Systel, la PME qui veut sauver des vies grâce à l’IA, se déploie à l'étranger - Premium

Cela fait 40 ans maintenant que Systel s’est imposé comme l’un des piliers du numérique de la sécurité civile française. Pour 2026, son ambition se porte hors des frontières de l'hexagone, en Europe. Son métier : concevoir des logiciels d’aide à la décision pour les pompiers. Ses outils couvrent la chaîne complète du secours : réception des appels (18/112), géolocalisation, qualification de l’urgence, proposition automatique de départs d’engins, communication en temps réel via des tablettes embarquées et enfin analyse post-intervention. Chaque année, les logiciels Systel traitent environ huit millions d’appels d’urgence et deux millions d’interventions, soit une intervention de pompier sur deux en France.Du redressement à la renaissanceCette niche technologique a longtemps prospéré grâce à la confiance des SDIS et à la capacité de Systel à adapter ses outils aux réalités locales. Mais l’histoire a failli s’arrêter brutalement. En 2022, la société entre en redressement judiciaire. « On a failli mourir », reconnaît aujourd’hui Sébastien Guyot, son président, arrivé en 2020 comme directeur financier. Le fondateur, alors âgé de plus de 80 ans, finit par passer la main à une nouvelle équipe dirigeante. En deux ans, Systel retrouve la rentabilité, rembourse ses dettes, regagne la confiance de ses salariés et de ses clients. Le chiffre d’affaires repart à la hausse : 16 millions d’euros en 2024, 17 millions attendus en 2025, avec 120 salariés.Lire également : Systel solide un an après le plan de continuation Alors que Systel retrouvait l’équilibre, une nouvelle menace est apparue : le logiciel national unique développé par l’État pour centraliser la gestion des appels d’urgence. Objectif : uniformiser les SDIS, au risque d’évincer les acteurs historiques comme Systel, présent dans un département sur deux. « Ce n’est pas nous qui quittons le marché, c’est l’État qui nous en écarte », déplore Sébastien Guyot, qui défend un modèle décentralisé et résilient, capable de fonctionner même isolé du réseau national.L'IA au service du secours Face à ce mur institutionnel, Systel a fait le choix du rebond technologique. Sur les 120 salariés, 40 sont développeurs, dont quatre dédiés à l’intelligence artificielle. Leurs travaux portent sur l’une des innovations les plus prometteuses du secteur : la transcription automatique de la voix en texte (speech-to-text) appliquée aux communications d’urgence. Dans les centres d’alerte équipés, la radio des pompiers est désormais écoutée par une IA qui retranscrit instantanément les échanges à l’écran. Gain de temps pour les opérateurs, réduction des erreurs de saisie, meilleure traçabilité. Mais la vraie rupture réside dans la compréhension automatique du langage pompier : l’algorithme reconnaît des mots-clés comme feu, blessé, accident, sang, et évalue le degré d’urgence de la situation.Les boîtiers développés par Systel que l'on retrouve dans un SDIS sur deux en France. Crédits Photo : Laurie FerrèreCe traitement en temps réel permet d’adapter automatiquement la réponse opérationnelle : envoyer plus d’équipes, prioriser les interventions critiques, déclencher un renfort plus vite. Le module, déjà déployé dans le SDIS 17 (Charente-Maritime) et à l’étranger, devrait être étendu en 2026 aux appels téléphoniques 18/112.Le rachat de JaguardsEn 2025, une nouvelle étape est franchie avec la prise de participation majoritaire de la holding détenant Systel dans la société Jaguards, basée à Valbonne (Sofia Antipolis). Jaguards, 12 salariés, 1,6 million de CA, est un spécialiste des logiciels de gestion de crise et de sûreté pour les acteurs industriels, les collectivités et les services régaliens. Cette alliance, sous la forme d’une holding commune, offre à Systel un nouveau champ d’action : la gestion globale des crises et des risques, bien au-delà du seul périmètre des pompiers. Les synergies sont évidentes : Systel apporte sa puissance logicielle et ses compétences en IA, Jaguards ses connexions dans le monde industriel et institutionnel. « On ne fait pas que des logiciels, on fait des logiciels qui sauvent des vies. Cette raison d’être, Jaguards la partage », résume Guyot.Lire également : Les travaux de la nouvelle caserne de pompiers sont lancésSystel mise également sur deux autres axes porteurs : la détection précoce des feux de forêt, via des capteurs autonomes, et la cybersécurité. Ces innovations s’inscrivent dans un mouvement plus large : la transition numérique de la sécurité civile, où les données en temps réel, la géolocalisation et l’intelligence artificielle redéfinissent la façon d’alerter, de coordonner et d’intervenir. Avec cette restructuration, Systel vise désormais l’international. Présente en Belgique, Suisse, Royaume-Uni et Monaco, elle ambitionne d’inverser la structure de son activité d’ici 2030 : 80% du chiffre d’affaires à l’étranger, contre 20% aujourd’hui. Systel Siège : PérignyNombre de salariés : 120CA en 2025 : 17 millions d'euros

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