À Soulac-sur-Mer, Europazon veut créer un Amazon français - Premium

« Quand on achète le produit, on achète le monde qui va avec. » Derrière ce slogan se cache l’idée « un peu folle » d’un groupe d’amis médocains, habitant à Soulac-sur-Mer. Celle de concurrence le géant américain Amazon sur le marché européen. « Je pense que la période du confinement a été propice, pour beaucoup de gens, à une remise en question. Une façon de voir l’avenir différemment. Après de longues discussions, nous en sommes arrivés à réfléchir sur la façon de consommer qui passe par le numérique, d’où l’idée de créer une place de marché », résume Xavier Mahieu, président d’Europazon. Cette marketplace française, qui se lancera officiellement en juin, veut relever le défi de ne proposer que des produits français, européen ou reconditionnés. « Europazon se veut multiproduits, reprend notre interlocuteur. Aujourd’hui, il y a toute une partie des produits high-tech qui n’est plus fabriquée en Europe ; et comme on ne peut pas s’amputer de ces produits, on a choisi le reconditionné. C’est aussi plus intéressant, plus vertueux de les réutiliser, plutôt que de les jeter pour en fabriquer des nouveaux. » Objectif : 300 à 500 vendeurs en 12 mois M-2, donc, avant le lancement de cette nouvelle plateforme. La petite équipe de trois salariés s’active pour démarcher des vendeurs, et numériser les fiches des articles. Xavier Mahieu affirme qu’aujourd’hui, plus d’un million de produits ont déjà été enregistrés, et que le volume grossit de jour en jour. « Nous faisons appel à tout le monde. Aux entrepreneurs français et européens, aux chefs d’entreprise, aux usines, aux porteurs de projet, aux artisans, énumère le président d’Europazon. Je pense que plein de professionnels n’ont plus envie de passer par Amazon car cela ne colle pas avec leur façon de voir les choses. Il y avait un manque sur le marché, et c’est ce que l’on veut apporter avec notre entreprise. » Objectif, d’ici 12 mois : compter entre 300 et 500 vendeurs. L’inscription est gratuite, aucun abonnement n’est nécessaire, seule une commission sera prélevée sur chaque transaction (entre 8 et 15%). Europazon proposera également une aide à la numérisation, pour accompagner les vendeurs et consolider son modèle économique. La logistique, elle, sera « à la carte ». Soit les vendeurs réaliseront eux-mêmes les envois, soit ils choisiront une prestation réalisée par Octopia. Filiale du girondin Cdiscount, c’est elle qui s’occupe, depuis un an, de créer la marketplace. La société assurera également le stockage de produits, dans l’un de ses cinq dépôts français, et les expédiera. Ouvrir 90% du capital à des sociétaires Au-delà de concurrencer Amazon, l’entreprise médocaine défend l’idée de créer « un outil commun ». Ses cofondateurs se sont jusque-là financés sur fonds propres, à hauteur de 100.000 euros, mais ils lanceront en même temps que la plateforme une levée de fonds participative. Le but ? Récolter 10 millions d’euros. Pour qu’à terme, 90% du capital appartienne à ses sociétaires. Ici, pas de fonds d’investissement ou d’entrée en bourse de prévus. À la rigueur, des business angels, si ces derniers veulent « à titre privé » rejoindre l’aventure. « Ce sera avec plaisir, mais l’idée, c’est qu’il y ait à travers les sociétaires des prises de décision partagées et communes », recadre le président de l’entreprise. Xavier Mahieu reconnaît volontiers que la somme visée est ambitieuse. Europazon espère la collecter en une ou plusieurs levées de fonds, pour se développer en France comme à l’étranger. « Nous visons d’abord l’Hexagone, mais l’idée est de dupliquer très rapidement le site, dans les deux ans à venir. En Espagne, en Allemagne ou en Italie par exemple, pour proposer à chaque fois des produits locaux et européens. » Le rythme sera lui aussi soutenu : un pays dès la deuxième année d’existence, puis « plusieurs pays » les suivantes. « Aujourd’hui, il y a des licornes qui ont des ambitions au-delà de la France, et qui réalisent des levées de fonds de 300 millions d’euros, poursuit Xavier Mahieu. En comparaison, 10 millions d’euros, c’est certes un budget, mais pas si énorme pour développer un outil à l’échelle européenne. » Et puis, Europazon dit déjà recevoir des dizaines de contacts par jour, via son formulaire internet. Une « appétence » qui conforte l’équipe dans son projet. Des produits européens au meilleur prix L’entreprise se veut « coopérative et solidaire ». Et partagera ses bénéfices en trois : un tiers pour réinvestir dans son activité ; un tiers pour ses sociétaires, et la dernière part dans un fonds d’entrepreneuriat solidaire. Ce dernier aura vocation à aider les porteurs de projets, à apporter le savoir-faire de l’équipe, et « peut-être même des prêts ». Un fonds « pour alimenter un cercle vertueux, et donner des coups de pouce à des gens qui se lancent dans une production locale ». Mais cela, bien sûr, ne sera possible que lorsque Europazon captera un certain volume d’affaires. L’entreprise, sur les 12 premiers mois, ambitionne de réaliser « 1 à 1,5% de ce que font les deux plus grosses marketplaces françaises ». Soit 10 millions de visites, et entre 300.000 et 500.000 commandes. Mais les consommateurs sont-ils prêts à payer plus cher pour des produits « made in France » ? « Je ne partage pas cette problématique, car nous voulons promouvoir des produits au meilleur prix, tranche Xavier Mahieu. En enlevant une grande partie des intermédiaires, comme nous faisons, cela permet d’avoir un prix public accessible en maintenant les marges des vendeurs pour qu'ils se rémunèrent justement. » Il cite notamment Cocorico, entreprise bordelaise de vêtements fabriqués en France, qui a repensé toute sa chaîne de production pour proposer des produits à prix réduits. « C’est ce genre d’initiative qui enlèvera les freins au fabriqué en France. Si on dit toujours que c’est impossible, on n’arrivera jamais à réindustrialiser le pays et l’Europe », conclut Xavier Mahieu.EuropazonBasée à Soulac-sur-Mer3 salariés

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