« Mon seul défaut, c’est d’être patron »
Avec son groupe EvoTech, Anthony Gavend emploie 16 personnes dans les Landes. Crédit photo : AI Days Brest
Inventeur, entrepreneur, employeur et père de famille, Anthony Gavend crée de la valeur dans le département des Landes. Pourtant, il n’arrive pas à trouver un logement en raison de son statut de chef d’entreprise.
Insatiable inventeur, Anthony Gavend entreprend sans cesse. Dans le département des Landes où il a grandi, il innove dans la robotique et l’intelligence artificielle. À la tête du groupe EvoTech, il emploie seize collaborateurs à Saint-Geours-de-Maremne et ses innovations sont reconnues en France comme à l'international. Le tableau serait presque parfait si le chef d’entreprise ne rencontrait pas une difficulté majeure. Sur le territoire où il crée de la valeur, il n’arrive pas à se loger.
Fidèle aux Landes, l’homme vivait jusque récemment dans une maison familiale en Chalosse, près d’Amou. Ne voulant plus faire une heure de route pour se rendre tous les jours à Domolandes, le chef de famille se met en quête d’un logement dans le secteur de Saint-Geours-de-Maremne. Très vite, il se trouve confronté à la réalité du marché. Attractivité du territoire, hausse des taux d’intérêt, augmentation des coûts de construction… Les facteurs sont multiples et convergent tous vers une crise du logement. « C’est un phénomène que je connaissais, j’entendais mes employés en parler et je vis maintenant ce parcours du combattant ».
Entrepreneur, profil à risque
En tant qu’employeur, Anthony Gavend avoue avoir « raté plusieurs opportunités de recruter des talents, faute de logement ». Désormais, la problématique opère sur sa propre famille. « Même avec 3,7 fois le montant du loyer, notre dossier ne passe pas », constate-t-il. La raison réside dans le statut professionnel du candidat locataire. « En tant que chef d’entreprise, je suis considéré comme profil à risque. En plus, ma femme est également chef d’entreprise, donc c’est double risque ».
Lorsqu’il postule sur des logements, le processus est toujours le même. « Sur la cinquantaine de candidatures, notre dossier n’est jamais retenu ». À son profil, lui seront toujours préférés des fonctionnaires en mutation ou des personnes en télétravail avec des bulletins de salaires. La déconnexion entre le montant des loyers demandés et le niveau des salaires locaux provoque un mécanisme nocif. « Les locaux sont désavantagés », estime le Landais. D’autant plus que les agences immobilières se réfugient derrière les exigences de la garantie de loyers impayés. Au final, « les agences gèrent de manière déshumanisée, en privilégiant systématiquement les revenus fixes et les profils lointains…».
« Papa, on n’a plus d’argent ? »
La problématique du logement n’est pas nouvelle, mais elle se trouve exacerbée depuis la crise Covid. « Cela fait des années qu’on en parle, mais que fait-on vraiment sur le territoire ? », s’interroge l’entrepreneur. « Nous vivons sur une zone attractive mais si on veut des familles sur le territoire, il faut mettre en place une politique drastique pour que les Landais puissent se loger ».
Depuis des années, Anthony Gavend participe au développement du territoire. Aujourd’hui, le cœur gros, il se sent fatigué. « Quand je vois ce que je paie, ce que j’apporte, je me dis qu’il faut vraiment s’accrocher pour être entrepreneur dans ce pays, c’est très compliqué ». Devant la difficulté de trouver un logement de longue durée, il a dû se rabattre sur un meublé. « J’ai pris un bail mobilité que je devrai quitter au mois de juin 2026 ». Face à cette situation, ses enfants s’interrogent. « On n’a plus d’argent papa ? », lui demandent-ils. « J’ai des revenus, une boîte qui tourne, des bilans positifs, tout est au vert. Mon seul défaut, c’est d’être un patron ».