Nouvel IHU à Bordeaux : « Favoriser le dialogue » entre acteurs publics et privés - Premium

Pourquoi, selon vous, le projet d’implantation de cet IHU à Bordeaux a-t-il été retenu ? C’est un endroit optimal car il y a un pôle d’excellence au CHU de Bordeaux. À la fois sur les neurosciences, avec un focus particulier sur la pathologie neurovasculaire, mais aussi sur la santé publique, puisqu’on propose de décliner cet institut avec un angle « santé publique de précision ». Enfin, le troisième pôle d’excellence, c’est celui de recherche en santé cardio-vasculaire. Tout cela nous donne une assise importante pour construire le projet. À cela s’ajoute aussi une expérience de plus en plus importante en intelligence artificielle et en approche dite « omique » des biotechnologies à haut débit, ainsi qu’une expertise dans le développement de nouvelles molécules thérapeutiques. Qu’attendez-vous des travaux de cet IHU ? Quelles pourraient être les avancées qui en émanent ?C’est un institut qui s’intéressera à l’amélioration de la santé des vaisseaux du cerveau. C’est un enjeu majeur de santé publique, les accidents vasculaires cérébraux sont une cause importante de mortalité, ils touchent 100 millions de personnes dans le monde. Même la démence, souvent attribuée à la maladie d’Alzheimer, est due dans l’immense majorité des cas à des mécanismes mixtes - Alzheimer et maladies vasculaires. Ensuite ce qui nous intéresse beaucoup, c’est la partie immergée de l’iceberg, une très grande proportion de la population souffre, à partir d’un certain âge, de pathologie de lésions des vaisseaux cérébraux. Elles sont détectables en imagerie mais ne se traduisent pas encore par un AVC ou une démence, cela pourrait justement faire l’objet d’approches préventives. Notre projet est très centré sur des actions de prévention, et pour ça il faut mieux comprendre les mécanismes de progression de ces maladies vasculaires, y compris à des stades très en amont, « silencieux ». En comprenant mieux cela, l’enjeu est de pouvoir identifier de nouvelles molécules thérapeutiques. Créer des synergies internationales Parmi les cinq missions de l’IHU, il y a la mise en place d’une « coalition nationale et internationale, englobant les pays des Suds, pour la santé vasculaire cérébrale ». C’est-à-dire ? Oui, nous souhaitons pousser les approches préventives notamment en milieu hospitalier avec la mise en place d’une clinique de prévention toute nouvelle, qui est une innovation à l’échelle internationale - on en reconnaît la nécessité mais elle n’existe pas encore. Les maladies des vaisseaux cérébraux sont un enjeu de santé publique certes en France et en Europe, mais elles sont encore plus fréquentes et sévères dans les pays des Suds. Nous avons une tradition de coopération internationale, notamment avec l’Afrique subsaharienne, donc nous souhaitons valoriser cette expérience-là. En même temps, on imagine une prévention à l’échelle du territoire, notamment de la Nouvelle-Aquitaine, en réfléchissant à des approches participatives - ce qu’on appelle un living lab. L’idée serait de faire participer les patients, tout le circuit des médecins, des personnels du monde médical privé, des collectivités territoriales, des entreprises… Pour mener une réflexion intersectorielle et identifier les meilleures stratégies pour une prévention plus équitable. On a aujourd’hui un problème majeur avec ces stratégies, c’est qu’elles sont souvent moins accessibles aux personnes défavorisées… Qui sont en réalité les plus vulnérables. On cherche donc à développer des innovations organisationnelles qui nous permettent une plus grande équité.Une mise en service d’ici cinq ans Autre mission de l’IHU, la création d’un « hub » favorisant des partenariats public-privé, ou la création d’entreprises… À l'instar de l'IHU Liryc, premier IHU girondin, comptez-vous créer des « spin-offs » ? Oui, c’est l’un de nos objectifs. Il y a plusieurs niveaux de coopération public-privé, qui sont tout à fait essentiels pour arriver à nos fins, et la création de startups sera certainement un point important. Par exemple, pour développer de nouvelles approches thérapeutiques, cela peut être intéressant. Mais il y a d’autres modèles, comme des laboratoires mixtes partagés - même si c’est compliqué à monter - codéveloppés avec des partenaires privés, par exemple. Jusqu’à présent une quinzaine d’entreprises ont soutenu notre candidature et on compte élargir ce panel, qui va de startups locales ou régionales à des multinationales dans différents domaines - médical, pharmaceutique, construction d’imagerie… On aimerait favoriser ce dialogue, par exemple en proposant une journée d’innovation qui rassemble différents acteurs, pour bien comprendre les attentes, les besoins de partenaires industriels. Quand cet IHU sortira-t-il de terre, et comment sera-t-il financé ? Concernant le bâtiment c'est en cours de négociation, mais ce qui est acté, c’est qu’il sera sur le campus Carreire de l’Université de Bordeaux, à proximité immédiate du CHU Pellegrin, où se trouvent les services de neurologie. Ce qui est pour le moment avancé, c’est une mise en service à horizon de cinq ans au plus tard. Ce sera soit une construction, soit une réhabilitation, nous en saurons plus dans les prochaines semaines. Quant au budget, on a sollicité une enveloppe de 50 millions d’euros - qui ne comprend pas la construction du bâtiment - mais nous n’avons pas encore de précisions sur le montant total alloué par l’Etat. Notre modèle économique s’étale sur une durée de dix ans, et pour l’anticiper nous regardons comment évoluent les IHU de la première vague. On compte sur notre capacité à lever des fonds sur des contrats de recherche nationaux, européens ou internationaux, mais aussi sur notre capacité à attirer des investisseurs privés - entreprises ou philanthropes. Combien de personnes travailleront dans cet IHU ? Environ 150 chercheurs sont mobilisés sur la construction du projet. On envisage de créer une dizaine de chaires, avec des chercheurs qui auront pour but de développer leur propre équipe, et donc de pérenniser des postes sur dix ans. Tout cela n’inclut pas les postes supports qu’il faudra recruter.

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