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Crise du logement : front uni de la filière régionale qui expose ses propositions et solutions

Écosystème
mercredi 04 octobre 2023

Front régional des professionnels de l'immobilier. Crédit : DM

Les acteurs régionaux du logement parlent de concert pour demander aux pouvoirs publics « une véritable politique du logement ». Au-delà du constat et des perspectives inquiétantes, ils formulent propositions et solutions concrètes « pour sortir de cette impasse sociale et sociétale d’ampleur ».

« Le droit au logement est un droit économique et social qui doit être préservé impérativement », pose en préambule Mathias Saura, président du Medef Gironde, pour qui la raréfaction des logements « entraîne pour notre territoire une baisse d’attractivité qui freine le développement de nos entreprises et de l’économie locale ». Jérôme Banderier, président de l’UNAM (Union Nationale des Aménageurs) Nouvelle-Aquitaine, évoque « un grippage complet du parcours résidentiel. Il y a un mur du financement, un dossier sur deux n’est pas financé ». Et de théoriser : « les banques financent un capital, qu’il s’agisse d’une passoire thermique ou d’un logement neuf éco-responsable. Elles devraient financer un usage. » L’UNAM appelle ainsi à assouplir le crédit et propose « une mesure fiscale immédiate, puissante et de courte durée : l’exonération temporaire, sous conditions, des droits de succession pour l’acquisition de logements neufs ».

« Nous faisons le même constat, le système est grippé », abonde Frédéric Lesvigne, président de la FNAIM Gironde, qui pointe la conjonction de deux facteurs. D’une part une fiscalité « contre-productive » sur la location selon le type de logement : aucun abattement pour un logement vide servant de résidence principale, 50% pour un meublé et jusqu’à 71% pour un meublé de tourisme. « Plus l’utilité sociale est grande et plus l’imposition est forte », pointe-t-il avant d’appeler à la création d’un statut du bailleur privé. Et d’autre part « un échéancier écologique intenable », en matière de délai comme de financement, soulignant les restrictions sur la location des logements classés en catégories énergétiques basses induites par la loi « Climat et résilience » dont il demande un report du calendrier. « A l’heure où nous manquons crucialement de logements, le rythme d’exclusion des passoires thermiques notées de E à G pousse les propriétaires bailleurs à vendre plutôt qu’à effectuer les travaux de rénovation nécessaires à leur mise en conformité », fait valoir Pierre Vital, président de la FPI Nouvelle-Aquitaine, qui relaye une donnée projetée par l’Observatoire national de la rénovation énergétique : cela conduirait au plan national au retrait du marché locatif de 5,2 millions de logements à horizon 2034. La FPI Nouvelle-Aquitaine estime donc indispensable de flécher des aides vers les opérateurs privés, et non plus seulement vers les particuliers, « sous forme de baisse de TVA sur les travaux ou via des subventions aux opérations sous condition d’atteindre d’objectifs environnementaux ».

Conséquences en cascade

Si, à l’échelle de la Nouvelle-Aquitaine, les classes les plus énergivores (F et G) représentent moins de 4% du total du parc, « la transformation des autres classes est un enjeu majeur », reprend Muriel Boulmier, président de l’Union régionale HLM en Nouvelle-Aquitaine qui veut « remettre sur le métier une loi Climat et résilience qui électrise le débat, tout n’est pas à jeter mais il faut l’adapter à la vérité du pays et des concitoyens ». Sophie Hopensztand, au titre de l’ARIA (Association régionale de l’ingénierie d’Aquitaine), déplore pour sa part que la durée moyenne de construction d’un bâtiment peut atteindre six ans, contre trois avant le covid. « L’empilement de normes ne doit pas nous éloigner du but : produire des logements », grince-t-elle. Corollaire de ce temps de plus en plus long : une augmentation de la demande non pourvue dans le parc social, estimée à 172.000 aujourd’hui en Nouvelle-Aquitaine (139.000 en janvier 2020), dont 47.000 sur Bordeaux Métropole (42.000 début 2020) où la production annuelle de logements est passée de 10.500 en 2019 à 8.200 en 2022.

Sophie Hopensztand rappelle l’équation financière : « la construction représente 65 à 70% du prix d’une opération immobilière, le reste c’est le coût du foncier ». Face à constat, quelques leviers sont suggérés : le déploiement du BRS (bail réel solidaire), mettre les grands fabricants et distributeurs de produits et matériaux de construction autour de la table…

Eviter une génération sans toit ni loi

La crise du logement « est sans aucun doute un obstacle au recrutement », abonde Cécile Despons, présidente de la CPME Gironde. Et de poursuivre « nos étudiants peinent à trouver un logement pour poursuivre leurs études, 50% d’entre eux envisagent dès le 1er semestre d’interrompre leur cursus universitaire et plus de 12% d’entre eux abandonnent, faute de logement ». Et selon une enquête de conjoncture de la CPME, un salarié sur 10 renoncerait à donner suite à une offre d’emploi, faute de logement à proximité. Appelé à synthétiser, Franck Schikowski, président Pôle Habitat FFB Gironde, appelle « à des mesures urgentes et concertées » : la création d’un statut du bailleur privé, un report du calendrier de la loi « Climat et résilience », un PTZ étendu, des mesures fiscales immédiates pour faciliter l’accès au logement. « Nous devons éviter une génération sans toit ni loi », conclut-il. Concernant la filière elle-même, les conséquences sur les effectifs salariés de la filière régionale, peu ou prou contenues cette année, « vont être sensibles à partir de 2024 », avertit Pierre Vital pour qui « ça va être pire de façon certaine en 2025 ».