Accusation de subventions détournées au profit de Ryanair : « Nous n’avons pas la même analyse que la Chambre régionale des comptes » - Premium
Un rapport de la Cour régionale des comptes sur les années 2017-2018 souligne que l'aéroport de La Rochelle-Ile de Ré est déficitaire de plus de 3,73 millions d’euros sur cette période.
Dans un rapport datant du 31 mai 2023, la Chambre régionale des comptes Nouvelle-Aquitaine accuse la CCI, propriétaire de l’aéroport La Rochelle-Ile de Ré, d’avoir détourné des subventions au profit de la compagnie aérienne Ryanair via Charente Tourisme. Olivier Amblard, directeur général de Charentes Tourisme, réagit.
La Chambre régionale des comptes (CRC) Nouvelle-Aquitaine a publié, mercredi 31 mai 2023, un rapport peu favorable sur la gestion de l’aéroport La Rochelle-Ile de Ré par la CCI de Charente-Maritime. Le rapport de 50 pages détaille un contrôle effectué durant les années 2017 et 2018 et souligne un aéroport déficitaire de plus de 3,73 millions d’euros sur cette période.
Le déficit proviendrait en partie de la faiblesse de l’activité de l’aéroport et « d’importantes sommes versées aux compagnies aériennes pour maintenir ou développer le trafic commercial ». Et, dans ce rapport, est noté que la CCI a « subventionné Charentes Tourisme, comité du tourisme aujourd’hui commun aux deux départements charentais, à hauteur de 550 000 € par an, reversés ensuite à la compagnie Ryanair pour la réalisation de prestations marketing, est-il écrit. Pour la chambre, qui a notamment constaté l’absence de contrôle sur ces prestations pour partie inexistantes, l’objet réel de ce montage est de dissimuler l’attribution par l’aéroport d’un financement supplémentaire à cette compagnie, en méconnaissance de la législation européenne sur les aides d’État. » Olivier Amblard, directeur général de Charentes Tourisme, s’explique.
Quelle est votre réaction face à ce rapport ?
Nous n’avons pas la même analyse que la Chambre régionale des comptes. La CRC a vu l’entreprise low cost, nous on a vu la société de communication filiale de Ryanair capable de faire la promotion de notre territoire.
La CCI a attribué une subvention de 550 000 € à Charente Tourisme, à quoi était destiné cet argent ?
À développer le marché international. Nous avons donc fait un cahier de charges et nous avons fait un appel d’offres européen car notre but était d’attirer une clientèle étrangère.
Quels étaient vos critères ?
Nous voulions un opérateur avec des outils numériques excessivement puissants et capable de s’engager sur des résultats et non des moyens. Très honnêtement, on pensait à des transporteurs. C’est logique, car le transporteur peut s'engager sur des résultats puisqu’il émet des tickets et il est capable de comptabiliser. Mais nous avions aussi d’autres opérateurs en tête, comme Booking par exemple, mais ils n’ont pas répondu à l’appel d’offres. Un certain nombre d’agences ont répondu, bien sûr Ryanair, et compte tenu de l’analyse des offres, c’est Ryanair qui a été retenue.
Ryanair a donc perçu 550 000 € par an durant trois années ?
550 000 € c’est le budget maximum, Ryanair a reçu une somme au prorata du nombre de touristes arrivés à La Rochelle. C’est ça qui est intéressant, et c’est ce que l’on a répondu à la CRC. En période de Covid, quand il n’y avait aucun avion, il n’y avait donc pas d’arrivée de clientèle étrangère, donc pas de paiement. Si on était passé par une agence de com, elle aurait eu des frais et nous aurions sûrement dû payer ces sommes, même s’il n’y avait pas eu de clientèle.
Dans son rapport, la CRC constate « l’absence de contrôle sur ces prestations pour partie inexistantes ». Qu’en dites-vous ?
Ils ont été surpris que, sur le site de Ryanair, qui rappelons-le est un des sites les plus consultés au monde, la même photo de La Rochelle apparaisse sur les bannières ou les pop up. J’ai expliqué à la CRC que je pouvais effectivement envoyer d’autres photos mais on ne va pas changer l’offre de La Rochelle, ce qui est emblématique, ce sont ses deux tours. Paris communique bien sur la tour Eiffel… Puis, ils ont trouvé que l’on n’était pas assez regardant sur les analyses des campagnes marketing que Ryanair faisait. Mais mon contrôle se faisait sur les résultats et non sur la façon dont ils y arrivaient car ça n'était pas mon critère. Je ne regardais pas le nombre de clics sur une bannière mais bien le nombre d'arrivées de touristes à La Rochelle.
Combien de touristes ont été apportés via la campagne Ryanair ?
Ça se chiffre à plus de 100 000 touristes arrivés par an.
Que représente ce budget de 550 000 € au regard du budget de communication global de Charente Tourisme ?
C’est un budget important. Le budget global de Charente Tourisme, à la fois l’Office de tourisme des Vals de Saintonge et le fait que l’on soit sur deux départements, c’est un budget total de 6 millions d’euros. Le volet communication représente environ 700 000 € donc c’était un gros budget.
Pourquoi était-ce important d’investir sur les marchés étrangers ?
Notre clientèle est composée de 85 % de Français et de 15 % d’étrangers. D’autres départements sont plutôt à 20-25 voire 30 % de part de clientèle étrangère. Donc notre volonté était de gagner des parts de marché à l’international parce que l’on sait que les clientèles étrangères ont tendance à davantage dépenser que la clientèle française. Il y a donc un intérêt économique. Puis, cette clientèle internationale est complémentaire de la française par rapport notamment au calendrier des vacances scolaires.
