Editions Fricker. La petite maison d'édition qui monte. - Premium

Itinéraire d’un enfant passionné. Rien ne prédestinait Jean-Loup Fricker à ce statut d’éditeur. Imprégné depuis l’enfance de pyrénéisme et d’Occitan, diplômé d’agronomie à Toulouse, il commence sa carrière dans la génétique végétale en Colombie avant de rentrer en France et de passer par l’ESSEC pour devenir trader dans les matières premières. Après quelques années au rythme de ce genre de métier, il plaque tout et crée une galerie d’art contemporain à Paris. Mauvais alignement des planètes puisqu’il ouvre son établissement le soir même de l’invasion du Koweït. Le monde est instable et le marché de l’art s’effondre. « Avec le recul, je considère que le métier de galeriste s’apparente à un statut social. Ceux qui l’exercent ont les poches profondes, sont liés à des réseaux. Quand les choses vont mal, on sort un Modigliani de sa cave, on le vend et on est tranquille pour deux ans. Je n’étais pas dans le cercle. Je me suis donc ruiné et éreinté, mais sans aucune amertume. C’est à cette époque que, pour me refaire, j’ai commencé à vendre des parties de ma collection, non pas des Modigliani, mais les affiches anciennes que j'avais acquises, collection que je m’étais constituée depuis mes 18 ans dans les brocantes. À l’époque, cela n’intéressait personne et on les achetait pour peu rien. C’est à l'occasion de mes voyages dans le monde entier, à l’époque où j’étais dans le trading que je l'ai enrichie. Lautrec, Bonnard, Picasso, Cassandre, Mucha… » L’affiche : « Une forme d’art sous contrainte » Jean-Loup Fricker a très vite compris combien l’affiche est un support de communication, mais avec un contenu artistique qui lui donne sa valeur. « L’affiche est au cœur de multiples démarches de communication : l’automobile, l'aviation, le voyage, le spectacle, l’industrie, la publicité, l’art, la politique. Rien que dans ce domaine, celui de la propagande, les affiches de l’ex URSS, de mai 68, celles de la guerre d'Espagne et des résistances, ou au contraire, de Pétain et Mussolini, étaient et demeurent très recherchées. Finalement, je trouve que ce média, c’est une forme d’art sous contrainte et c’est en cela que c’est extrêmement intéressant. » Si la galerie est à la peine, la vente d’affiches anciennes à Paris mais aussi à l’étranger prend de l’essor. Christies, Sothebys, Drouot ( Cornette de Saint-Cyr) pour les salles de ventes les plus prestigieuses, mais aussi les marchands anglais, américains, japonais, suisses. Le succès du marché tient, selon Jean-Loup Fricker, à une différence d’approche de l’art entre sa version académique, liée aux nombreux artistes majeurs européens dans l’histoire, et une conception des pays qui n’ont pas ce passé. « Aux États-Unis, il n’y a pas cette dichotomie entre arts majeurs et arts mineurs. Tous les supports pour communiquer son art sont bons. Pas de compartiment entre art et publicité, pas de jugement de valeur. On le voit avec l’importance de magazines, comme le Newyorker par exemple. Toute ma culture artistique s’est construite à travers ma collection d’affiches. »De la reproduction à la création Désireux de revenir en Béarn, région qu'il n'a jamais vraiment quittée et avec laquelle il a toujours continué d’entretenir des liens, l’éditeur a commencé à reproduire certaines affiches de sa collection dont certaines sont encore à son catalogue. Nombreuses sont les affiches de tourisme à commencer par celles vantant les Pyrénées à la fin du 19e ou du début du 20e siècle. À force de collectionner, de s’impliquer dans le négoce, Jean-Loup Fricker acquiert un solide savoir-faire de la conception des affiches : organisation de l’espace, typologie des visuels, polices de caractère. « On se forme l’œil, en quelque sorte et ceci m’a conduit, il y a une dizaine d’années, à composer mes créations. Je me suis associé avec un ami illustrateur très talentueux pour créer un studio qui s’appelle "gazelle productions" et qui est le bras créatif de la maison d’édition. C’est un travail d’équipe. Je choisis les thèmes, je conçois, je visite des lieux, je compose (je choisis des points de vue et il dessine et colore. » Le processus de création est exigeant. Certaines affiches nécessitent deux mois d’échanges avant d’être validées. Le secret réside dans la qualité, de la conception et de l’exécution, car la maison d’édition cherche à travailler avec des imprimeurs très pointus sur des papiers de qualité et respectueux de l’environnement. Une petite entreprise qui ne connaît pas la crise Les éditions Fricker, c’est une aventure familiale. D’un côté, la conception et de l’autre, le négoce avec des modes de distribution très classiques qui conduisent à sillonner la France à la recherche de sujets et de distributeurs de l’autre. Les librairies ou boutiques de décoration sont une première cible. Les Offices de Tourisme en sont une autre. C’est ce qui explique qu’au catalogue (en ligne) de 160 modèles en plusieurs formats, on trouve naturellement des affiches sur les Pyrénées, les Landes ou le bassin d’Arcachon, mais aussi la Bretagne, Paris, Barcelone ou Rome. Sans faire de bruit et méthodiquement, la maison d’édition prend de l’essor et son chiffre d’affaires croît systématiquement comme sa notoriété pour s’approcher des 500.000 euros. Jean-Loup Fricker sait qu’il n’est pas encore assez présent en ligne et c’est dans ses objectifs d’améliorer son site web pour renforcer ce mode de distribution. C’est même l’objectif de cette année.

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