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Vins de Bordeaux : l’arrachage pour répondre à la surproduction ?

Écosystème
mardi 24 mai 2022

L'interprofession des vins de Bordeaux demande la possibilité de subventionner l'arrachage des vignes - crédit markusutiger

Confrontée à un écart structurel entre ses capacités de production et ses niveaux de commercialisation, l’interprofession des vins de Bordeaux en appelle à ses homologues et aux pouvoirs publics, pour financer et encadrer l’arrachage de certaines surfaces de vignes. Un sujet qui devra nécessairement être porté au niveau européen.

En 2021, les sorties à la propriété du vignoble bordelais s’établissent à 4,2 millions d’hectolitres. Un rebond de 9% sur un an, mais un niveau qui reste nettement inférieur aux 5,1 millions d’hectolitres de 2017. « Nos vins les plus chers se vendent bien et les moins chers sont à la peine », a synthétisé Bernard Farges, président du conseil interprofessionnel des vins de Bordeaux, en ouverture de son assemblée générale du 23 mai. Et si l’interprofession avance sur l’intégration du VCI (Volume complémentaire individuel) pour lisser les rendements dans la durée, il lui reste à s’outiller pour faire face à la problématique, désormais structurelle, de la surproduction. « Aucun outil de régulation ne, peut à lui seul résoudre l’écart, connu de tous ici, entre notre potentiel de production actuel et notre niveau de commercialisation », a précisé Bernard Farges.

« On vit un accident industriel. On parle de RSE alors qu’on vend le tonneau de Bordeaux à 800 euros », grince dans l'assistance Dominique Techer, porte-parole de la Confédération paysanne Gironde, selon qui certains exploitants n’arrivent plus à cultiver leurs vignes, à plus forte raison dans un contexte d’inflation des coûts. « Certains n’ont pas les moyens. D’autres n’ont pas de problème financier mais ils sont simplement trop âgés », renchérit Franck Jullion, président de l'appellation Blaye Côte de Bordeaux, en rappelant que d’après la MSA (mutualité sociale agricole), 60% des vignerons girondins auront plus de 60 ans d’ici cinq ans. « La surface plantée est trop importante puisqu’on n’arrive pas à écouler les volumes, il faut donc réduire la voilure afin de mieux rebondir », résume Jean-Marie Garde, président de la Fédération des grands vins de Bordeaux (FGVB).

Réorienter les subventions vers l'arrachage pendant trois ou quatre ans

D’où cette idée, désormais officiellement portée par le CIVB, de préparer le terrain pour qu’une partie des subventions qui soutiennent aujourd’hui la restructuration des vignes et les investissements de chais puisse financer l’arrachage des surfaces excédentaires – dont les coûts sont estimés à 2.000 euros à l’hectare, afin que ces dernières soient converties vers d’autres usages agricoles ou forestiers. Problème : les textes européens ne permettent pas aujourd’hui de subventionner l’arrachage, et l’interprofession bordelaise sait qu’elle ne pourra pas faire bouger les lignes seules. « C’est un sujet structurel, qui n’est pas propre à Bordeaux, on l’a vu il y a deux ou trois ans quand toute la France distillait du vin », estime Bernard Farges, selon qui il n’est pas question de cesser de soutenir les « projets structurants », mais plutôt de mettre ces derniers en pause le temps de retrouver une situation plus normale, sans toucher aux subventions dédiées à la promotion. A ce stade, le CIVB n’avance aucun chiffre quant aux surface qui mériteraient d’être arrachées et converties. « Le calibrage viendra dans un second temps, pour l’instant il faut voir comment faire changer le texte européen », élude le vigneron.

Les négociants partagent-ils ce point de vue ? « Il n’y a pas d’unanimité, mais nous faisons face à une concordance d’événements qui impose de trouver des solutions. Il y a plusieurs pistes, dont celle de l’arrachage, il faut voir si c’est possible de l’accompagner financièrement », répond Allan Sichel, vice-président du CIVB, qui voit cependant d’autres portes de sortie, comme le passage de certaines AOC (Appellations d’origine contrôlée) en IGP (Indication géographique protégée), pour répondre à un contexte de « forte demande pour des vins fruités et faciles ».

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