5/5 Mal-logement au Pays basque : une coopérative pour être acteur chez soi - Premium
La question du logement est l'une des plus grandes problématiques au Pays basque depuis plusieurs années. Tous les acteurs économiques du territoire sont impactés. Quels enjeux et quelles solutions ? Comment trouver une sortie pérenne de cette véritable crise du logement ? Placéco Pays basque vous propose une série d'articles toute la semaine sur la question du logement.
Avec son modèle basé sur l'usufruit, Beñat Etchebest veut proposer une solution à la crise du logement. Crédit : Anthony Michel
Effort public afin de construire du logement social, opérations avec bail réel solidaire (BRS), limitation des meublés estivaux, à ces initiatives s’ajoute depuis avril dernier « Etxalde » et « son livret logement ».
Pour les entreprises et les habitants du Pays basque, un nouvel outil se propose de « permettre à chacun d’être acteur du logement. » Mis en avant par l’association Etxalde (« la ferme, la propriété » en langue basque), il prend la forme d’un « livret logement » qui permettrait d’acheter des biens immobiliers.
« Le projet Etxalde est une coopérative qui acquiert des biens immobiliers, décrit Beñat Etchebest, le président de l’association d’origine comme il l'expliquait à Placéco il y a quelques mois. Mais afin de financer des opérations, notre trésorerie s’appuie sur les ressources des entreprises et habitants du territoire. »
Le processus se déploie ainsi : le participant doit abonder une part sociale qui permet un abattement fiscal de 25%. Cette première contribution fait de l’investisseur un sociétaire de la structure, il agit et décide. Le sociétaire peut aussi apporter de la trésorerie avec, à la clef, un taux de rémunération annuelle compris entre 1 et 5% selon la durée d’engagement. « Voilà un investissement complètement sécurisé, puisque c’est de l’immobilier au Pays basque. À part l’or, on ne connaît rien de plus intéressant financièrement » ironise Beñat Etchebest, lui-même ancien agent immobilier.
L’idée est donc de « liquéfier l’épargne locale pour financer le logement sur place, plutôt que de se fier à des placements ou de l’épargne institutionnelle dont on ne sait pas trop où ils vont ». Un clin d’œil à la démarche de la société de capital-risque locale Herrikoa, née en 1980, afin de mobiliser l’épargne populaire et elle, de créer de l’emploi sur place. Cette dernière affiche désormais un capital social supérieur à 8 millions d’euros.
Gérant et optimisant les fonds qui lui sont confiés par les entreprises et les particuliers, qu’en fait Etxalde ? « Nous donnerons la priorité dans ces logements que nous allons acquérir à l’ancienneté sur le territoire. En achetant des immeubles en commun, nous avons l’assurance que ce ne sera ni des résidences secondaires, ni des Airbnb » répond Beñat Etchebest. Ce livret d’épargne logement permet aux investisseurs de garantir l’avenir et les intérêts familiaux : le livret et les fonds sont transmissibles : « Si quelqu’un place 100.000 euros sur un livret et qu’il décède, cette somme sera pour sa descendance. »
Sur le fond, Etxalde entend non seulement apporter une nouvelle solution face à la crise du logement au Pays basque, mais à moyen terme « se réapproprier le territoire et fixer les populations. » Et d’avancer l’idée d’une « sédentarité choisie ».
La main à la pâte
Premier chantier d’importance, l’association va racheter huit appartements à Boucau. Elle a signé un compromis de vente pour cette acquisition. Le projet étant de sortir de la propriété individuelle et d’éviter la spéculation, le droit d’habiter ou le régime de l’usufruitier est proposé.
« Ni propriétaires, ni locataires, tous habitants ! » explique Etxalde qui achète et porte la nue-propriété d’immeubles dont elle vend l’usufruit aux habitants pour la moitié de la valeur d’achat. Ainsi, détaille-t-elle, l’usufruitier acquiert l’usage à vie du bien par acte notarié et il peut le vendre à tout moment ou le transmettre ou le louer pour 10 ans maximum au tarif social. Il assume également la vie globale du bien et participe à la gouvernance d'Etxalde (devenu nu-propriétaire) avec versement d’une contribution mensuelle à son développement, selon la taille de l’usufruit.
Fondée en 2005 sous la forme d’une association, Etxalde a en 2021 pris le statut d’une société coopérative ou société civile d’intérêt collectif (SCIC) avec le statut de société anonyme à capital variable. Elle est déjà devenue propriétaire de biens immobiliers autour de Mauléon (en Soule) : locaux commerciaux et logements sociaux en location.
Au lancement de son livret logement, Etxalde a décidé d’accélérer le processus avec 80 participants fin 2022 qu’elle entend porter à 160 au fil de 2023. Elle table déjà sur, outre les particuliers, d’autres personnes morales, des entreprises et compte sur le renfort des collectivités locales. Elle met en avant deux priorités : loger la population locale à moindre coût, et protéger les acquisitions communes qu’elle réalisera de la spéculation immobilière.
