Placéco Pays Basque, le média qui fait rayonner l’écosystème

Votre édition locale

Découvrez toute l’actualité autour de chez vous

RebrAIn commercialise son algorithme contre les maladies neurodégénératives

Demain
jeudi 01 juillet 2021

La startup bordelaise RebrAIN, présente pour la première fois au salon Viva Tech à Paris, développe une technologie à destination des neurochirurgiens. Son algorithme permet de diviser par deux le temps d’opération de patients atteints de la maladie de Parkinson, ou de tremblements essentiels.

C’est au cœur de la Plateforme technologique d’innovation biomédicale que Emmanuel Cuny et Nejib Zemzemi ont installé leur bureau. L’un est professeur de neurochirurgie au CHU de Bordeaux, l’autre est chercheur au centre de recherche INRIA. Ensemble ils ont fondé RebrAIN, une startup spécialisée dans le traitement des maladies neurodégénératives. « Nous nous focalisons sur les malades atteints de Parkinson et de tremblements essentiels, présente Emmanuel Cuny. Actuellement il est nécessaire de réveiller les patients lors des opérations, pour trouver les zones du cerveau qui sont cliniquement les plus efficaces pour traiter ces maladies. Nous avons conçu un algorithme basé sur l’intelligence artificielle qui détermine les zones à cibler, mais aussi un logiciel qui permet de lire et marquer les IRM. »

700.000 patients seraient éligibles, dans le monde, pour l’utilisation de cette technologie. « Aujourd’hui seulement 3% des malades sont opérés, reprend Emmanuel Cuny. Les chirurgies prennent énormément de temps et certains patients les refusent, car être réveillé durant une opération reste un traumatisme. »

De la recherche à l’entreprise

Pour le binôme, tout a commencé en 2015. Emmanuel Cuny travaillait sur le sujet depuis 10 ans, et se retrouve confronté à un problème mathématique durant ses recherches. Il prend alors contact avec les équipes de l’IHU LIRYC (Institut de rythmologie et modélisation cardiaque) de Bordeaux, et rencontre Nejib Zemzemi. « J’ai exposé ma problématique, et les équipes m’ont trouvé une solution basée sur l’intelligence artificielle », se remémore le professeur de neurochirurgie. La R&D continue pour Emmanuel Cuny et Nejib Zemzemi grâce entre autres à un financement de l’INRIA. En 2018 un premier brevet est déposé. « Il y a aujourd’hui une politique forte pour la valorisation de la recherche académique, affirme Emmanuel Cuny. Le brevet est onéreux, coûte près de 35.000 euros, il faut donc en faire quelque chose. »

Trois opportunités s'offrent alors au duo : vendre ce brevet à un industriel, en faire une licence et toucher des « royalties », ou le développer en interne. « Très vite, on s’est rendu compte qu’il fallait créer une société et la diriger. » La SATT (Société d’accélération du transfert de technologies) accompagne le projet en maturation et le subventionne à hauteur de 170.000 euros. Le 4 janvier, la startup RebrAIn est officiellement créée.

Un outil déjà utilisé par le CHU de Bordeaux

En pratique RebrAIN vend un service unique. La société conserve l’exclusivité de son logiciel, et ses clients, par exemple des hôpitaux, achètent une analyse par opération. « Avant d’opérer un patient les neurochirurgiens nous transmettent les IRM, notre algorithme les analyse, marque la zone conseillée pour l’opération et nous renvoyons les IRM, détaille Emmanuel Cuny. Le temps de la chirurgie est divisée par deux grâce à cela. »

D’ailleurs, le CHU de Bordeaux utilise cette technologie depuis deux ans. « Cela fonctionne, nous ne sommes plus du tout sur un prototype, précise Emmanuel Cuny. Nous sommes donc très en avance, car en phase 3 de l’évaluation clinique. » Un projet de recherche débutera le 7 juillet prochain avec 11 CHU de l’Hexagone pour tester à grande échelle l’efficacité du dispositif. Durant deux ans 128 patients seront opérés, pour à terme analyser les résultats et publier l’étude. « Nous ne la réalisons pas pour montrer que RebrAIN fonctionne ni pour lancer la commercialisation, car nous n'en avons pas besoin, mais pour prouver que c’est au moins aussi efficace, voire plus, que ce qui se fait d’habitude c’est-à-dire réveiller le patient. » Selon le professeur de neurochirurgie, les tremblements sont diminués, après opération, de plus de 70%. « Ces tremblement sont un très grand handicap pour les patients, reprend-il. Ils ne sont pas capables de boire un verre d’eau, de s’habiller, de porter une fourchette à leur bouche par exemple. Lorsqu’on les opère on a un effet immédiat, les tremblements s’arrêtent directement. »

Atteindre la rentabilité dès 2023

Depuis le début de la R&D, les fondateurs de la startup se sont financés sur fonds propres et grâce aux subventions. « Nous n’avons vendu aucun service encore car il nous fallait le marquage réglementaire CE que nous avons eu seulement le 21 mai dernier », reprend Emmanuel Cuny. D’ici un an RebrAIn se lancera dans une importante levée de fonds d’environ 2M€, pour financer son développement à l’international et surtout aux Etats-Unis qui représentent 50% du marché mondial. « Nous sommes d’emblée une entreprise européenne car le marché français, c’est environ 500 malades par an et ce n’est pas avec cela qu’on va vivre. » La commercialisation européenne est d’ores et déjà lancée en Europe, et celle outre-Atlantique démarrera en 2023. « A terme nos clients ne seront pas directement les centres de chirurgie, mais les industriels qui vendent les stimulateurs et électrodes que l’on met dans la tête des patients pour les traiter. Ils sont intéressés pour fournir notre service avec les dispositifs médicaux. Mais avant cela notre technologie doit être adoptée par les centres, qu’ils disent à ces industriels être intéressés par leurs produits avec notre ciblage. »

RebrAIn vise la rentabilité dès 2023, avec un point mort à 200 clients. A terme d’autres maladies pourraient être concernées par le dispositif comme les troubles obsessionnels compulsifs, la dépression, la maladie de Gilles de la Tourette ou encore la dystonie. « Il faut comprendre que nous n’inventons pas de nouvelles cibles. Pour Parkinson et les tremblements essentiels nous avons pris des patients déjà opérés ayant eu de très bons résultats. Nous avons mathématiquement reproduit ces résultats chez de nouveaux patients, donc nous pouvons traiter ces maladies mais il faut qu’il y ait déjà eu de très bons résultats », conclut Emmanuel Cuny.

RebrAIn
Basée à Bordeaux
5 salariés
CA : n. c. 
www.rebrain.eu

Sur le même sujet