Chez EMSFactory, « Le plus dur n’a pas été de fabriquer une usine, mais de recruter des gens » - Premium

Entre un changement de nom et l’inauguration de sa nouvelle usine, la PME EMSFactory, basée à la technopole de Martillac, entame l’année confiante. Anciennement nommée EMSProto, elle assemble et commercialise des cartes électroniques. « Là où nous nous différencions, c’est sur le délai de réception pour nos clients, présente Pierre-Yves Sempere, dirigeant de l’entreprise. Via notre site internet, il est possible de chiffrer très rapidement les devis, en moins d’un quart d’heure, pour des quantités allant d’une à cinquante pièces. Ensuite, la livraison s’effectue en deux à douze jours ouvrés. » Cela, grâce à un processus industriel qui permet de réduire la durée de paramétrage des machines et ainsi d’accélérer la création. Lancée en 2015, EMSFactory a décidé de changer de nom en octobre dernier. « Rapidement, trois ans après notre démarrage, on est allé sur le marché européen et notamment en Allemagne, en Angleterre ou dans les pays nordiques, reprend Pierre-Yves Sempere. On s’est alors aperçu que le nom "proto" avait différentes connotations en fonction des pays. » Si les pays du nord de l’Europe semblent avoir une notion « très noble du terme », les pays du sud « ont une notion de bidouillage ». « Je schématise, bien sûr, reprend le directeur. Mais notre offre est ultra industrielle, c’est pour cela qu’on a voulu s’éloigner du nom "prototype". »La réindustrialisation, atout de la PME ? La société s’adresse autant à des startups qu’à des industries, quel que soit le secteur d’activité. Médical, télécommunications, spatial, viticulture ou encore recherche, « c’est en cela que notre métier est très intéressant, pointe notre interlocuteur. Un jour, on dialogue avec des personnes de Thalès, et le lendemain c’est avec une jeune pousse qui veut lancer un objet connecté à envoyer dans l’espace. » Et cette adaptabilité des lignes de production paye. L’année dernière, le chiffre d’affaires s’élevait à 3,1 millions d’euros. Une croissance liée, également, aux politiques de réindustrialisation apparues durant le premier confinement ? « On a continué d’augmenter notre chiffre d’affaires, oui. Mais la temporalité d’une entreprise ne s’inscrit pas dans la temporalité politique, réfléchit Pierre-Yves Sempere. Cet essor de la relocalisation ne nous semble pas forcément être une opportunité, car ça n’a pas changé grand-chose pour EMSFactory. » Il reconnaît néanmoins une prise de conscience de certains clients quant au « fabriqué en France », même si cette dernière est difficile à dimensionner. « C’est très ponctuel, surtout. Malheureusement, dans six mois ce sera terminé, car on reprend vite les mauvaises habitudes comme regarder en bas à droite sur le devis ».Investissements et problématique de recrutements Pour autant, les investissements ne seront pas minimisés cette année, chez la PME martillacaise. Après avoir inauguré sa nouvelle usine de 3.000 m² (contre 300 m² précédemment), pour un chantier de 2,3 millions d’euros, EMSFactory recrutera dans les mois à venir une dizaine de salariés pour renforcer la trentaine déjà présente. Tous les services seront concernés, y compris la R&D, sur laquelle Pierre-Yves Sempere veut mettre l’accent. « L’objectif est de terminer deux projets ouverts, avant d’en ouvrir un troisième. Par exemple, nous sommes en train de finaliser un système de gestion de production assistée par ordinateur [NDLR, GPAO], et nous voulons intégrer un ou deux cobots dans notre usine. » Ces cobots sont ceux de la jeune pousse Cog.Engines, hébergée dans les locaux de la PME depuis 2020. Elle développe des bras robotisés, censés travailler en collaboration avec les salariés. Un outil qui n’est pas une évidence dans une entreprise aussi automatisée que EMSFactory, mais qui intéresse son directeur. Mais ici, les robots ne remplaceront pas les humains. Et ce sont bien ces derniers qui préoccupent aujourd’hui notre interlocuteur. « Le plus dur n’a pas été de fabriquer une nouvelle usine, mais de recruter des gens. Intégrer un opérateur est impossible, on est obligé de former le candidat de A à Z. Ca ne nous dérange pas en tant qu’entreprise, car former a beaucoup d’avantages, mais à plus grande échelle c’est l’ensemble de l’écosystème qui perd de la connaissance. Et quand on perd la formation, à terme, on perd la conception. » Pour encourager les nouvelles générations, Pierre-Yves Sempere, qui est le vice-président du cluster Aquitaine Robotics, a lancé en 2020 un programme baptisé « Usine remarquable ». Le but ? Inciter les industries à ouvrir leurs portes aux jeunes et à leurs enseignants, du collège à l’école d’ingénieur. En leur mettant à disposition un lieu, dans les usines, ouvert sur les capacités de production. EMSFactory en est l’exemple parfait, car le site propose, au premier étage, une salle de cours offrant une vue plongeante sur les lignes de production. « Nous avons déjà accueilli cinq cours, précise le directeur. Dans ces moments, une rencontre s’opère entre les salariés et les élèves, qui constatent qu’une usine n’est pas sale, qu’il y a de l’innovation, des gens sans diplômes et d’autres avec. » Une mixité enrichissante, que Pierre-Yves Sempere veut déployer dans un millier d’usines d’ici cinq ans.Attaquer le marché allemand À plus court terme, EMSFactory veut implanter une équipe marketing et commercialisation en Allemagne. L’export représente actuellement 20% de son activité, et si la PME est déjà présente chez nos voisins outre-Rhin, elle veut s’y ancrer durablement. « L’Allemagne a un marché intérieur très fort, d’où sa réussite industrielle. Les sociétés ont une éthique d’achat très importante, elles achètent d’abord des produits de leur pays, puis européens, puis cherchent ou s’arrêtent. Pour nous, ce serait un vrai levier de croissance », conclut Pierre-Yves Sempere. EMSFactoryBasée à Martillac 30 salariésCA 2021 : 3,1M€

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