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ZFE : les acteurs économiques demandent plus de dialogue avec Bordeaux Métropole

Écosystème
mercredi 22 mars 2023

Six représentants du monde économiques se réunissent autour de Nathalie Laporte, présidente de la CMA Gironde, et de Patrick Seguin, président de la CCI Bordeaux Gironde. Crédits : MB

À l’approche de la mise en place de la future ZFE, zone à faibles émissions, plusieurs représentants du monde économique girondin et régional se réunissent pour dialoguer avec Bordeaux Métropole. Ils fournissent dix recommandations, pour accompagner cette évolution réglementaire.

« Nous ne sommes pas contre Bordeaux Métropole, mais avec eux. Alain Anziani, son président, a créé un groupe de travail sur le sujet de la ZFE [NDLR, zone à faibles émissions] sans nous y inclure, mais nous avons le droit au langage et il l’a bien compris », affirme Patrick Seguin, président de la CCI Bordeaux Gironde. Ce mercredi 22 mars, l’élu consulaire et son homologue de la Chambre des métiers et de l’artisanat, Nathalie Laporte, étaient entourés de cinq représentants du monde économique girondin. Objectif : présenter dix recommandations sur la mise en place de la future ZFE, avant de les formuler à Alain Anziani.

Au cœur de leurs inquiétudes : l’impact des futures restrictions de circulation pour les professionnels girondins. Selon une enquête menée par la CCI, plus d’un tiers des véhicules (légers, utilitaires légers et poids lourds) du parc de l’aire métropolitaine sont Crit’Air 3 ou plus. Or, si le président de la Métropole prône « une approche pédagogique » avec dans un premier temps l’interdiction des vignettes 4 et 5, les véhicules Crit’Air 3 seront aussi concernés, « plus tard »

« On a d'autres préoccupations »

« Penser aux salariés », « ne pas ajouter de la difficulté dans un contexte déjà tendu », « prendre en compte les réalités économiques et technologiques » : parmi les acteurs économiques présents, les mots d’ordre sont sensiblement les mêmes. Nathalie Laporte rappelle que 52.000 entreprises artisanales exercent en Gironde, dont 31.000 sur la métropole. « 82% se rendent sur le périmètre intra-rocade [NDLR, la limite de la ZFE] au moins trois fois par semaine, et 42% des chefs d’entreprise artisanales ont des véhicules Crit’Air 3 et plus. Cela signifiera une perte de services de proximité, une fois la ZFE en place, car tout le monde ne pourra pas changer de moyen de transport dans ce laps de temps », martèle la présidente de la CMA Gironde. Un avis partagé par Lionel Matias, président de l’Union des industries et des métiers de la métallurgie Gironde Landes : « Quid des livraisons régulières et indispensables à notre activité ? On nous parle de réindustrialiser le territoire, alors qu’on subit déjà beaucoup de contraintes. »

Franck Chaumes, président de l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie Gironde, ne cache pas son agacement : « Ce qui me désole un peu, c’est que Bordeaux Métropole ne nous a pas concertés dès le départ. Notre profession a de gros soucis avec eux, car nous sommes toujours devant le fait accompli. Je veux bien croire qu’il faut être dans une démarche écologiste, mais une écologie modérée. » Si elle tempère ces propos, Nathalie Laporte reconnaît que « ça n’arrange pas [leurs] affaires » que la majorité métropolitaine compte parmi ses rangs des élus Europe Ecologie-Les Verts. « Ils ne pensent pas forcément aux contraintes inhérentes, ce qui pose un vrai sujet. On ne peut pas tout avoir d’un coup, les crises se sont enchaînées, on a d’autres préoccupations, et si on n’est pas accompagnés par des élus locaux qui peuvent comprendre les problèmes économiques, ça jouera en notre défaveur et créera un cataclysme dans le monde économique. »

