Économie/Industrie : numérique responsable, quel ROI ? - Premium

Certains faisaient du numérique responsable avant même que l’expression fasse florès. Jean-Paul Lieux, cofondateur de la société girondine Dolist, spécialiste de l’e-mail marketing, est de ceux-là. Pour lui, la démarche du numérique responsable est d’abord « la déclinaison de l’engagement RSE dans le digital ». Elle suppose d’impliquer toutes les composantes de son entreprise : « Il faut sensibiliser et mobiliser l’ensemble des équipes », ce qui induit que les TPE et PME/PMI auront mécaniquement plus de chances de réussir, par agilité, que les ETI et grands groupes. Manière de torde le cou à l’idée reçue que la transition responsable n’est qu’affaire de moyens financiers.À lire également - Dolist intègre le groupe TSS : les ressorts de cette consolidation dans le marketing numériqueLa sobriété comme premier levierAu contraire, la première des démarches responsables serait ainsi la sobriété. Une ligne de conduite - et de transformation - parée de nombreuses vertus. Outre la stratégie de différenciation sur laquelle Dolist a pu jouer, la sobriété est porteuse d’économies. Et pas que de bouts de chandelles. « On avait fait -80% sur notre budget impression. On a travaillé sur l’allongement de la durée de vie de nos matériels. L’année d’après, ce budget avait diminué de 20%. » Et il y a « des impacts qu’on n’arrive pas forcément à chiffrer immédiatement, notamment pour la marque employeur, on donne du sens en interne aux actions du quotidien ». Il cite encore un exemple, qui concerne cette fois Ubisoft, célèbre éditeur de jeux vidéo, notamment implanté à Bordeaux : « Ils ont mis en place un système d’économie d’énergie sur les stations de travail. Ils en ont 16.000. La première année, 12.000 ont été équipées. Ils ont fait 775.000 euros d’économie. » Dans le rétro : Ubisoft s’implante durablement à Bordeaux rive droite avec un bâtiment de 7.800 m²Analyse de donnéesMehdi Guellil, CEO de la société paloise Kerdos, conseille les entreprises pour leur transition énergétique. À ce titre, il réfléchit en matière de flux, notamment pour l’industrie. « Sur ce plan, on voit très vite le ROI financier. Mais l’énergie n’est finalement pas si chère que ça. Il faut imaginer des formes de ROI complémentaires. Si on commence à réfléchir en flux, en CO2, en eau, en ressources… On peut commencer à avoir une perception complétement différente. Il faut rajouter ces colonnes dans votre business plan. » Alexandre Moine, fondateur du cabinet Thélio, prolonge l’approche. « Pour piloter la transition, il faut s’outiller et être capable de mesurer au quotidien. Et finalement, même si vos chiffres ne sont pas exacts, la variation au fil du temps sera juste. Ces résultats visibles encouragent à l’action. » Dans cette volonté de rajouter de nouveaux indicateurs dans les outils de pilotage, il suggère de financiariser tous ses indicateurs extra-financiers et de pénaliser les scénarios à impact environnemental négatif. Corollaire, le coût financier projeté augmente, amenant à arbitrer pour une autre solution. « On garde la chaîne de décision habituelle. Mais au final, on a réussi à faire entrer de l’extra-financier dans la chaîne de décision financière. »Pourquoi la cybersécurité ?Guy Flament, directeur du campus régional de cybersécurité et de confiance numérique de Nouvelle-Aquitaine, abonde et parle sécurité informatique. « On commence par faire l’inventaire de ce dont on a strictement besoin. Moins on a d’outils informatiques et moins il y a de choses à protéger. On réduit la surface d’attaque. Autre conseil : si vous êtes sous Windows, désactivez tous les services que vous n’utilisez pas. Vous ferez un bond en avant dans la sécurité et dans la sobriété énergétique et vos machines vont durer trois ou quatre ans de plus. » Il ose même une suggestion plus iconoclaste encore : « Lâchez Microsoft et passez sous Linux. Contribuez au monde open source à hauteur de 10% de ce que coûtent vos licences Windows et vous verrez que dans deux ans, vous aurez des systèmes beaucoup plus sobres et fiables, qui vous permettront d’utiliser vos machines beaucoup plus longtemps. »À la question « Le numérique responsable, quel ROI ? », Guy Flament a une réponse bien à lui. « On n’a plus le choix. Ça ne doit plus être seulement l’expression d’une volonté. Le numérique responsable prépare votre résilience face aux chocs futurs. Si vous ne le faites pas, vous subirez. »

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