Marine marchande : comment BoatOn veut transformer le bilan carbone en plan d'action - Premium

Fin juillet, BoatOn a commencé à déployer une nouvelle fonctionnalité de bilan carbone automatisé au sein de son logiciel BoatOn Book, outil de maintenance dédié à la filière nautique. Une réponse directe au manque de standardisation et d'automatisation des rapports RSE, notamment dans la marine marchande mais aussi l’ensemble de l’industrie maritime. L'innovation permet de générer automatiquement des indicateurs d’impact environnemental en s'intégrant nativement à l'ERP qui gère la GMAO (gestion de la maintenance assisté par ordinateur), le journal de bord et la gestion du personnel. Désormais, BoatOn Book produit automatiquement des graphiques complets sur la performance environnementale des navires : consommation énergétique (carburants, électricité, hydrogène, GNL, e-méthanol…), émissions de gaz à effet de serre (CO2, CH4, N2O) et autres polluants (SOx, NOx, particules fines), ou encore les « dividendes carbone » correspondant aux tonnes de CO2 évitées grâce aux solutions alternatives. Concrètement, l’outil croise les données de maintenance, d'équipage, de distance et de vitesse de navigation, assurant la fiabilité des informations d'entrée puisque celles-ci sont récupérées depuis les systèmes de bord. Pour les armateurs, la promesse de simplifier la mise en conformité réglementaire, en fournissant déjà 60 à 70% des données nécessaires aux rapports CSRD.Vue du tableau de bord dédié au bilan carbone. Crédit : BoatOnCe nouvel outil a vu le jour grâce à la collaboration de l'ADEME, dans le cadre d’un programme de transition économique de Bpifrance. L'apport de l’agence est double : « Le simple fait que l'ADEME ait participé à la définition des algorithmes et que sa base de données Empreinte soit intégrée, ça donne une crédibilité absolue à l'outil », estime Bertrand Gerbaud, fondateur et président de BoatOn. Cette fonctionnalité de bilan carbone n’est pas une option payante isolée, mais une composante intégrée à la fonction « Tableau de bord » du logiciel. Tout utilisateur ayant accès à ce dashboard dispose donc de ces indicateurs automatisés. L’approche de BoatOn se concentre sur l’action sur le parc existant. La flotte mondiale de navires de commerce compte environ 110.00 unités, mais son renouvellement naturel est extrêmement lent, environ 900 nouveaux navires par an. Le dirigeant pose le diagnostic sans appel : « Il faudrait 120 ans pour décarboner l'ensemble de la flotte mondiale à ce rythme. Donc ça ne passera pas que par les bateaux neufs. » L’urgence est donc d'agir sur le parc existant via des opérations de refit, l’opportunité précisément ciblée par l’outil girondin.Du thermomètre à l’ordonnanceSi le nouvel outil fournit un diagnostic précis, l’ambition de BoatOn ne s'arrête pas au rôle de « thermomètre ». La prochaine brique technologique, d’ores et déjà en développement, vise à proposer un ensemble de préconisations en matière de décarbonation, grâce à l'intelligence artificielle. La jeune pousse y travaille activement. L'étape finale serait la création d'une IA de type RAG (Retrieval Augmented Generation), entraînée sur des bases de données spécifiques et privées, dont l’objectif est de transformer les données de diagnostic en feuille de route opérationnelle pour les décideurs. « On va mâcher une grande partie du travail, estime Bertrand Gerbaud, sans avoir à faire appel systématiquement à des cabinets d'études coûteux ». Ce projet bénéficie de l'accompagnement de l'ADEME et d’un armateur partenaire. L’objectif est de bêta-tester cette IA en 2027.Le déploiement commercial de l'outil carbone est en cours, avec des démonstrations réalisées auprès de grands armateurs français, exception faite de CMA-CGM qui semble faire la sourde oreille aux propositions de test. BoatOn adopte une approche transversale par secteur, ciblant en priorité les flottes anciennes et polluantes. Mais aussi celles qui sont fortement contraintes par la réglementation : « À Bordeaux, on discute avec Socatra, qui est le dernier armateur pétrolier de France », illustre le dirigeant. Après le marché français (transport de passagers fluviaux et maritimes, fret, croisiéristes), l'expansion internationale visera l'Europe et des nations majeures du shipping comme les armements danois, finlandais ou asiatiques. L'objectif commercial pour l’outil bilan carbone est de compter au moins 1.200 navires de marine marchande sous gestion d'ici trois ans.Pas que la filière nautiqueBoatOn ne communique (toujours) pas son chiffre d’affaires, mais donne les évolutions. Après avoir triplé entre 2023 et 2024, l’activité pourrait « doubler voire tripler encore cette année », confie Bertrand Gerbaud. L’entreprise se trouve ainsi « quasiment autofinancée à 100% » et la direction confirme son objectif de rentabilité avérée en 2025. BoatOn emploie actuellement une douzaine de personnes et, pour soutenir son accélération commerciale et internationale, vise l'intégration de deux commerciaux supplémentaires. La stratégie de conquête des marchés étrangers impliquera le recrutement de responsables pays, installés à Bordeaux mais natifs des pays ciblés, afin de garantir une implantation professionnelle et pertinente. Une accélération de ces embauches pourrait accompagner une éventuelle future levée de fonds, envisagée pour « attaquer ces marchés de manière professionnelle et massive ».Le fondateur de BoatOn a également évoqué une réflexion sur le potentiel de diversification de leurs solutions au-delà du secteur nautique. Actuellement axée sur l'évaluation de l'impact environnemental des navires, l'entreprise entrevoit la possibilité d'évaluer l'impact environnemental global d'une entreprise dans d'autres domaines, utilisant l'architecture de données et les algorithmes développés en interne. « Ce qu'on est en train de déployer aujourd'hui est complètement agnostique et donc ouvert à des usages qu'on pourrait avoir dans d'autres domaines que le maritime », entrevoit Bertrand Gerbaud. Cette piste stratégique pourrait être sérieusement explorée d’ici trois ans et ouvrir l'entreprise à des secteurs industriels ou logistiques terrestres confrontés à des problématiques de gestion de flotte ou de reporting RSE similaires. BoatOnSAS fondée en mars 2018Siège social : BordeauxEffectif : 12 personnesCA : n. c.

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