La nécessité d'harmoniser la Nouvelle-Aquitaine

De l’avis de tous, au-delà des considérations purement girondines, il faut surtout trouver une harmonisation territoriale. Nationale, même si peu y croient, mais avant tout néoaquitaine. Quatre ZFE verront le jour en région, dans les agglomérations de plus de 150.000 habitants (Bordeaux, Limoges, Bayonne et Pau), et La Rochelle, qui n’entre pas dans ce dispositif, s’est aussi engagée pour en déployer une. « Nous sommes au service des autres acteurs économiques, et si nos entreprises sont globalement implantées à l’extérieur des futures ZFE, nous sommes évidemment concernés de par nos activités, rappelle Franck Puharré, délégué régional de l’Union des entreprises de transport et de logistique de France. Pour notre secteur, il y a un enjeu particulier et il est nécessaire d’harmoniser au maximum en région. Sinon, ce sera très compliqué de gérer toutes les disparités. » Selon Patrick Seguin, les 13 CCI de Nouvelle-Aquitaine ont récemment interpellé Alain Rousset, président du Conseil régional, « pour être un peu poil à gratter auprès des collectivités ».

À l’échelle régionale, un autre secteur se fait entendre et demande une progressivité de la mise en place des ZFE : l’agroalimentaire, qui pèse 3 milliards d’euros de chiffre d’affaires, et compte 10.000 emplois. « 70% de nos entreprises ont des postes non pourvus, et malgré les aides, certains salariés en poste ne pourront pas s’équiper… Il faut éviter d’ajouter des difficultés », souligne Stéphane Douance, président de l’Association régionale des industries alimentaires de Nouvelle-Aquitaine. Si le soutien de Bordeaux Métropole aux particuliers et aux professionnels pourrait représenter une enveloppe de 40 à 100 millions d’euros, rien n’est pour le moment arrêté. Une source d’inquiétudes supplémentaire pour les acteurs du monde économique, alors que la mise en place de la ZFE est attendue pour 2024.

Représentants économiques : Patrick Seguin (CCI Bordeaux Gironde), Nathalie Laporte (CMA Nouvelle-Aquitaine Gironde), Liones Matias (UIMM Gironde Landes), Thierry Leblanc (FFB Gironde), Stéphane Douance (ARIA Nouvelle-Aquitaine), Franck Chaumes (UMIH Gironde), Franck Puharré (UETL Nouvelle-Aquitaine), Nourredine Ziane (FNTR Aquitaine).

Les dix recommandations :
- Renforcer l’information des entreprises et des artisans sur ce qu’est une ZFE. Selon l’enquête de la CCI Bordeaux Gironde, 26% des entreprises interrogées déclarent ne pas avoir connaissance de la mise en place de ce dispositif.
- Définir un calendrier de déploiement, « tenant compte des solutions alternatives », avec comme échéance l’interdiction du diesel en 2030.
-Créer un guichet unique numérique, pour les entreprises et les artisans, sur les aides nationales et des collectivités locales.
- Accompagner les entreprises avec des aides accordées par les collectivités (transformation des véhicules, installation de bornes de recharge…). Pour Bordeaux Métropole, définir « un dispositif d’aides financières favorisant l’acquisition de véhicules Crit’Air 1 et 2 avec des règles identiques pour toutes les entreprises, sans distinction de taille et/ou de chiffre d’affaires. »
- Prévoir des mesures d’assouplissement pour les salariés, afin d’éviter une dégradation de l’employabilité et des difficultés de recrutement.
- Prévoir des dérogations, notamment pour les véhicules dotés d’équipements spécifiques, pour l’approvisionnement des zones et sites industriels en matières premières et en énergie, ou pour les activités industrielles de chantier et de maintenance.
- Envisager l’application aux véhicules éligibles à la vignette Crit’Air 3, notamment lorsque les zones sont déficitaires en transport collectif.
- Corréler le passage à la vignette Crit’Air 1 et 2, à un engagement de déploiement des réseaux d’avitaillement énergétique.
- Développer des plateformes logistiques multimodales.
- Favoriser un échange permanent entre les représentants des acteurs économiques et Bordeaux Métropole.

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