RSE : Cancé veut avancer « brique par brique » - Premium

« On a fait de la RSE avant que le thème ne soit sur le devant de la scène », entame Mathieu Deléant. Le directeur général de Cancé rappelle le trophée attribué dès 2013 par la Région Nouvelle-Aquitaine à l’entreprise béarnaise spécialisée dans les constructions métalliques, pour sa démarche sur les conditions de travail, l'insertion et les achats. « Une démarche qui avait engagé l’entreprise, de façon assez particulière », décrit-il. Pour ses achats de barres d’acier, la principale matière première du groupe, « nous avons pris le parti d’être partenaires de nos fournisseurs, et de travailler avec des distributeurs plutôt que des fabricants ». Un choix qui allonge la chaîne d’approvisionnement, « en partant du principe que chacun doit faire son métier », mais qui permet à l'entreprise de tisser des liens étroits avec ses fournisseurs et de travailler sur l’optimisation du chargement des camions qu’il réceptionne. « On a vite compris que nous avons besoin de camions complets, de 25 tonnes, qui arrivent avec des cargaisons pleines de produits de sections ou de longueurs différentes, reprend Mathieu Deléant. Nous achetons des barres de 15, 14, 13, 12, 11, 10 mètres… des producteurs seraient tout à fait incapables de nous livrer à ce niveau de détail ». Cela permet à Cancé de réduire la quantité de chutes, et dont de déchets, une décision « économique, mais aussi environnementale, explique le directeur général. En travaillant avec nos revendeurs, en acceptant de payer plus cher, on est livrés en 72h et à la longueur précise dont nous avons besoin. »Engagements éthiques La politique de sourcing de Cancé inclut également des engagements éthiques sur les pratiques commerciales : « On n’accepte plus la gratuité, et on a mis en place une politique de mise en commun des cadeaux des fournisseurs, qui sont redistribués tous les ans par une loterie entre tous nos collaborateurs. » L'entreprise se veut aussi vigilante sur des enjeux comme le travail des enfants. « Sur le métal, on achète à des acteurs industriels importants comme Arcelor-Mittal, pour lesquels la question ne se pose pas vraiment », assure Mathieu Deléant. « Mais nous achetons beaucoup d’autres produits : des boulons, des vêtements de travail… pour lesquels c’est une vraie préoccupation ». Cancé revendique « une accélération » de sa démarche RSE sur ces questions-là, avec la mise en place progressive de questionnaires adressés aux fournisseurs « sur l’intégration de leur démarche RSE, leurs processus d’audit et la façon dont ils répercutent nos exigences en aval. »« Une démarche pragmatique » Sur les achats, « on a une démarche pragmatique, comme sur toute la RSE », résume Laurent Salles, responsable communication de Cancé. « On met en place des relations saines et claires, on pose des objectifs atteignables et maîtrisables, et on trace un chemin avec un langage commun qui nous permet d’avancer. »Illustration de ce pragmatisme, les exigences du groupe en matière d’écologie. « On est bien conscients du fait que l’industrie sidérurgique va mettre un certain temps à modifier ses processus de production », considère Mathieu Deléant. « 80% de l’acier utilisé dans nos bâtiments est issu d’une filière de recyclage, mais cela n’empêche pas que cet acier est produit avec des processus électriques qui ne sont pas toujours issus de l’électricité verte ». Les industriels « travaillent à verdir l’énergie qu’ils utilisent, mais ce sont des processus lourds, qui vont prendre des années ». « Mais ça va arriver, assure Laurent Salles. Les nouveaux procédés sidérurgiques vont consommer énormément d’hydrogène et diviser l’empreinte carbone de l'acier par dix. »À lire également - Le Groupe Daniel mise sur l'électrique pour sa flotte de camionsCancé travaille également sur l’optimisation de la conception des bâtiments qu’il construit. « En 2023, nous nous sommes donnés l’objectif de réduire l’empreinte carbone de nos ouvrages », détaille Mathieu Deléant. La solution la plus simple : réduire la quantité de matériaux utilisés. « Moins il y a de matière sur un ouvrage, plus il est vertueux », résume-t-il. La démarche n’est pas