV Rive Droite bénéficieront également de bâtiments métropolitains pour s’installer sur l’OIM.

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