Mise en concurrence des trains régionaux : Alain Rousset explique ses choix
TER aux abords de la gare de Périgueux. Crédits : Région NA
En amont de la séance plénière des 12 et 13 juin au cours de laquelle sera soumis au vote le renouvellement du contrat liant SNCF Voyageurs avec la Région Nouvelle-Aquitaine, le président de cette dernière, Alain Rousset, a expliqué ce matin ses choix : durée, modalités, objectifs…
« Pendant les 7 ans de cette nouvelle convention, on engagera progressivement la mise en concurrence. J’ai fait le choix de ne pas jouer à Ponce Pilate et de ne pas aller jusqu’à 10 ans. Plusieurs raisons à cela. Une telle durée pourrait nous exposer à un retour de bâton juridique de la part de l’Europe, de l’Etat voire des concurrents de la SNCF. Mais aussi pour maîtriser cette mise en concurrence : à partir du 1er janvier prochain, on ne pourra plus conventionner de gré à gré : si la nouvelle convention n’est pas signée d’ici là, il faudrait mettre en concurrence en une seule fois, ce qui pourrait mettre en péril la SNCF elle-même », pose d’emblée Alain Rousset. La mise en concurrence se fera progressivement, avec un découpage du réseau en quatre lots. Poitou-Charentes ouvrira le bal (démarrage début 2027 au plus tôt), puis Périgord-Limousin et le bassin bordelais (2028-2029) et enfin le sud Aquitaine pour finir (2029-2030). Un découpage qui s’est fait en concertation avec la SCNF, sur des critères de cohérence, de connexité, de taille suffisante mais pas trop massive non plus, permettant la présence à distance raisonnable d’un centre de maintenance des rames…
Les 4 lots du réseau TER qui vont être ouverts à la concurrence. Crédit : Région NA
La législation européenne prévoit en effet un délai incompressible de 38 mois entre la décision d'ouverture à la concurrence et la circulation des trains : environ un an d’information au niveau européen, une autre année pour rédiger le cahier des charges de l’appel d’offres et choisir le lauréat et une dernière année pour préparer la mise en place opérationnelle avec le nouveau délégataire. Les ambitions sont posées. Alors que le trafic des trains régionaux est passé en quelques années de 60.000 à 90.000 voyageurs quotidiens, le nouvel objectif à horizon 2030 s’élève à 120.000 par jour. Une hausse de 30% qui supposera de rajouter 22.000 trains par an, avec une meilleure régularité : baisse de 20% des retards et 20% de suppressions de train en moins. Le tout « en intégrant le RER métropolitain et le RER basque ». Des gros moyens seront mis en œuvre. Sur les 7 années, il est évoqué 500 millions d’investissements et 2,6 milliards d’euros au titre du fonctionnement. « La convention a été âprement négociée », commente Alain Rousset, qui évoque un prix au kilomètre de 21 euros, contre 25 euros dans la précédente convention. Mais aussi « une clause de retour à bonne fortune, si la marge de la SNCF dépasse 3%. La Nouvelle-Aquitaine est la seule à avoir cette clause en France ».
La question financière
Exploiter le réseau des trains express régionaux en Nouvelle-Aquitaine n’est pas une partie de campagne. 314 gares, près de 200 rames à faire circuler sur plus de 3.400 km de voies. « C’est le réseau le plus étendu mais aussi le plus vétuste », souligne Alain Rousset. Et de rappeler la convention d’1,5 milliard (dont 900 millions d’euros de la Région) signée avec Jean-Baptiste Djebbari quand celui-ci était ministre des Transports, pour régénérer les lignes de dessertes fines du territoire. « Et j’attends avec impatience le Contrat de Plan Etat-Région», avertit Alain Rousset. Justement, le préfet de région vient tout juste de recevoir le mandat de la Première ministre pour engager avec le Conseil régional la préparation du volet mobilité du CPER pour la période 2023 à 2027. « Ce volet couvre les projets d’investissements dans les domaines ferroviaires, des routes nationales, des services express régionaux métropolitains, des Grands ports maritimes de Bordeaux et de la Rochelle et, pour la première fois, les contrats de plan incluront un soutien financier aux véloroutes », déroule-t-on à la préfecture. Dont le communiqué insiste : « Ce mandat marque un effort très significatif de l’Etat en Nouvelle-Aquitaine, puisqu’il s’élève à 747 millions d’euros, soit 150 millions par an en moyenne, contre 99 millions d’euros par an au CPER. » Une question financière qui sera au centre de nombreuses discussions avec l’Etat. Alain Rousset indique ainsi que selon une étude commandée à ses services, « la Région est la plus tabassée de toutes les collectivités », graphique à l’appui.
Source : Conseil régional de Nouvelle-Aquitaine
Et de dénoncer le fameux « effet ciseau » qui touche la Nouvelle-Aquitaine : d’une part hausse des engagements (et donc des dépenses) et d’autre part baisse des ressources. Et d’indiquer que le service de la dette a représenté 220 millions d’euros en 2022, avec une capacité de désendettement qui atteint désormais 7 ans, proche de la cote d’alerte. « Les Régions n’ont pas d’autre choix que de s’endetter. Bercy considère qu’on a encore du gras, alors qu’on est à l’os » déplore le président Rousset.