Réalités étendues et collaboratif : Immersion explore de nouveaux territoires - Premium
L’entreprise bordelaise Singulair, spécialisée dans l’inspection de pales d’éoliennes par drones, a confié à Immersion la réalisation de son "centre de contrôle" - crédit Immersion
Spécialiste de la réalité virtuelle ou augmentée et des solutions collaboratives, le bordelais Immersion boucle un exercice fiscal en demi-teinte. Entre rattrapage attendu, projets de recherche décrochés et nouveautés produit à venir, la société reste cependant confiante dans la pertinence de son projet stratégique. Les explications de Christophe Chartier, son fondateur et PDG.
Publiés fin octobre, les résultats financiers d’Immersion font état d’un chiffre d’affaires de 5,45 millions d’euros sur son exercice 2021-2022, en recul de 6% sur un an. La marge brute s’améliore quant à elle de 7 points sur un an, passant de 40 à 47%, en dépit d’une hausse des charges d’exploitation, attribuée à la fois à la fin des mesures de soutien gouvernementales et à des investissements commerciaux. En fin de bilan, Immersion affiche un résultat net de 60.000 euros, qui marque l’équilibre, mais peine encore à incarner le retour à une croissance rentable souhaité aussi bien par le marché (19% du capital d’Immersion est flottant) que par Christophe Chartier, fondateur et PDG de ce pionnier bordelais des technologies d’interactivité et d’immersion.
Immersion ne communique pas dans le détail la ventilation de son chiffre d’affaires, mais la société confie des performances stables sur son activité de négoce d’équipements liés à la réalité virtuelle ou augmentée (vente de casques VR, par exemple, à l’image de ce contrat passé fin 2020 avec la SNCF). Une activité sur laquelle la société bordelaise se positionne toujours comme un défricheur, avec la capacité à sourcer rapidement, voire en avance de phase, certains modèles très attendus par les spécialistes du secteur. « Cette activité nous permet de renforcer nos liens avec les centres de recherche qui explorent de nouvelles façons de faire, et donc de nourrir notre R&D », souligne Christophe Chartier. Immersion confirme dans le même temps le recul commercial des systèmes complexes de salle immersive, à l’image de sa technologie CAVE destinée à l’industrie, qui demandent du matériel de pointe et des investissements lourds.
Des aménagements dédiés aux nouveaux usages collaboratifs
Une évolution de la demande anticipée, à laquelle Immersion se propose de répondre avec des dispositifs plus légers, mêlant au choix mur de projection, écrans tactiles ou tables collaboratives, avec une intervention intégrant aussi bien la technique que l’agencement des espaces de travail ou de formation, grâce au récent recrutement d’une architecte d’origine péruvienne. Elle ambitionne ainsi de multiplier les projets sur mesure, à l’image du « LAB Innovation » livré fin 2021 à la CCI Bordeaux-Gironde, du showroom aménagé pour le spécialiste des pales d’éolienne Singulair ou des digital labs équipés pour le compte d'Arcelor Mittal.
Avec en ligne de mire des débouchés commerciaux dans les secteurs de l’éducation et de la formation. Immersion vient ainsi de réaliser pour les Arts et Métiers d’Aix-en-Provence un projet de salles de cours immersives, articulées autour de murs d’images interactifs, connectés à des salles dotées d’écrans tactiles, pour des interactions en direct à l’écran, comme la manipulation d’objets virtuels en direct. Un projet, non comptabilisé dans l’exercice bouclé au 30 juin dernier, grâce auquel Immersion compte bien participer à la démocratisation de ces nouveaux usages. « On comprend tout de suite mieux quand on met la 3D au cœur, que ce soit pour la formation ou pour la prise de décision », commente Christophe Chartier. La société a par ailleurs remporté, post publication de ces résultats, un contrat visant à équiper en solutions collaboratives et réalité virtuelle le centre de convention d’un établissement hôtelier en cours de construction.
En parallèle de ces installations sur mesure, Immersion prépare le lancement commercial, d’ici la fin de l’année, d’une solution « sur étagère » : elle prend la forme d’un box, muni d’un mur d’écran, de caméras et d’un dispositif de capture du son, grâce auquel un intervenant peut animer une présentation, un cours ou une réunion de travail avec une dimension collaborative, un public physique et une audience distante.
Un public sur les ôtés, une audience à distance et la prise en charge dispositifs dédiés à la 3D ou à l'immersion, le nouveau produit d'Immersion se veut vendu clé en main
« On ne vend plus un seul projet sans Shariiing »
Sur mesure ou sur étagère, tous ces projets partagent un point commun : le recours à Shariiing, la solution logicielle qui équipe l’ensemble des tables et écrans collaboratifs distribués par Immersion. « On ne vend plus un seul projet sans Shariiing », confirme Christophe Chartier, qui annonce la sortie prochaine d’une nouvelle version intégrant nativement la prise en charge des logiciels Teams et Zoom. La société enregistre tout de même sur son dernier exercice une baisse du nombre de licences vendues : 22 sur l’année, contre 28 sur l’exercice précédent. « Le déploiement de Shariiing souffre des problématiques d’approvisionnement et des délais qui s’allongent, à notre niveau pour le matériel informatique ou la tôlerie nécessaire aux tables, mais aussi au niveau de nos clients, dont les chantiers prennent du retard. De ce fait, tous les projets glissent, et toute la chaîne de valeur est en souffrance. C’est plutôt positif qu’on arrive à stabiliser l’activité et à rester profitable dans ce contexte », estime le PDG. Si les contrats bouclés après le 30 juin laissent entendre qu’un effet de rattrapage est possible, Immersion ne communique pas de prévision chiffrée quant à son nouvel exercice en cours.
La société se félicite en revanche d’avoir remporté deux nouveaux projets de recherche, l’un français, l’autre européen. Le premier, surnommé MIC et doté d’une enveloppe de 2 millions d’euros, réunit les experts français des interfaces homme machine (IHM) autour des micro-gestes, ces interactions, censées devenir de plus en plus précises, qui permettent par exemple d’agir avec un hologramme projeté en réalité augmentée. Le second, baptisé Transmixr et crédité de 10 millions d’euros par l’Europe, associe 19 partenaires, dont l’AFP et l’initiative Sparknews, autour d’une réflexion sur le développement de nouveaux vecteurs de création, d’interactions et de diffusion avec des contenus numériques portés par des médias, soit par des institutions culturelles. « L’objectif consiste à voir comment les médias, les arts ou les musées, peuvent bénéficier des technologies immersives pour construire et proposer de nouvelles expériences. Ces deux projets touchent à notre cœur de métier, l’interface, c’est-à-dire la façon dont on met la donnée à disposition », se félicite Christophe Chartier, parti début novembre en Irlande pour le kick-off du projet Transmixr.
Pour soutenir ces différents projets, Immersion a relancé les recrutements après une contraction des effectifs, avec la volonté de composer une équipe mieux adaptée à ses nouveaux enjeux, mais aussi plus internationale, avec des profils d’origine russe, libanaise ou mauricienne. « Cette diversité nous fait beaucoup de bien. On poursuit notre vision stratégique, mais de façon plus agile », conclut le PDG.
