« Pour Safran, l’électrification n’est pas vraiment un risque, mais une opportunité de se réinventer » - Premium

Comment un motoriste comme Safran Helicopter Engines s’adapte-t-il à la décarbonation de l’aviation ? Fabien Mercier Calvairac : Nous avons trois axes de travail. Tout d’abord, continuer de réduire de manière drastique la consommation de nos turbines à gaz conventionnelles. Ensuite, se concentrer sur les alternatives au pétrole en regardant ce qui peut être fait en matière de carburant de synthèse ou carburant durable. Sur ce point, d’ailleurs, la problématique va au-delà de Safran, c’est celle des quantités à disposition, car tout n’ira pas pour l’aéronautique. Le troisième volet, c’est tout ce qui est lié à l’hybridation. Nous sommes en train de monter en puissance sur l’électrification de nos turbines à gaz, ce qui permet de réduire considérablement leurs émissions de CO2. Pierre Escourrou : Ces trois axes sont ceux de la stratégie du groupe Safran, et aussi de Safran Helicopter Engines au niveau local. Au Green Aero Days, sont présentées des solutions destinées à l’aviation générale mais qui peuvent également s’appliquer aux missions hélicoptères. FMC : Le terme de « missions hélicoptères » est important : les évolutions technologiques font qu’à l’avenir, un certain nombre d’aéronefs pourraient accomplir les missions des hélicoptères. C’est pour ça que l’on voit ici, aux Green Aero Days, des aéronefs avec des architectures nouvelles, des avions à décollage court ou vertical. Nous nous positionnons aussi sur ce marché là.« L'électrification arrivera par des projets de petits aéronefs » Beaucoup de projets expérimentaux sont mis en avant aux Green Aero Days, certains extrêmement originaux, défiant même la classification entre avion et hélicoptère… PL : Oui ! Et Safran est partenaire d’un certain nombre d’entre eux. FMC : la plupart de ces startups viennent nous voir, ou nous allons les voir, pour essayer d’évaluer ensemble ce qui pourrait être le meilleur choix de motorisation par rapport à la mission. Aura, VoltAéro, Elixir Aircraft, Ascendance… Safran travaille avec eux.PL : Quand ils viennent nous voir, leurs questions vont au-delà d’une simple question de puissance de moteur ; ce sont des questions ouvertes sur la pertinence de leur architecture et de la propulsion qui va avec, et nous leur apportons notre expertise. FMC : Nous sommes tous persuadés que l’électrification des aéronefs arrivera par le bas, par des aéronefs de petite taille, qui demandent moins de puissance. Pendant notre travail avec Airbus et Daher sur EcoPulse, on a pu constater que l’intégration de systèmes électriques était compliquée, surtout sur des modèles hybrides, quand il faut faire passer de la haute puissance électrique près de réservoirs de carburant… Même si on arrive à concevoir ce genre d’aéronefs, on préfère commencer en concevant des projets légers. D’où notre présence ici, et notre sponsoring de l’événement.« La force des grands groupes, c’est de maîtriser le chemin vers la certification »Dans l’automobile, la massification de la propulsion électrique a eu comme effet de rebattre totalement les cartes en défaveur des constructeurs historiques. En tant que leader de la motorisation, craignez-vous que ce scénario se reproduise dans l’aviation ? PL : La différence entre le marché automobile et le nôtre, c’est la certification. Certifier un appareil, c’est quelque chose de complexe, c’est un savoir-faire, qui se base sur l’expérience. La force des grands groupes, c’est de maîtriser le chemin vers la certification. Donc, pour Safran, l’électrification n’est pas vraiment un risque, mais une opportunité de se réinventer. Cela implique-t-il une transformation de votre métier ?PL : Dans les faits, il a déjà changé. Nous avons aujourd’hui dans nos équipes beaucoup plus d'experts en électrique de puissance, qui sont arrivés ces dernières années pour développer ces savoir-faire. Ce sont notamment des gens qui arrivent du monde du ferroviaire ou de l’automobile électrique. D’ailleurs, Fabien vient de PSA, où il travaillait sur les voitures électriques. Nous avons des gens d’Alstom Tarbes qui sont venus chez nous et qui portent aujourd’hui ces projets-là. Le vivier de compétences existe déjà, et quand des startuppeurs viennent, ils voient que l’on sait de quoi on parle. FMC : La force du groupe Safran, est que l’on peut s’appuyer à la fois sur le groupe central et son bureau d’études pour faire aussi de la R&D, mais aussi toutes les branches de Safran dont Safran Electrical & Power [filiale du groupe consacrée aux systèmes électriques, ndlr]. C’est une force incroyable. PL : Dans le même temps, Safran Helicopter Engines est leader sur son marché. Depuis 40 ans, nous avons un savoir-faire sur le pilotage numérique de la puissance des moteurs. On a un bureau d’études sur le sujet d’une centaine de personnes depuis une trentaine d’années. Et c’est un sujet qui est d’autant plus pertinent avec la propulsion électrique, que la distribution de puissance est beaucoup plus accessible avec des moteurs électriques que thermiques. FMC : Ce sont des compétences uniques qui n'existent que chez Safran Helicopter Engines, et dans l’ensemble des sociétés de Safran.Safran Helicopter EnginesChiffre d'affaires : 1.314.368.000 euros (2021)4.127 employés (2022)

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