Avec Nexterre, Goyhetche TP structure une filière locale de valorisation des terres de chantier - Premium

« C'est devenu la matrice de l'entreprise. Chaque fois qu’on fait un choix, on essaye de faire en sorte qu’il soit le moins impactant possible pour l’environnement. » Pour Ramuntxo Goyhetche, dirigeant de l’entreprise qui porte son nom, c’est devenu un sacerdoce. « Depuis 25 ans, nous travaillons autour de la valorisation des matériaux. Nous avons commencé avec les gravats de démolition. Ensuite, on a étendu notre champ d’action au traitement des terres de remblais. » Il y a un peu plus d’un an, il a lancé le projet Nexterre. Un programme ambitieux qui vise à créer une nouvelle filière pour valoriser les terres d'excavation en matériaux de construction. « Ce projet est une réponse à l’inefficacité actuelle dans la gestion des terres de chantier, souvent considérées comme des déchets », martèle-t-il. Chaque année en France, près de 130 millions de tonnes de terres sont excavées pour des projets d’infrastructures et d’aménagements, selon le Le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM). Considérées comme des déchets, ces terres finissent généralement leur vie dans des décharges. « Or, il y a tellement à faire avec ces matériaux. » Le principe du payeur-pollueur En partenariat avec le SIAM, le laboratoire de l'Université de Pau et des Pays de l’Adour, mais aussi avec plusieurs entreprises dont Nobatec, Bil Ta Garbi ou encore Alios, Ramuntxo Goyhetche et son équipe continuent leurs travaux pour rendre leur projet viable. « Au cours des derniers mois, nous avons réalisé des tests en laboratoire, fait des analyses, des essais de résistance et aujourd'hui, on a un stock qu'on a ici, et que nous sommes prêts à commercialiser », annonce le chef d’entreprise, avec une fierté dans la voix. « Le but, ensuite, est de transformer ces terres en matériaux pour en faire de la terre à pisé », développe-t-il. (Procédé de construction de murs en terre crue, compactée dans un coffrage en couches successives à l'aide d'un pilon, NDLR). Chaque année, l’entreprise implantée à Bidart voit défiler 35.000 tonnes de déchets - « même si la capacité de la plateforme pourrait facilement atteindre 150.000 tonnes par an, sans compromettre la qualité du traitement », estime le chef d’entreprise. Depuis son ouverture au public en 2012, le site voit défiler toutes sortes de déchets : « Déchets inertes, gravats, béton ou encore de la terre… », précise Ramuntxo Goyhetche. « Les clients viennent ici avec leurs matériaux, nous vérifions leur état, il doit s’agir d’un type de déchet et non d’un mélange de déchets, puis nous les faisons passer sur notre pont-bascule. » Un pont-bascule connecté qui leur permet d’avoir une traçabilité sur tout ce qui entre et sort. « Aujourd’hui, la loi AGEC (loi anti-gaspillage) s’applique aussi sur le secteur du bâtiment. Par exemple, si vous achetez un parpaing, vous devrez payer une éco-contribution pour payer le recyclage de ce parpaing. C’est le principe du pollueur-payeur. » Goyhetche TP adhère aujourd’hui à un éco-organisme, Écominéro, qui récolte les coûts liés au traitement des déchets. « La traçabilité que nous avons mise en place nous permet de savoir quels déchets correspondent à quels clients. Nous pouvons, en bout de chaîne, après valorisation, envoyer la facture à l’éco-organisme, qui à son tour, va la faire payer à ceux qui au départ, ont produit le déchet. » La boucle est bouclée. Répondre localement aux besoins du territoire Outre le projet Nexterre, l’activité de l’entreprise se répartit principalement aujourd’hui autour de trois branches : un premier tiers de l’activité se concentre sur les chantiers, un second sur la « déconstruction sélective », comme l’explique le chef d’entreprise. « Nous choisissons nos chantiers en fonction du réemploi possible des matériaux utilisés. Est-ce qu’ils vont pourvoir aller en recyclage ? Dans quelle filière ? Est-ce qu’on peut gérer ça sur notre plateforme ou est-ce qu’on va devoir travailler avec un autre centre de tri ? » Autant de questions qui déterminent le choix de tel ou tel chantier. Le dernier tiers de l’activité se concentre sur la plateforme bidartare avec « le concassage, le recyclage et le commerce de matériaux disons plus classiques, puisque nous vendons aussi des matériaux aux chantiers avoisinants », égrène Ramuntxo Goyhetche. Pour lui, l’idée d’agir en local est également essentielle. « Notre but est de travailler en circuit-court, dans un rayon d’action de 20 kilomètres autour de l’entreprise », affirme t-il. « Dans notre activité, le coût lié au transport est important, aussi bien en terme pécuniaire qu’au niveau de l’empreinte carbone. » Un équilibre à trouver, d’autant que sur le territoire, la concurrence est rude. « La prise en charge des déchets comme nous le faisons commence à se généraliser. Et c’est une bonne chose, mais nous devons rester concurrentiels. Si je prends le projet Nexterre par exemple, il faut que le matériau qui est reproposé à la vente, après revalorisation, soit le moins cher possible », estime le dirigeant. « Parce que c’est toujours pareil : si on veut pousser les gens à acheter plus éthique, il faut aussi rendre le produit plus attractif, en terme de prix, mais aussi de conception. » Aujourd’hui, Ramuntxo Goyhetche estime que leur matériau est 40 à 50% moins cher que d’autres matériaux présents sur le marché. Mais cette démarche, aussi éthique soit-elle, à un coût : le temps. « Cette année, nous subissons un gros ralentissement de notre chiffre d’affaires. Notamment, parce que les projets sur lesquels je m’investis sont longs à développer. Nous réfléchissons également à renouveler le matériel sur la plateforme, ce qui prend du temps. » Un projet chronophage donc, mais sur lequel le chef d’entreprise veut continuer de s’investir. « Nexterre est pour l’instant un marché de niche, puisque nous développons une filière qui n’existe pas. Je ne sais donc pas si elle sera forcément très lucrative », admet Ramuntxo Goyhetche. « Mais nous nous sommes toujours dit, au sein de l’entreprise, que notre responsabilité, c’est d’abord de trouver des solutions locales pour répondre aux besoins du territoire. C’est une solution qui nous permet de gérer une partie de nos déchets. Ça ne sera pas la solution miracle, mais une solution. C’est un outil au service du territoire et c’est déjà un grand pas. » Goyhetche TP et Valorisation Créée en 1987Chem. Latéral S, 64210 Bidart8 salariésCA : 1,5 millions (2024)

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