Ile d’Oléron. À l’Atelier des gens de mer, les pêcheurs « débarqués » fabriquent et réparent les filets - Premium
Samuel Massé, coordinateur de l'entreprise adaptée l'Atelier des gens de mer, située sur le port de La Cotinière, sur l'île d'Oléron.
La société l’Atelier des gens de mer, située sur le port de La Cotinière (île d’Oléron), jongle avec équilibre financier et inclusion sociale. L’entreprise adaptée, gérée par l’association Navicule Bleue, va changer de main. Dans les prochains mois, elle sera sous la houlette de l’ADEI 17.
Le geste est rapide et précis. Philippe Morandeau, 62 ans, entremêle les cordes avec dextérité et finalise son chalut de 18 mètres. « Cela représente deux semaines de boulot », assure le salarié de l’Atelier des gens de mer depuis 14 ans.
Philippe est un pêcheur « débarqué » comme on dit, du fait d’une maladie ou d’un handicap. Un jour, il a été victime d’un accident de la route qui l’a plongé dans le coma quelques jours et laissé des séquelles. « Impossible pour moi de continuer à travailler en tant que pêcheur et je ne me voyais pas quitter le milieu non plus. Qu’est-ce que j’aurais bien pu faire d’autre ? »
Philippe, comme tous les salariés de cette entreprise adaptée (EA), est un travailleur handicapé. L’Atelier des gens de mer, créé en 2009, permet à ces anciens pêcheurs un reclassement durable dans un milieu où ils peuvent continuer à utiliser leurs compétences. « On a tous appris à fabriquer ou à réparer des filets durant notre carrière, explique Samuel Massé, ancien patron de pêche, aujourd’hui coordinateur de l’EA. Nous valorisons donc notre savoir-faire. »
« Nous facturons à l’heure »
Leurs clients ? Des pêcheurs d’Oléron pour la plupart, mais aussi quelques-uns de Royan. « Nous travaillons avec 25-30 bateaux par an en moyenne », précise Samuel Massé. Les patrons fournissent le matériel nécessaire et les salariés de l’EA s’exécutent. « On n’a pas à gérer les marchandises et les stocks. Nous fournissons des prestations donc nous facturons à l’heure, poursuit le coordinateur. Le fait de déléguer cette tâche à l’Atelier des gens de mer est bénéfique pour tout le monde. Nous, nous avons du travail, et les pêcheurs ont un peu plus de temps libre pour être avec leur famille par exemple. Les journées sont tellement longues dans ce milieu que des gains de temps sont toujours bons à prendre. »
L’entreprise, qui a enregistré en 2022 un chiffre d’affaires de 150 000 €, est une société coopérative d’intérêt collectif (Scic) constituée sous forme de société à responsabilité limitée (SARL). « Notre objectif est de trouver un équilibre financier pour assurer les salaires et continuer à embaucher. Nous cherchons d’ailleurs des gens pour remplacer des départs à la retraite, nous en avons deux cette année. »
Un entreprise, trois sites
L’Atelier des gens de mer, situé historiquement sur le port de La Cotinière, sur l'île d'Oléron, comprend deux autres sites. « Nous avons un autre atelier à Saint-Pierre-d’Oléron, où nous embauchons quatre personnes. Nous avons voulu diversifier notre activité tout en gardant comme fil conducteur la couture. Sur le port, on “coud” des filets, en ville, on coud des sacs, des doudous, etc. Nous travaillons avec des commerces, des entreprises, etc. Nous sommes d’ailleurs à la recherche de nouveaux partenaires, détaille Samuel Massé. Puis, nous avons un dernier site à Arcachon où nous avons deux salariés. Il y en a un qui effectue en ce moment des prestations pour le chantier naval Couach. »
Dans les prochains mois, un nouveau service sera aussi proposé. « Nous avons un bateau école, spécialement conçu pour les personnes handicapées, qui leur permettra de passer le permis. L’Atelier des gens de mer n’a pas fini de se diversifier ! »
