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Taxe Zucman : le patronat est-il en train de perdre la bataille de l’opinion ?

Opinion
lundi 29 septembre 2025
Taxe Zucman : le patronat est-il en train de perdre la bataille de l’opinion ?

Médias, réseaux sociaux, meeting… Les entrepreneurs multiplient les prises de parole pour dénoncer les effets délétères de la taxe Zucman. Mais qu’il est difficile d’être entendu quand règnent la simplification du discours et le populisme.

Le Concours Lépine de la nouvelle taxe est ouvert. Alors que la France se cherche désespérément un budget, chacun y va de sa proposition pour trouver les quelques dizaines de milliards d’euros nécessaires au redressement des comptes publics. Au milieu de ce débat, un sujet s’est imposé : la taxe Zucman. Et, plus largement, la nécessité de faire contribuer les riches. Pourquoi le débat public se concentre-t-il sur ce thème, en assimilant les riches aux patrons, et pas sur d’autres sujets (les dépenses sociales, l’absentéisme dans la fonction publique, la centralisation et le mille-feuille administratif, le temps de travail…) ? Pourquoi la voix des entrepreneurs est-elle si difficilement audible ? Je ne peux m’empêcher d’y voir un sujet culturel. Non pas que les Français n’aiment pas les chefs d’entreprise (76% font confiance aux PME, 48% aux grandes entreprises privées). Je pense surtout à la culture économique. Qui parmi les Français a vraiment compris le principe de la taxe Zucman ? Il n’est pas méprisant de dire cela, discuter autour de vous et vous verrez. À ce titre, au lieu d’interroger les Français pour savoir s’ils sont favorables à la taxe Zucman (86% déclarent l’être), il serait d’abord pertinent de leur demander s’ils ont compris le principe de la taxe Zucman. Si certains médias ont réalisé un travail de pédagogie, beaucoup usent de raccourcis ou laissent passer des témoignages que je juge souvent de mauvaise foi, et parfois même complètement effarants. Et que dire des réseaux sociaux où le discours « taxer les riches ! » est ultra majoritaire et la taxe Zucman présentée comme une mesure de justice sociale ?

Bernard Arnault, un porte-voix… À oublier

Face à ces discours, les entrepreneurs ne restent pas inactifs. Habituellement réservés sur les sujets politiques, ils ont été nombreux à s’exprimer dans les médias. Avec une voix plus entendue que les autres, celle de Bernard Arnault (LVMH). Erreur stratégique. Si l’on ne peut que respecter ses talents d’entrepreneur, il faut aussi constater les dégâts de sa prise de parole. L’homme le plus riche du monde (ou presque) qui critique une taxe. Inaudible pour l’opinion publique. Et du pain béni pour les partisans de la taxe Zucman, qui usent jusqu’à la caricature de l’image du milliardaire que ne veut pas que l’on touche à son magot. J’ai largement préféré les interventions de Maurice Levy (Publicis), Nicolas Dufourcq (Bpifrance), Arthur Mensch (Mistral)… Qui ne contestent pas la nécessité d’une meilleure répartition des richesses mais alarment sur les effets de la mise en place de la taxation du patrimoine professionnel. J’ai encore plus apprécié les interventions d’Eric Larchevêque, qui s’est largement exprimé dans les médias et vient de publier une vidéo explicative sur sa chaîne Youtube. 200.000 vues en 5 jours. L’homme est populaire (grâce à l’émission Qui veut être mon associé), fait œuvre de pédagogie et touche une large audience. Il a bien compris que le combat de l’opinion se jouait désormais sur les réseaux sociaux. À ce titre, tous les entrepreneurs ont un rôle à jouer. Y compris à l’échelle locale.

La colère gronde

Un autre champ d’action, bien plus surprenant, est investi par les patrons : la rue. Enfin, pour être plus précis, l’Accor Arena de Paris Bercy, qui accueillera le 13 octobre un grand rassemblement de chefs d’entreprise. « Plus nous serons nombreux et rassemblés, plus notre message sera entendu ; et plus nous défendrons la place que l’économie et les entreprises prendront dans les nombreux débats à venir », écrit le Medef dans un communiqué. L’image fera date. Cette opération atypique témoigne de la colère qui gronde parmi le monde patronal, que Patrick Martin, président du Medef, a bien entendu. Cette colère, je la constate tous les jours au contact des entrepreneurs, qui ont bien compris qu’après la taxe Zucman (qui ne verra pas le jour), tous les autres projets de taxes seront présentés comme des pis-aller non négociables.

Irresponsables politiques

Interviews dans les médias, publications sur les réseaux sociaux, meetings… Les entrepreneurs donnent de la voix. Seront-ils entendus ? À l’heure des réseaux sociaux et des algorithmes, l’explication et la nuance ne pèsent pas lourds face à la simplification, la caricature voire l’outrance. Encore plus quand cette simplification, cette caricature et cette outrance sont relayées par des « responsables » politiques. Le populisme fait recette mais il ne faut pas pour autant s’abaisser à en utiliser les ressorts. Comme indiqué au début de cet article, les Français ont confiance dans leurs dirigeants, particulièrement dans leur patron de TPE, PME et ETI (bref, le patron qu’il connaissent personnellement). À ces patrons de s’exprimer pour faire entendre leur voix. Sinon, d’autres le feront à leur place.

Yann Buanec, directeur de la publication Placéco

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