Abelio-Propreté veut changer l'image de son métier - Premium

11 ans de banque privée chez BNP Paribas, cela aide à se projeter, surtout quand on est au contact quotidien d'entrepreneurs qui font entre 2 et 50 millions de chiffre d'affaires. Refinancement de comptes courants, ouverture du capital, fonds de développement, montages juridiques, défiscalisation...Avec son épouse Anaïs, cadre dans une agence de publicité japonaise à Paris, Xavier Soubeyran décide de passer le cap. Ils rachètent une PME du secteur propreté, ASM et découvrent, derrière les bons chiffres du bilan, un manque total d'organisation, d'encadrement pour gérer les équipes, et un manque d'informatisation. Après trois années de « ménage » et de structuration, Xavier et Anaïs Soubeyran rachètent une deuxième entreprise en 2019 à Lons, Antene. Durant deux ans, ils alignent le savoir-faire des équipes, mixent les matériels et finissent en 2021 par fusionner les deux entités pour créer Abelio-Propreté. « On a changé d'échelle en passant la certification Qualipropre et en se lançant dans le parcours RSE de la fédération ». Encadré par l'AFNOR, cette démarche débute par un autodiagnostic (18 critères inspirés de l'ISO 26000 propres à la filière) validé par une note d'auditeur. Le processus sera achevé avec une labélisation en octobre prochain. « On n'est pas comme les autres »L'intention du couple est claire. Changer l'image du secteur. Pour Xavier Soubeyran, « les entreprises de nettoyage ont, je ne sais pourquoi, une image dégradée. Un peu comme si, sur cette filière, on ne pouvait pas être structuré, cadré, avec des fonctions support, de l'organisation, des solutions digitales performantes. Moi qui ai connu au sein de BNP Paribas une structure perfectionniste autour de la satisfaction client, j'ai eu du mal à me faire à ce cliché. C'est la raison pour laquelle, dès le départ, j'ai voulu changer d'horizon, passer du Word/Excel à un environnement professionnel. Dans ce métier, ce sont souvent d'anciens techniciens qui ont fini par créer ou reprendre leurs entreprises et ils n'ont pas de vision.» Prendre le prix comme seule variable d'ajustement, s'aligner sur les gros pour prendre des marchés, du volume, n'est pas la bonne stratégie pour l'entrepreneur. « Pour notre part, nous ne sommes pas les moins disant mais les mieux disant. Nous vendons nos prestations au juste prix, celui de la qualité de service. Aujourd'hui, toutes nos interventions sont tracées dans un progiciel. Les salariés flashent des QR codes avec leur portable en NFC et nous avons un reporting précis. Les clients ont eux aussi un accès jusqu'au suivi de la facturation. »Xavier Soubeyran a voulu, dès le départ, montrer sa différence. Pour lui, donner une image rigoureuse est la meilleure garantie pour que ses salariés soient respectés. « Des salariés respectés, ce sont des salariés valorisés et donc motivés et au final, pour le client, un service de qualité. C'est un cercle vertueux. »Le portefeuille client de la PME est cohérent avec sa stratégie. Pas d'appels d'offre et pas de collectivités qui tirent les prix en deçà des seuils de rentabilité. Du réseau, basé sur de la recommandation et de la notoriété et donc de la PME, des centres de santé, des copropriétés jusqu'au centre d'entrainement de la Section paloise. Cette approche nécessite des investissements en interne, notamment en ressources humaines et qualité-hygiène-sécurité-environnement avec des programmes d'intégration.Objectif de croissance ? « Garder nos valeurs ! »Abelio-Propreté est aujourd'hui en vitesse de croisière. Horizon dégagé pour les pilotes, avec leurs 120 salariés (75 en ETP) et 2,5 millions d'euros de chiffre d'affaires. Xavier Soubeyran précise : « l'idée c'est de changer le modèle et de ne s'entourer que de temps pleins. Et pour cela, il faut que nos clients nous accompagnent. Nos métiers se font chez eux. S'ils nous mettent trop de contraintes, cela favorise la précarité. Quand vous avez 10 chantiers, qui démarrent tous à 8 heures du matin, cela fait 10 employés. Si vous en avez 1 à 7 heures, 1 à 8, 1 à 9 et 1 à 10, c'est le même agent qui peut faire les quatre. Historiquement, le nettoyage fonctionne de façon horizontale, en planning. Il faut pivoter en vertical pour réduire les CDD et les temps partiels. D'évidence, ces profils là sont moins attachés à l'entreprise, souvent multi employeurs pour combler les heures. Un équipement pour un salarié coûte le même prix que le salarié soit à temps partiel ou à temps plein. Idem pour les véhicules. Donc l'objectif est véritablement de consolider les emplois en temps pleins. »Quand Xavier Soubeyran évoque les évolutions du modèle avec ses clients, il parle rationalisation. « Supprimer une prestation le samedi matin pour la déplacer le lundi de 9 à 11 heures n'est pas en soi traumatisant. Travailler en journée est un avantage pour tout le monde. Plus de nécessité d'avoir les clefs ou codes pour accéder aux locaux, des flux d'énergies mutualisés et non plus seulement pour l'agent d'entretien, une activité qui permet d'être assuré que ses propres salariés travaillent aussi, des opportunités d'échanges pour améliorer la qualité de la prestation. Et au final, une valorisation de l'agent d'entretien puisque tout le monde le voit. On supporte les engins de nettoyage dans les travées des grandes surfaces ou dans les couloirs des hôtels ; ce n'est pas si dur de les avoir en entreprise ! »Qualité de vie au travail. Une obsession pour les Soubeyran. Le jour où ils ont supprimé les heures du samedi matin d'une employée qui depuis 20 ans n'avait pas de week-end, ils l'ont transformée en ambassadrice de leur PME qui, au delà de l'amélioration de son cadre de vie, leur a depuis apporté des collègues et des marchés. « Il faut changer les mentalités et cela doit se faire avec le client, dans une relation gagnant-gagnant. Faudra-t-il en arriver à moduler les tarifs pour rationaliser ? Je ne voudrais pas en arriver là. »Xavier Soubeyran est administrateur de la chambre régionale Centre Sud-Ouest des entreprises de nettoyage. C'est pour lui un enjeu de crédibilité que de porter ce message de modernisation de l'image et de rationalisation de la filière. Il dénonce les postures et les affichages. « La RSE, pour moi, ce n'est pas juste verdir ses produits, même si on l'a naturellement fait. Dans des métiers qui comptent 70% de ressources humaines, il n'est pas possible que le sociétal ne soit pas au cœur de la démarche. L'environnement, l'ancrage territorial sont importants, mais l'essentiel c'est la relation avec les salariés et par voie de conséquence, avec les clients. La marque employeur, on devrait dire l'empreinte ou la signature, c'est avec cela que l'on gagne des parts de marchés. Les salariés sont tous potentiellement des apporteurs d'affaires et tout le monde y gagne. »

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