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Loyers commerciaux : « La balle est dans le camp du Sénat », pour le député Thomas Cazenave

Écosystème
lundi 05 juin 2023

Les loyers peuvent représenter jusqu'à 20% des charges pour les commerçants. Photo d'illustration : Adobe Stock Jon Chica

Le Sénat doit débattre cette semaine du projet de loi pour le plafonnement des loyers commerciaux. Portée par le député girondin Thomas Cazenave, cette mesure vise à freiner la hausse de l’indice des loyers commerciaux (ILC) à 3,5% jusqu’au premier trimestre 2024. Si la proposition de loi n’aboutit pas, cet ILC dépassera les 6% au 1er juillet prochain. Explications.

C’est un point presse matinal qui s’est tenu, un peu dans l’urgence, ce lundi matin. À l’initiative de Thomas Cazenave, député de la 1re circonscription de Gironde, plusieurs représentants du commerce étaient réunis autour de la table. L’objet du jour : la proposition de loi « maintenant provisoirement un dispositif de plafonnement de revalorisation de la variation annuelle des indices locatifs ». Si l’intitulé peut sembler barbare, le sujet préoccupe depuis plusieurs mois les commerçants girondins, néoaquitains et plus globalement, français. Car le 1er juillet prochain, si rien n’est fait, l’indice des loyers commerciaux (ILC) passera de 3,5% à 6,29%. Cet ILC est une somme d’indices de consommation, et les baux commerciaux sont majoritairement indexés à ce taux. « En août dernier nous avions réussi, toutes fédérations confondues, à faire verrouiller cet ILC à 3,5% dans le cadre de la loi “Pouvoir d’achat” », expliquait en avril dernier à Placéco David Ducourneau, vice-président de Bordeaux mon commerce et de Commerçants et Artisans des Métropoles de France.

Dans un communiqué, six fédérations nationales de commerçants tiraient ainsi la sonnette d’alarme, à quelques mois de la fin de ce dispositif. Des inquiétudes entendues par Thomas Cazenave, auteur et rapporteur du texte de loi visant à plafonner l’ILC à 3,5% jusqu’à la fin du premier trimestre 2024. Seraient concernées les TPE, les PME, et les ménages avec le plafonnement de l’indice de référence des loyers (IRL). « Nous n’avons pas inclus les ETI et les grandes enseignes, demande pourtant formulée par les fédérations, car nous avons souhaité concentrer les mesures sur ceux qui n’ont pas les moyens de négocier, explique le député girondin. D’autant que pour certaines ETI, ce plafonnement serait un effet d’aubaine. »

Voter ce texte avant le 30 juin

Dans la nuit de mercredi à jeudi derniers, cette proposition de loi a été votée en première lecture à l’Assemblée nationale, à 259 voix pour et 93 voix contre, sur les 577 sièges de l’Assemblée. « Maintenant, la balle est dans le camp du Sénat, qui doit examiner le texte mardi et mercredi en commission, reprend Thomas Cazenave. C’est important car sa rapporteuse, Dominique Estrosi-Sassone [NDLR, groupe LR] commence par déposer une motion de rejet. On a tout intérêt à rappeler pourquoi ces dispositifs sont indispensables, et que nous devons les voter avant le 30 juin. »

Selon Bernadette Hirsch, présidente de la Fédération nationale d’habillement de l’habillement de Nouvelle-Aquitaine, les loyers commerciaux peuvent ainsi représenter jusqu’à 20% des charges pour les commerçants. « Pour bien faire, un loyer doit représenter 10% des charges. Sinon c’est tout à fait suicidaire », martèle-t-elle. Georges Simon, fondateur de l’enseigne Jane de Boy et président de Bordeaux mon commerce, renchérit : « Les commerçants ont déjà commencé à rembourser les PGE, les prêts garantis par l’Etat. Si on ajoute à cela les bilans des années passées, avec les Gilets jaunes, le Covid-19, c’est un déséquilibre financier certain. Et aujourd’hui, dans un grand nombre de rues bordelaises, on constate de la vacance car l’équilibre des commerces n’est plus viable. » Selon lui, à l’échelle française, les chiffres des commerces ont chuté le mois dernier de 10%, et le trafic, de 12%. « En région c’est plutôt -15%, renchérit le commerçant. C’est généralisé, il y a une réelle diminution de la consommation. »

Le prix des loyers, problème de fond ?

La proposition de loi telle qu’elle est présentée doit encore, si les sénateurs la votent, passer entre les filets du Conseil constitutionnel. Car, précise Thomas Cazenave, « cette mesure vise à s’ingérer dans la liberté contractuelle et le droit de propriété. Lorsque le législateur porte atteinte à ces principes, le Conseil constitutionnel regarde le motif d’intérêt général, et si la mesure est proportionnée. C’est pour cela que j’ai refusé le gel des loyers, et que la mesure prend fin en 2024 ». Le député précise qu’à ce moment, si l’inflation reste dynamique, « on se reparlera » pour trouver une solution. Mais finalement, le problème de fond est peut-être le prix des loyers. « Disons que les loyers sont calculés pour être à leur maximum, souligne Georges Simon. Ils ne laissent aucune place à une variation, et c’est un réel sujet. » Selon les derniers chiffres de la CCI Bordeaux Gironde, le taux de vacance à Bordeaux est d’environ 4,5%. Stéphane Loniewski, vice-président de la CCIBG et de la CPME Gironde : « On ne peut pas tout gérer par la loi. Mais la contraction de l’économie doit faire prendre conscience aux bailleurs que s'ils veulent conserver leurs locataires, il faudra faire des efforts. C’est une négociation, et il faut que ça se fasse. » En attendant, il y a fort à parier que les représentants des commerçants scruteront avec attention les discussions au Sénat, puis le ping-pong avec l’Assemblée nationale.

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