RSE et innovations : quels enjeux pour Aqualande en 2023 ? - Premium
Stéphane Dargelas, le président du Groupe Aqualande. Crédit : Aqualande
Elle est l'un des leaders de l'aquaculture en France et c'est également une société landaise. Depuis 40 ans, Aqualande continue de faire évoluer ses filières. Malgré les crises successives, elle a enregistré 180 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2022 - ce qui fait d'elle l'une des entreprises les plus porteuses du département et même de la région. Mais qu'est-ce qui explique cette réussite ? Entretien avec Stéphane Dargelas, son président.
Dans les Landes, on ne présente plus la société Aqualande. Mais pouvez-vous nous en dire plus sur son histoire et sur les évènements marquants depuis sa création ?
La société a été créée en 1981, il y a maintenant 42 ans. Notre groupe, qui est spécialisé dans l'élevage de poissons et sa transformation, a une forte implication territoriale. Il est né dans les Landes et s'est développé progressivement en Nouvelle-Aquitaine. Aujourd'hui, les deux tiers de notre production sont dans le Sud-Ouest. En tout ce sont 1.100 collaborateurs qui travaillent avec nous, notamment sur des emplois en élevage et en transformation. Parmi eux, 800 sont implantés dans les Landes, la Gironde, les Pyrénées-Atlantiques et les Hautes-Pyrénées - dont 700 uniquement dans les Landes. Nous avons une répartition sur le nord des Landes et la côte, principalement pour les élevages. Sur les 30 premières années de l'exercice de la société, Aqualande a développé la production de 6.000 tonnes de truites vivantes par an. Puis, sur les 10 dernières années, la production a quasiment triplé, pour passer à 15.000 tonnes par an. Notre croissance a donc été importante, avec des rachats extérieurs de pisciculture, notamment en Charente en 2012, qui nous ont permis d'étendre notre maillage territorial. Nous avons ensuite eu un développement sur le territoire espagnol en 2018 où nous concentrons à l'heure actuelle un tiers de notre production.
Sur quelles filières se concentre votre activité aujourd'hui ?
Notre activité principale se concentre sur la filière truite, qui englobe la sélection génétique, la reproduction, le grossissement en élevage et la transformation. A côté de ça, notre chiffre d'affaires est basé à 15% sur une activité marine, à travers laquelle nous produisons des alevins de dorade, de bar et de maigre, qui sont élevés du côté d'Oléron, de Sète et de Perpignan. C'est une activité très particulière, à forte exportation. En ce qui concerne nos élevages landais, l'essentiel de nos poissons sont des grandes truites de deux à trois kilos, qui sont transformées en truite fumée ; c'est notre produit phare, qui représente 85% de notre chiffre d'affaires.
Avec le réchauffement climatique, l'eau est au cœur des préoccupations. De ce fait, en ce qui concerne la pisciculture, comment gérez-vous les apports en eau et de quelle façon veillez-vous à sa bonne qualité ?
Nous n'avons pas été soumis à des restrictions pour la bonne et simple raison que nous ne consommons pas d'eau. Nous l'utilisons uniquement. Nous fonctionnons en circuit ouvert. Une pisciculture c'est en quelque sorte un barrage : nous prenons de l'eau au niveau de la rivière, elle traverse ensuite nos bassins en ciment et nous la renvoyons enfin vers la rivière, en totalité. A noter que nous avons des droits d'utilisation de l'eau jusqu'à une certaine quantité, avant restitution. Évidemment, nos poissons vivent et évoluent dans cette eau, ce qui implique qu'il y a des rejets. De ce fait, nous avons différents systèmes qui nous permettent de contrôler l'eau. Nous avons mis en place des systèmes de décantation et de filtration mécanique, mais aussi biologique. Il s'agit de plantations de végétaux qui permettent à la nature de faire ce travail de recyclage. En parallèle, nous développons des innovations, des tests sur certaines de nos cultures, en aquaponie. Les déchets produits par les poissons sont utilisés comme source de nutriments par les plantes, ce qui maintient un environnement sain pour les poissons.
Pouvez-vous nous en dire plus sur ces innovations et les projets qui sont développés au sein du groupe ?
Parmi les végétaux que nous faisons pousser, certains sont commercialisés dans des cantines scolaires, de manière très locale pour le moment, même si nous avons par la suite l'ambition de développer ce système à l'échelle du territoire. Nous produisons notamment des salades ou des herbes aromatiques, qui utilisent cette eau chargée en nutriments pour se développer et qui purifient cette eau. Nous avons ainsi créé un circuit vertueux avec beaucoup d'innovations et beaucoup de choses à découvrir encore. Nous continuons de travailler sur différents axes d'amélioration. A noter que c'est un système qui fonctionne mieux l'été que l'hiver - la chaleur et le soleil étant bénéfiques pour le milieu végétal - mais globalement nous sommes en capacité de le faire fonctionner toute l'année. A côté de ça, nous avons d'autres projets en cours de développement, qui nous permettront d'avoir demain, une empreinte territoriale un peu plus forte. On travaille par exemple, en lien avec le Département, sur un projet de légumerie. C'est en cours de développement et nous aimerions avoir des résultats d'ici un an.
Vous êtes engagés depuis 2004 dans de nombreuses démarches RSE. Quels en ont été les principaux axes et qu'est-ce que vous aimeriez encore améliorer dans les années à venir ?
Nous évoquions l'eau justement. Il faut savoir que sans eau, nous ne sommes rien. Nos élevages s'adaptent en permanence au milieu. Les épisodes caniculaires posent des problèmes et nous subissons ces aléas. L'hiver, nos poissons ne mangent pas quand il y a des températures négatives. Nous adoptons nos élevages à ce que propose la nature. De ce fait, nous nous sommes concentrés sur le développement d'une politique RSE et ce, dès 2011. A l'époque, peu d'entreprises se concentraient sur cet aspect et nous avons ainsi fait partie des pionniers en la matière. Je considère que la RSE, c'est notre responsabilité sociétale. Ce n'est pas qu'un mot.
En interne, nous réfléchissons systématiquement à l'intérêt des projets que nous portons et nous essayons de répondre à ces différentes questions : est-ce qu'on crée plus que ce qu'on ne prend ? Quels vont être les impacts sociétaux et environnementaux ? Tous nos projets passent dans une matrice qui nous permet d'évaluer son intérêt. Est-ce que ça va bénéficier au territoire ? Par exemple, nous essayons de faire des achats responsables. Je pense notamment au sel, que nous achetons de manière locale. Nous le payons plus cher que si nous allions le chercher au niveau d'un pays limitrophe. Aujourd'hui, ce sont 85% de nos achats qui sont réalisés dans un rayon de 200km, hors poisson. On essaie au maximum de faire travailler des acteurs locaux. Nous avons aussi beaucoup de mesures RSE au niveau de la qualité de vie au travail, puisque, au sein du groupe, nous sommes sur des métiers qui sont parfois difficiles, avec des astreintes, des ateliers dans des horaires atypiques. Nous faisons notamment des échauffements musculaire en début de séance, nous apportons des fruits et légumes aussi aux salariés. Nos objectifs sont de sensibiliser et de former, en interne pour que la qualité de vie au travail, soit la meilleure possible.
Aqualande
Année de création : 1981
Effectif : 1.100 personnes
CA en 2022 : 180 M€