nécessairement rentable : « il faut mobiliser à chaque fois notre bureau d’études, calculer tous nos ouvrages, dessiner 100% des pièces qui vont être utilisées, se demander à chaque fois si l’on peut mettre un poteau de 240 au lieu de 250… » énumère-t-il. Avec un indicateur : la réduction de l’empreinte carbone par euro de chiffre d’affaires. En 2023, Cancé s’était fixé comme objectif une réduction de 5% de cet indicateur. « Nous avons fait -6,26% », se félicite le directeur général, parallèlement à une augmentation du chiffre d'affaires de 15% sur la même année, et avec une réduction de 6% des achats de matières premières. « Après, cela dépend aussi du mix produit, nuance Mathieu Deléant. Nous faisons plus de réhabilitation et moins de neuf, c’est une tendance lourde que nous avons identifié depuis plusieurs années. Il est trop tôt pour dire quel est son impact exact sur notre bilan carbone. » Sensibiliser les collaborateurs« On a créé un groupe RSE transverse avec des gens du siège et d’autres de toute nos agences », décrit Laurent Salles. Ce groupe se réunit régulièrement « pour faire avancer notre démarche RSE et trouver un référentiel commun ». Il travaille sur « les sept piliers de la norme ISO 26000 », norme établissant les lignes directrices relatives à la RSE : gouvernance, engagement sociétal, droits de l’homme, conditions de travail, bonnes pratiques, environnement, questions relatives aux consommateurs… « Dans chaque domaine, on clarifie la définition et on se donne des indicateurs », ajoute le responsable communication. Sur la prévention et la sécurité au travail, par exemple, « on est dans une démarche coconstruite avec le terrain, on ne veut pas être dans une démarche où la direction impose. »À lire également - Responsabilité des entreprises : qu’est-ce que le territoire, cette notion en constante évolution ? Cancé organise ainsi des ateliers RSE pour ses équipes de chantier « au plus proche de leur travail, pour parler, par exemple, de discrimination avec le personnel féminin, raconte Mathieu Deléant. Cela nous permet une prise de conscience que l’entreprise est engagée ensemble dans une démarche RSE ». « Tout le comité de direction se retrouve sur le chantier avec les gars, décrit Laurent Salles. C’est une question de crédibilité, c’est comme ça que l’on peut convaincre les réticents, qui voient que l’on accompagne le mouvement. » « On voit que certains s’y connaissent aussi bien ou mieux que nous sur certains sujets, reprend Mathieu Deléant. Installer des machines électriques sur les chantiers, c’est non seulement plus écologique, mais c’est aussi moins bruyant, cela génère moins de poussière… On fait prendre conscience aux gens qu’ils peuvent aussi être force de proposition, et que l’on peut maximiser leur performance en réduisant en permanence la pénibilité du travail ». Autre exemple de coconstruction, le « système de protection collective » développé par l'entreprise pour ses chantiers. « C’est le résultat d’un long travail avec les acteurs sur le terrain, raconte Mathieu Deléant. À l’origine, il y a un accident qui nous a fait prendre conscience que les systèmes de protection existants n’étaient pas suffisants. Nous avons mis en place un groupe de travail et inventé un système antichute collectif, qui s’installe sur les charpentes, avec des grilles rigides. On l’a fait valider ce système par un bureau de contrôle, et on a décidé de ne pas le breveter, pour que toute la profession puisse en bénéficier ». Ce système est aujourd’hui accessible à toutes les entreprises du secteur du bâtiment, même si Cancé bénéficie d’un tarif préférentiel auprès de son fournisseur. « C’est un enjeu collectif, considère Mathieu Deléant, l’image du secteur étant ce qu’elle est, on n’a pas besoin de ce type d’accidents. »« Petit à petit, on pose des briques, conclut le directeur général. On est aidés dans ce travail par les normes ISO, la démarche RSE… Notre objectif est de le faire tout en restant pertinents économiquement, sinon on ne pourra plus investir ni mettre en place de démarches supplémentaires. »Cancé520 employésChiffre d'affaires : 170 millions d'euros

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